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02 / 07 / 2014 | 133 vues
Angela Accaoui / Membre
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La RSE est-elle négociable et dans quelles conditions ?

« Les objectifs de notre démarche RSE ne sont pas encore négociés mais nous souhaitons qu’ils le deviennent », annonce Catherine Candella, directrice RSE du groupe Chèque Déjeuner (*) qui parrainait le café social du 5 juin dernier sur les conditions de négociation des engagements de cette responsabilité qui ouvre sur une approche différente du dialogue social.

Crédit photo > Marie-Noëlle Auberger - Gestion attentive

« Cela sous-entend que les représentants du personnel aient une idée très claire des engagements qu’ils veulent négocier et des indicateurs associés. La RSE doit être opérationnelle. Il ne s’agit pas de superposer les indicateurs les uns sur les autres », souligne Catherine Candella dont la direction porte une démarche d’harmonisation par le haut du cadre social dans l’ensemble des filiales du groupe, y compris internationales. Un état des lieux de la situation des indicateurs sociaux des 13 filiales étrangères s’impose donc. « En coordination avec la DRH du groupe, c’est la direction de la RSE qui demande ce reporting social aux responsables de toutes les filiales. Malgré la charge de travail que cela représente, la demande est bien reçue et les filiales se prêtent au « jeu ». Notre approche s’inscrit dans un projet global qui intègre toutes les dimensions : économique, sociale, environnementale et sociétale », considère Catherine Candela. La volonté du groupe vise notamment à proposer une protection sociale à chacun des salariés en poste à l’étranger, soit à plus de 55 % de l'effectif. Reste désormais à faire comprendre que cette harmonisation sociale va s'accompagner de concessions pour les salariés les plus privilégiés. Le prix de la solidarité pour une coopérative qui entend porter cette valeur.

Prendre du recul


« La RSE serait le moyen de porter la négociation d’un nouveau contrat social qui créerait les conditions pour que les salariés puissent se sentir à la fois citoyens et militants dans l’entreprise », souligne Marc Weiss, secrétaire CFDT du CCE de la MGEN (*), qui intervenait à l’occasion de ce café social. En attendant, la RSE n’est pas plus négociée à la MGEN qu’au groupe Chèque Déjeuner mais les indicateurs et les objectifs fixés sous son impulsion ont des conséquences sur les négociations classiques. Comme par exemple l’objectif de 100 % des salariés rémunérés à au moins 120 % du SMIC, qui s’invite dans la négociation annuelle sur les salaires. Selon Marc Weiss, « une négociation sous l’égide de la RSE permettrait de prendre du recul. C’est indispensable à l’heure où chacun à la tête dans le guidon ».

Signer n'est pas une fin en soi


Les partenaires sociaux de Renault (*) ont su trouver le temps de cette prise de recul. Ils ont d’abord unanimement signé un accord RSE mondial en juillet 2013, fruit d’une première de négociation visant à s’entendre sur le sens des engagements en matière d’emploi, de sécurité, de protection sociale. Mais cette signature n’était nullement une fin en soi ; cela a été le début d’une concertation de dix mois au rythme d’une réunion mensuelle pour déterminer les indicateurs sous-jacents aux engagements pris dans l’accord. « Nous sommes partis de 130 indicateurs pour affiner à 60. Nous avons aussi identifié leur niveau de pertinence en fonction de leur périmètre. Ils peuvent donc s’exprimer mondialement, nationalement, par établissement, voire par métier », explique Eric Vidal, secrétaire adjoint du comité de groupe de Renault. Il est original de commencer par signer le cadre d’un accord pour se concerter ensuite sur les moyens de le faire vivre. Pour Patricia Fouache, responsable des relations sociales internationales, « nous nous donnons le droit à l’erreur. Rien n’est figé. Il ne faut surtout pas bloquer les opérationnels car ce sont eux qui vont donner tout son sens à cet accord. Il ne faut pas attendre d’être obligé de se parler pour le faire. C’est la grande source d’enrichissement de cet accord qui a, par exemple, été l’occasion de découvrir la diversité des approches que les entités pouvaient avoir sur les différentes formes de l’emploi précaire ».

Des discours en adéquation avec les pratiques

Manifestement, les syndicats peinent à sortir du cycle des négociations classiques pour prendre un peu de hauteur avec la RSE. « Les représentants du personnel sont mûrs quand ils commencent à se poser la question de la RSE au niveau du comité d’entreprise en tant qu’entités propres. Un CE est en effet à la fois un employeur et un donneur d'ordres », souligne Sophie Thiéry, directrice de Vigeo Entreprise, qui précise que très peu d’élus de CE demandent à leur direction la notation extra-financière de leur entreprise.

La RSE est pourtant un levier susceptible de peser dans des négociations pour mettre les discours en adéquation avec les pratiques. Le 13 juin dernier, 75 % des 353 sociétaires de la coopérative Chèque Déjeuner ont voté en faveur d’une étude sur les conditions d'un élargissement progressif de la coopérative qui se traduirait par une redistribution des résultats à un plus grand monde. La coopérative, la société mère, emploie aujourd’hui moins de 20 % des effectifs. Cet élargissement du périmètre donnera tout sons sens à la notion de groupe coopératif.

(*) Le groupe Chèque Déjeuner et la MGEN sont les membres fondateurs de L’Archipel. Renault en est membre.
L’Archipel est un réseau d’échange interentreprises sur la RSE initié par le Miroir Social. Il vise à décloisonner les échanges entre directions RH, Communication, RSE et syndicats sur le pilier social de la RSE.

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