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01 / 03 / 2019 | 2371 vues
Jean-Louis Lascoux / Membre
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La qualité relationnelle au travail : un processus d'apprentissage à la relation

Lorsque j'ai commencé à parler de qualité relationnelle en 1987-1988, l'idée paraissait insolite. À cette époque, le concept de « qualité » était réservé au produit.
 

Malgré des discussions dans des réunions AFNOR, ma proposition a été considérée comme totalement décalée. Une quinzaine d'années plus tard, j'ai ressorti l'idée. Cette fois, mon audience étant plus large et, internet aidant, elle a rapidement fait son chemin, d'autant que j'ai mis en évidence la nécessité pour un « médiateur professionnel » de ne pas avoir le conflit mais la « qualité relationnelle« » en toile de fond.

 

Si ce n'est pas le cas, le médiateur ne peut qu'être en difficulté pour faire autre chose que de la « gestion de conflits ». Depuis, il y a donc « médiateur » et « médiateur professionnel » et j'ai avancé. Le concept a été critiqué puis soudainement détourné, parfois associé à des pratiques hasardeuses.

 

Récemment, dans le travail que je réalise sur l'ingénierie relationnelle, j'ai clarifié le concept de « qualité relationnelle au travail » (ou « QRT »). Voilà pour l'histoire du concept que je vous propose dans la perspective d'un renforcement technique des savoir-faire en entreprise. Tant mieux si les salariés en retirent des compétences pour leurs relations extra-professionnelles.

 

Qualité relationnelle au travail

La qualité relationnelle au travail est un nouvel outil au service des gens dans la vie professionnelle. En développant les dispositifs et techniques de l'ingénierie relationnelle, j'ai identifié l'apport de ces savoir-faire dans le champ relationnel au travail. Non seulement la QRT apporte au management, un management qui devient contributif à la manière d'être en relation et de diriger le projet d'entreprise, mais elle intéresse concrètement tous les acteurs des ressources humaines, les représentants du personnel, l'ensemble des salariés et les acteurs de l'organisation et de l'environnement professionnel.

La QRT n'est pas dans le flou de la « vie au travail ». Il s'agit précisément et spécifiquement de transmettre les techniques relationnelles. Elle s'inscrit par delà les recherches à connotation tayloriste sur les performances et la productivité. La QRT repose sur le constat que ce qui motive l'implication de quelqu'un dans ce qu'il fait est au cœur de la relation :

 

  • ce qui constitue et définit la relation, son cadre règlementaire, son environnement et le projet relationnel ;
  • la manière de vivre la relation et ce qu'elle apporte, ses modalités, ses interactions, ses aléas et ses changements, en termes d'harmonie, d'équilibre et de satisfaction ;
  • et ceux qui font la relation, ce qu'ils font pour l'entretenir, pour la promouvoir et les gens eux-mêmes dans le projet relationnel : collègues, clients et fournisseurs.

 

Quelles différences avec d'autres approches de la vie en entreprise ?

La QRT se différencie des approches issues de la psycho-sociologie, en ce qu'elle est fondée sur la perfectibilité de chacun dans ses modes relationnels, avec un ensemble de référentiels, issus de la médiation professionnelle, que j'ai élaborée sur plus de trente années. Ces savoir-faire relationnels ne s'acquièrent pas de manière certaine par le hasard des expériences, ni à travers une conception de type coercitive ou normative, mais par leur enseignement spécialisé : ils s'apprennent et s'enseignent. La QRT reste centrée sur l’apport de savoir-faire dans le champ professionnel, dans des rapports d'altérité et, donc, d'échanges contributifs.

Le concept de « vie » est bien trop large pour permettre d'avoir une approche concrète sans idéologie, ni morale, ni normalisation.
Je suis très clair, la QRT est sans immixtion dans « la vie » au travail (QVT) ou ailleurs. Le concept de « vie » est bien trop large pour permettre d'avoir une approche concrète sans idéologie, ni morale, ni normalisation. La « vie » peut avoir des aspects qui n’ont pas lieu de faire partie des thématiques de l'intervention en QRT (sensibilité, affinité, aspiration…) et ne saurait, en raison de son caractère confusionnel, relever d'une approche d'entreprise.

 

  • La QRT est un processus d'apprentissage à la relation et de transfert de compétences relationnelles, utilisées avec performances par les médiateurs rrofessionnels.
  • La QRT n'est pas un moyen de prévention.

Toutefois, il convient d'être toujours très clair. Peut-on dire que l'instruction est une manière de prévenir un ensemble de situations problématiques ? Non, c'est un moyen pour mener sa vie, s'orienter et pour construire. Si jamais l'on disait que l'instruction est un moyen préventif, c'est parce que l'on aurait de la vie une vision négative. Il en va de même avec la QRT.

La QRT n'est pas un moyen de prévention mais une instrumentation culturelle. Ainsi, quand on est confronté à un conflit, c'est autre chose. On peut avoir suivi toutes les formations dans un domaine, une situation nouvelle nous confronte à l'ignorance. C'est la même chose dans les relations. Donc, quand on arrive au stade de la médiation, ce n'est jamais trop tard. Si l'on considère que c'est trop tard, c'est parce que l'on envisage la médiation comme une tentative. C'est trop tard parce que l'on est dans l'idée de l'essai avec l'échec en perspective. Parce que cette forme de médiation n'a pas d'autre visée que celle d'obtenir une résignation, à défaut de pouvoir envisager le renouveau d'une motivation qui se traduirait par implication qualitative. C'est pour cela qu'il y a médiation et médiation professionnelle. La médiation professionnelle n'est pas un instrument d'autorité mais d'une recherche de la libre décision, de l'entente et de la définition d'un projet contributif.

 

Quelles en sont les perspectives ?

La QRT est indissociable des nouveaux fondamentaux du dialogue social définis en ingénierie relationnelle :

  • qualité relationnelle,
  • négociation contributive et gouvernance : négociation,
  • responsabilité sociétale : éthique et environnement.

 

Mise en place de la QRT

Un travail d'identification des différentes dynamiques relationnelles est réalisé au sein de l'organisation, puis un transfert pédagogique est effectué concernant les techniques d'ingénierie relationnelle utiles aux gens.

Des dispositifs de référents qualité relationnelle au travail, formés à la pratique de la médiation professionnelle peuvent être mis en place, en premier lieu le dispositif de médiation professionnelle interne (« DMPI »).
 
Des modules présentiels et distanciels sont élaborés pour permettre une large diffusion de cette instrumentation d'ingénierie relationnelle.

L'intérêt fondamental de ces actions est de développer un nouveau paradigme, celui de l'entente sociale appliquée au sein des organisations.

 

Intérêts pour le management

Par son axe de développement, la QRT renforce l'appropriation d'un management contributif, relativement à la conduite des projets de l'entreprise en phase avec les projets professionnels des salariés.

La QRT sert d’instrumentation liée à l'évolution culturelle. Parallèlement au renforcement du dialogue social, elle accompagne les démarches éthiques de l’entreprise.

 

Qui intervient ?

La conception de la QRT est réalisée dans le cadre du Centre de recherche en entente interpersonnelle et sociale et en ingénierie relationnelle (CREISIR).

La mise en place de la QRT est assurée par l'École professionnelle de la médiation et de la négociation, avec pour intervenants exclusifs des médiateurs professionnels ayant acquis des compétences en pédagogie.

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