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03 / 12 / 2010 | 63 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Petites recettes pour ouvrir la porte aux seniors démotivés

Le plan de départ volontaire n’est pas la meilleure des solutions lorsqu’une direction cherche à proposer une porte de sortie à ses seniors qui n’adhèrent plus à la stratégie de l’entreprise et à son mode de management. Ça laisse des frustrés en interne en raison des processus de sélection. En janvier 2010, 26 % de l’effectif d’HP ESF (ex-EDS), dont beaucoup de seniors se sont portés volontaires dans le cadre du plan de départs. Le taux de refus a été de 42 %.

Inégalité de traitement

Mais pas question de réserver les indemnités des départs volontaires aux « quinquas désenchantés » car cela constituerait une inégalité de traitement. Cela a été pourtant une proposition de FO, que la direction des Caisses d’Épargne a un temps accepté de négocier en septembre, dans le cadre du plan de suppression de 4 500 postes d’ici 2012. « Il y a une souffrance très grande des quinquas dans les caisses. Il est essentiel de pouvoir leur donner de l’oxygène alors que l’accord qui garantissait un départ en préretraite après 30 ans d’ancienneté a été dénoncé en 1999 », expliquait alors Bruno Aguirre, délégué syndical central FO, qui voyait dans cette proposition une « façon de ne pas bloquer inutilement les salariés qui souhaitent faire carrière ». La proposition est finalement passée à la trappe.

  • En octobre dernier, c’est dans un contexte de profonde restructuration que la CFDT des CCI assume avoir porté une proposition pour la moins détonante : introduire un motif de licenciement qui ne concernerait que les seniors, dès lors qu’ils sont au moins à trois ans d’une retraite à taux plein. Sous pression de la tutelle ministérielle, cette proposition a été retirée de l’ordre du jour de la commission paritaire nationale qui s’est tenue le 27 octobre dernier. C’est parce que le motif de licenciement statutaire classique coûte cher aux CCI, indemnité d’un mois de salaire par année d’ancienneté, que la CFDT estime que ce sont les jeunes qui seront le plus dans le collimateur des licenciements. D’où l’idée d’un nouveau motif de licenciement qui coûterait moins chez aux CCI mais qui permettrait aux seniors de ne pas y perdre.

Préretraites déguisées

La préretraite classique, même financée à 100 % par l’employeur, n’est plus politiquement correct et revient surtout beaucoup plus cher. Certains font tout de même de la résistance. Ainsi, Siemens a fait partir 120 seniors au printemps 2010. Une préretraite sobrement baptisée « portage ». En 2009, le Crédit Agricole en a proposé une pour faire passer la fusion entre Finaref et Sofinco. En 2009, même La Poste avec son DAFA (dispositif aménagé de fin d'activité) avait encore sa préretraite déguisée qui permet de quitter l’entreprise à 56 ans en touchant 60 % de son salaire jusqu’à 60 ans. Une double condition : être fonctionnaire et avoir fait 6 mois de travail à temps partiel...

  • En novembre, Renault a mis sur la table de la négociation de son accord GPEC le projet d’un plan de départs anticipés qui devrait permettre de sortir 3 200 seniors en mesure de prouver qu’ils sont à trois ans d’une retraite à taux plein et qu'ils ont travaillé 15 ans sur une chaîne de la régie ou ailleurs. Un critère de pénibilité élargi, qui permet d’éviter au dispositif de se voir collé l’étiquette de préretraite.


Voilà qui n’est pas sans rappeler l’accord de préretraite signé en 1999, qui a soldé ses derniers départs en 2005. Pendant cette période, plus de 10 000 salariés ont quitté Renault entre 57 et 55 ans. L’État cofinançait alors les dispositifs (entre 50 et 20 % du coût), notamment les CATS (cessation anticipée d’activité des travailleurs salariés), qui permettaient de partir à 55 ans si l’on justifiait de 15 ans de travail à la chaîne.

Départs plus ou moins anticipés

PSA va-t-il embrayer ? En attendant, rares sont aujourd’hui les entreprises où la reconnaissance de la pénibilité donne le droit à une préretraite de trois ans. Le départ peut être anticipé de 12 mois chez Thales mais il faut pour cela justifier de 25 ans d’ancienneté en travail de nuit, travail en 2x8 ou 3x8. L’accord seniors d’EADS prévoit que les salariés ayant travaillé 10 ans en équipe 3X8 puissent quitter l’entreprise seulement 2 mois avant d’avoir atteint l’âge pour une retraite à taux plein. L’anticipation du départ passe à 7 mois avec 20 ans de travail en 3X8 au compteur.

Les seniors de France Télécom Orange peuvent désormais anticiper le départ de 18 mois sans qu’il soit question de pénibilité. Le TPS (temps partiel seniors) qui est proposé permet de travailler à 50 % tout en étant payé à 80 %. La contrepartie : s’engager à quitter l’entreprise au bout de 3 ans. C’est en capitalisant la sur-rémunération dans un compte épargne temps spécial que les seniors peuvent anticiper... Dans le cadre de la négociation de l’accord serniors, la CFE-CGC-Unsa du groupe revendiquait un retour à une préretraite à 57 ans, alors que la moyenne d’âge du groupe est de 48 ans. En 1996 et 2006, la préretraite maison, baptisée CFC (congés de fin de carrière), a permis de faire partir plus de 40 000 seniors, moyennant un budget de 800 millions d’euros par an. La direction ne peut plus se le permettre aujourd’hui car le flux de départs à 57 ans serait d’environ 3 000 salariés par an pendant 4 ans...

L’imagination est parfois à l’honneur pour contourner la taxation des préretraites. En 2008, la Monnaie de Paris a ainsi inventé le « congé mission expérience senior », qui permettait de partir à 57 ans en touchant 65 % de sa rémunération mais d’être rappelé pour assurer au moins 4 mois de tutorat. Un engagement à un retour épisodique dans l’entreprise permettant d’échapper à la taxation...

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