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12 / 06 / 2025 | 28 vues
Aurélie Moreau / Abonné
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Focus des inspections du travail sur le recours abusif aux contrats précaires : et si vous vous intéressiez à la précarité de l’emploi dans votre entreprise ?

L’inspection du travail a officiellement lancé une campagne nationale visant à lutter contre le recours excessif et abusif aux contrats précaires (Communiqué DGT du 19-5-2025). L’occasion de faire le point sur la politique sociale de votre employeur sur ce sujet, analyser l’emploi précaire dans votre entreprise, et vous saisir de votre boite à outils d’élus pour prévenir ou résoudre un usage anormal.
 

QUANTIFIER LE TRAVAIL PRECAIRE
 

Dans les entreprises d'au moins 300 salariés, l'employeur doit informer trimestriellement le CSE sur l'évolution des effectifs (article L. 2312-69) et ce, de façon précise : les indicateurs transmis retracent, mois par mois, l'évolution des effectifs et de la qualification des salariés par sexe en faisant apparaître : 1° Le nombre de salariés titulaires d'un CDI ; 2° Le nombre de salariés titulaires d'un CDD ; 3° Le nombre de salariés à temps partiel ; 4° Le nombre de salariés temporaires ; 5° Le nombre de salariés appartenant à une entreprise extérieure ; 6° Le nombre des contrats de professionnalisation (article R 2312-21).
 

De plus, l'employeur présente au comité les motifs l'ayant conduit à recourir aux CDD, intérimaires, temps partiel, salariés d’entreprises extérieures. Il communique au CSE le nombre des journées de travail accomplies, au cours de chacun des 3 derniers mois, par les salariés titulaires d'un CDD et les salariés temporaires (article R 2312-21). Ce point est porté à l’ordre du jour de votre CSE tous les 3 mois. Je vous invite à vérifier la complétude et la précision des informations données et actées dans le PV.
 

Dans toutes les entreprises et notamment celles de moins de 300 salariés, les mêmes informations sont transmises annuellement en vue de la consultation sur la politique sociale dans la rubrique « Investissement social » de la BDESE (Base de données économiques, sociales et environnementales) : les effectifs sont ici ventilés par âge et par ancienneté (et retracés mois par mois) reprenant la même typologie d’emploi que dans les informations trimestrielles. Vous avez donc les moyens de mener une analyse approfondie et évolutive historiquement. Si vous n’avez pas de BDESE, tous ces indicateurs doivent vous être transmis. Il va sans dire que l’organigramme par poste de vos effectifs régulièrement actualisé reste un outil indispensable, notamment pour vérifier que des contrats précaires ne pourvoient pas durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
 

ANALYSER : CONSULTATION POLITIQUE SOCIALE ET EXPERTISE ASSOCIEE : UN AXE DE MISSION A ORIENTER DANS L’EXPERTISE POLITIQUE SOCIALE, EMPLOI ET CONDITIONS DE TRAVAIL
 

Il est possible d’intégrer un axe de mission spécifique faisant un panorama complet de l’emploi : salariés, stagiaires, apprentis, contrat de professionnalisation, intérimaires, mis à disposition, prestataires (avec la difficulté de la quantification en Equivalent Temps Plein).
 

Cela peut permettre de chiffrer des problématiques précises comme, par exemple, la rupture prématurée des CDD : on relève parfois une proportion importante de ruptures de période d’essai de CDD et de ruptures anticipées à l’initiative de l’employeur ou d’un commun accord contraint. Cette infidélité non voulue engendre des surcharges de travail pour les CDI chargés de les intégrer dans leurs missions, de les former, de les encadrer. La présentation du rapport permettra d’ouvrir cette discussion afin d’en d’établir un constat partagé, d’en comprendre les causes et de préconiser des recommandations, à mettre en œuvre.
 

ET APPROFONDIR :

ACCES SUR INITIATIVE DU CSE AUX CONTRATS DE MISE A DISPOSITION D’INTERIMAIRES


Le CSE a accès aux contrats de mise à disposition conclus entre votre entreprise et les entreprises de travail temporaire (article L. 2312-26, II -9°). N’oubliez pas d’exercer cette prérogative !
 

CONSULTATIONS PONCTUELLES OBLIGATOIRES


Le CSE doit obligatoirement être consulté préalablement à la conclusion d'un contrat de travail à durée déterminée ou d'un contrat de travail temporaire dans certains cas précis :
 

  • Remplacement d'un salarié après son départ définitif, dans l'attente de la suppression de son poste (article L. 1251-6) ;
  • Commande exceptionnelle à l'exportation dans les 6 mois suivant un licenciement économique (article L. 1251-9) ;
  • Embauche de CDD ou d'intérimaires dans les 6 mois qui suivent un licenciement économique, sauf exceptions (articles L. 1242-5 et L. 1251-9).


Cela semble utile de rappeler ces prérogatives dans une réunion de CSE afin qu’elles ne soient pas « oubliées ». Si vous êtes dans un contexte post licenciement économique, les régles vous seront précisées sur simple demande. Ajoutons les prérogatives en cas de prêt de main d‘œuvre : le CSE de l'entreprise utilisatrice est informé et consulté préalablement à l'accueil de salariés mis à sa disposition dans le cadre de prêt de main-d'œuvre (article L 8241-2, al. 14) ; de son côté, le CSE de l'entreprise prêteuse est consulté préalablement à la mise en œuvre d'un prêt de main-d'œuvre et informé des différentes conventions signées.
 

ALERTER : DROIT D’ALERTE SOCIALE
 

Le CSE peut exercer un droit d’alerte sociale témoignant d’un recours quantitativement ou qualitativement anormal aux contrats précaires :
 

  • En cas d’accroissement important du nombre de salariés intérimaires ou en CDD par rapport à la situation existant lors de la dernière réunion du CSE ayant abordé ce sujet. Si la majorité des membres du comité le demande, cette question doit être inscrite à l’ordre du jour de la prochaine réunion ordinaire, l’employeur devant alors fournir toutes les informations nécessaires (article L. 2312-70).
  • Lorsque le CSE a connaissance de faits susceptibles de caractériser un recours abusif à l’intérim ou aux CDD, il peut, en votant une résolution à la majorité de ses membres présents, saisir l’inspection du travail qui mène une enquête et transmet son rapport à l’employeur et au comité, en vue d’un plan de résorption de la précarité si nécessaire (article L. 2312-71). L’inspecteur du travail adresse le rapport de ses constatations à l’employeur, qui le communique au CSE en même temps que sa réponse motivée aux constatations de l’inspecteur du travail (article L. 2312-71 ).Dans sa réponse, l’employeur précise les moyens qu’il met en œuvre dans le cadre d’un plan de résorption de la précarité destiné à limiter le recours à ces formes de contrats de travail.
     

Votre démarche sera soutenue par la priorité nationale sur cette problématique ! Aurélie Moreau

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