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23 / 10 / 2025 | 24 vues
Carl Guinet / Membre
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Le mécanisme des rachats d’actions : quels leviers pour le CSE ?

Les rachats d'actions peuvent détourner des fonds de l’investissement, des salaires ou de l’innovation. C’est donc un sujet clé pour les élus du CSE, qui doivent en mesurer les conséquences économiques et sociales.

 

Le rachat d’actions, ou buyback, est une opération par laquelle une entreprise rachète ses propres actions sur le marché afin de les annuler. Concrètement, cela signifie que l’entreprise utilise une partie de sa trésorerie (ou parfois s’endette) pour acheter ses actions, qui sont ensuite généralement annulées pour la plupart ou à la marge distribuées aux dirigeants.

 

Cette opération réduit le nombre total d’actions en circulation, ce qui a pour effet mécanique d’augmenter le bénéfice par action (BPA) et les dividendes par action.

 

Les raisons avancées pour procéder à un rachat d’actions sont multiples :
 

  • Augmenter la valeur des actions : Moins d’actions en circulation = chaque action vaut plus. Cependant, comme mentionné dans la lettre Vernimmen de juillet 2024, cette idée reçue ne se vérifie pas dans les faits.
  • Récompenser les actionnaires : C’est une façon de leur redistribuer une partie des profits, au même titre que les dividendes. Sur la trésorerie totale générée combien est donné aux actionnaires ? Combien aux salariés qui créent de la valeur ?
  • Signaler une sous-évaluation : Les dirigeants peuvent vouloir montrer leur confiance dans la valeur de l’entreprise en rachetant ses actions

 

Pourquoi le rachat d’actions est-il considéré comme une destruction de valeur pour l’entreprise et ses salariés ?
 

Lorsque l’entreprise consacre ses excédents de trésorerie au rachat d’actions, elle fait le choix de ne pas réinvestir dans son développement : innovation, embauche, augmentation des salaires, formation, modernisation des outils de production, etc.


Ce choix de gestion a plusieurs conséquences :
 

  • Moins d’investissements productifs : Les fonds utilisés pour le rachat ne servent pas à financer de nouveaux projets ou à améliorer la compétitivité de l’entreprise. Cela peut limiter la croissance future, la création d’emplois et la capacité à augmenter les salaires
  • Hausse potentielle de l’endettement : Si l’entreprise s’endette pour financer le rachat, elle augmente ses charges financières et fragilise potentiellement sa situation à long terme

 

Par conséquent, le rachat d’actions peut être vu comme une destruction de valeur pour l’entreprise, car il privilégie le court terme et la rémunération immédiate des actionnaires, au détriment de l’investissement et de la pérennité de l’entreprise.

 

Et les salariés dans tout ça ?
 

  • Transfert de richesse vers les actionnaires : Le rachat d’actions bénéficie principalement aux actionnaires existants, qui voient la valeur de leurs actions augmenter.
  • Aucune retombée directe pour les salariés : sauf cas particulier (participation au capital), les salariés ne profitent pas de cette opération, qui ne se traduit ni par des hausses de salaires, ni par des investissements dans leurs conditions de travail.

 

Cette logique aboutit à des « profits sans prospérité » : l’entreprise enrichit ses actionnaires, mais ne contribue pas à la croissance réelle, à l’innovation ou à l’amélioration des conditions de travail.

 

Les paiements des dividendes et des rachats d’actions nécessitent beaucoup de trésorerie. Nous voyons des entreprises et des groupes qui mettent en place des programmes d’économies voire des PSE dans ce but !

 

5 questions à se poser face à un rachat d’actions
 

  1. L’entreprise a-t-elle des besoins d’investissement (R&D, modernisation, embauches) ? Si oui pourquoi faire des rachats d’actions ?
  2. Le rachat d’actions est-il financé par la trésorerie ou par de la dette ? En cas de financement par la dette, les élus doivent s’alerter
  3. Qui sont les principaux bénéficiaires de cette opération (grands actionnaires, dirigeants) ?
  4. L’entreprise rencontre-t-elle des difficultés à se développer ou à innover ?
  5. Ce rachat d’actions s’accompagne-t-il d’une politique de rémunération équitable pour les salariés ?

 

3 actions que peut mettre en œuvre le CSE face à un rachat d’actions

 

1. Utiliser le droit d’alerte économique
Le CSE peut déclencher un droit d’alerte économique s’il estime que le rachat d’actions met en danger l’équilibre financier de l’entreprise ou menace l’emploi et les conditions de travail. Ce droit permet d’exiger des explications de la direction, d’obtenir des documents complémentaires et, en cas de désaccord persistant, de saisir le conseil d’administration.

 

2. Mandater un expert-comptable indépendant
Le CSE a la possibilité de faire appel à un expert-comptable pour analyser en profondeur les conséquences du rachat d’actions sur la situation économique et financière de l’entreprise. Cet expert peut aider à objectiver les risques, à formuler des propositions alternatives et à préparer des arguments solides pour la négociation ou le dialogue social.

 

3. Formuler des propositions alternatives
Lors de la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise, le CSE peut présenter des propositions alternatives à l’utilisation de la trésorerie pour des rachats d’actions.

Il peut ainsi défendre des investissements dans l’emploi, la formation, l’innovation ou l’amélioration des conditions de travail, et demander que la direction justifie ses choix stratégiques devant les représentants du personnel.

 

Ces leviers permettent au CSE d’agir concrètement pour défendre les intérêts des salariés et peser dans la gouvernance de l’entreprise lors de décisions majeures comme les rachats d’actions.

 

Nous sommes le cabinet Soxia, cabinet d'expertise comptable dédié exclusivement aux élus de CSE et délégués syndicaux. 

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