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06 / 01 / 2016 | 62 vues
David Mahe / Membre
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Stress au travail : la France, mauvais élève de l'Europe

Les chiffres sont accablants. Le dernier rapport de l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail indique qu’en matière de prévention des risques psychosociaux les entreprises françaises se situent globalement en dessous de la moyenne des 36 pays étudiés et même, pour certains critères, dans le peloton de queue [1].

Près de 50 000 entreprises et établissements ont été sondés en 2014 par cette agence de la Commission européenne, de toutes les tailles et dans tous les secteurs d’activité, lors de la deuxième « enquête européenne des entreprises sur les risques nouveaux et émergents » (ESENER-2).

Les résultats font apparaître de grandes disparités entre les pays européens, les pays d’Europe du nord se situant globalement en tête dans la qualité des stratégies et des actions mises en place sur les lieux de travail pour lutter contre les risques psychosociaux (le stress, la violence et le harcèlement).

Ainsi, concernant l’évaluation de ces risques par du personnel interne, l’enquête révèle que le Danemark arrive en premier (76 % des entreprises) devant le Royaume-Uni (68 %), la Suède (66 %) et la Norvège (56 %). Les pourcentages les plus faibles sont observés en Espagne (11 %), en Croatie (9 %) et en Slovénie (7 %). Avec un taux de 43 % la France se situe certes un peu au-dessus de la moyenne européenne (36 %), mais si l'on prend en compte l’ensemble des démarches d’évaluation (évaluation régulière des risques et évaluations réalisées par du personnel interne), avec un taux de 55 % seulement, notre pays se trouve à la 29ème place sur 36. Dans ce domaine, la moyenne européenne est en effet de 76 % et les pays faisant moins bien que nous sont le Monténégro, Chypre, l’Albanie, la Grèce, la Suisse, l’Islande et le Luxembourg. Pourtant la directive–cadre de l’UE relative à la sécurité et la santé au travail fait de cette évaluation des risques la pierre angulaire d’une approche de sécurité et de santé au travail [2].

Les facteurs de risques psychosociaux sont perçus par l’ensemble des pays comme plus difficiles à gérer que les autres. Ainsi, dans l’UE à 28, seulement 33 % des entreprises occupant plus de 20 travailleurs ont des plans d’action pour prévenir le stress lié au travail. Avec un taux de 29 % la France est donc en dessous de la moyenne des pays membres. Seuls le Royaume-Uni, la Suède, la Norvège, le Danemark, la Roumanie et l’Italie ont des taux approchant ou dépassant les 50 %. Dans la mise en place de procédures pour traiter les brimades ou le harcèlement et les cas de menaces, d’abus ou d’agressions, la France est là aussi en dessous de la moyenne européenne.

La formation des managers, des chefs d’équipe et des responsables opérationnels sur la manière de gérer la sécurité et la santé au travail apparaît également très insatisfaisante pour notre pays dans cette enquête. Si cette formation est en effet dispensée dans 73 % des entreprises européennes, en France le taux est de 46 %, nous mettant avec l’Islande (38 %) et le Luxembourg (43 %) dans les trois plus mauvaises places.

La précédente enquête ESENER, publiée en 2010 à partir de données collectées en 2008 et 2009, soulignait déjà la médiocrité du positionnement européen des entreprises françaises dans le domaine de la prévention des risques psychosociaux au travail. Cette nouvelle enquête nous montre que la France a encore de grands progrès à réaliser au vu des mauvais chiffres qu’elle fournit. Ceci est d’autant plus paradoxal que nous sommes sans doute le pays dans lequel la médiatisation de la souffrance au travail, des suicides et de l'épuisement professionnel est la plus grande et dans lequel le nombre de rapports officiels et de recommandations sur ces thèmes est le plus important.

Auteur > Patrick Légeron, fondateur du cabinet Stimulus.
1. Les 28 pays de l’Union européenne plus l’Albanie, l’Islande, le Monténégro, la Macédoine, la Serbie, la Turquie, la Norvège et la Suisse.
2. Directive européenne 89/391/CEE.

 

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