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18 / 01 / 2016 | 3 vues
Didier Cozin / Membre
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Le naufrage de la formation professionnelle pour 2016 (2ème partie)

En entreprise, une formation réduite à sa plus simple expression : des formations obligatoires sans rapport avec l’avenir du travail.

Le CPF a réduit l'initiative individuelle en formation à un vain cumul d'heures de formation. Non seulement un salarié ne pourra jamais trouver les 150 ou 200 heures (tous ses congés payés d'une année) pour se former hors temps de travail mais, plus ennuyeux encore, se former sans dialoguer et partager son projet avec son employeur rendra la formation inutile, un resucé amer et contreproductif de l’école.  

Un salarié se formant seul puis présentant son nouveau diplôme à un employeur sera généralement éconduit.

Les services RH et formation le confirment pour la plupart : très rares sont les employeurs  à la recherche de diplômes et plus rares encore ceux qui pourront financièrement promouvoir leurs salariés en les faisant accéder à un niveau supérieur de qualification.

Nous ne sommes plus dans les années 1960, quand l'ascenseur social fonctionnait à plein, quand un salarié non qualifié pouvait devenir technicien puis ingénieur en partant de très bas. La promotion sociale et professionnelle à l'interne est aujourd’hui devenue exceptionnelle pour au moins 3 raisons.

La mobilité est devenue horizontale : l'école surproduit depuis 30 ans des diplômés ; ceux-ci sont peu coûteux (pas d'ancienneté) mobiles et adaptables. Rares sont donc les entreprises qui chercheront à l'interne à faire évoluer leurs salariés non ou peu qualifiés. Face aux résultats médiocres d'une école incapable de former des travailleurs engagés et adaptables, la France a promu et subventionné le travail non qualifié. Aujourd’hui les entreprises de main d’œuvre (sous-traitant souvent de grands groupes nationaux) n’ont pas de possibilité de promouvoir massivement leur personnel.

La culture de la formation est éloignée du modèle français : les entreprises françaises n'ont guère de culture de la formation (10,5 % d’entre elles déploieraient cette culture, selon l'INSEE) et la formation reste donc un poste de dépenses assez superflues (le passage de la cotisation obligatoire de 1,6 % à 1 % de la masse salariale renforce cette idée que l'on peut économiser sans dommage sur les budgets de formation).

La formation dépend d'abord de la qualité et de la confiance au travail : à force de réduire le temps consacré au travail et de rendre conflictuelles les relations de travail, les entreprises n’ont plus guère de marges ou d'envies de former leur personnel.

Les 35 heures, une occasion perdue d'augmenter depuis 15 ans le temps de formation

Les 35 heures auraient pu être mises à profit pour former mieux et plus mais la société française a fait la promotion du plus séduisant et facile : le temps libre, les loisirs, les RTT et les vacances.

Aujourd'hui, les salariés (surtout les moins qualifiés) ne sont pas capables de se former sur leur temps libre et comme le CPF se déroule sur le temps libre (sans allocations de formation), il n'y a guère de chance de connaître le moindre développement significatif dans les prochaines années.

La réforme de 2014 est un triple échec dont le monde du travail et l'économie auront beaucoup de mal à se remettre.

Dans un pays économiquement et socialement fragile comme l'était la France de 2014, il était irresponsable de prétendre tout à la fois :

  • refonder une formation pour les 40 prochaines années (cf : Michel Sapin à l'Assemblée nationale en janvier 2014),
  • diminuer de 60 % la cotisation obligatoire des entreprises,
  • faire entrer 30 millions d'actifs dans un système improvisé, complexe et bureaucratique  de comptabilisation d’heures et de listage (sans fin) de certifications (prétendument) professionnelles.

L'avenir est désormais sombre pour la formation professionnelle. Celle-ci est peut-être au  service de la communication politicienne (500 000 chômeurs supplémentaires formés en 2016 mais sans aucun avenir professionnel) ou sociale (le compte personnel d'activité) mais plus que jamais les écarts vont s'accroître entre une minorité de travailleurs experts et investis dans leur travail, très qualifiés, mobiles et entreprenants et une masse de travailleurs ballotés d'un plan gouvernemental à l'autre mais sans guère d'espoir de raccrocher les wagons de la société de la connaissance et de l'information.

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