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04 / 09 / 2019 | 70 vues
Ofi Asset Management / Membre
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Finance : l’été a été riche en événements peu engageants

Guerre commerciale, guerre des monnaies, Hong Kong, inversion de la courbe des taux américains, nouveaux records de faiblesse sur les taux obligataires souverains, Argentine… L’été a été riche en événements peu engageants, ce qui a créé une certaine nervosité sur les marchés.
 

Les investisseurs semblent actuellement un peu déboussolés par des niveaux de taux d’intérêt inédits, qui reflètent une grande aversion au risque et qui sont également la résultante de politiques particulièrement accommodantes et inédites des Banques Centrales.
 

Au fur et à mesure, de plus en plus d’interrogations surviennent sur le bien-fondé de ces politiques monétaires, dont la résultante est d’avoir des taux d’intérêt proches de 0, alors que le cycle de croissance est mature, surtout aux États-Unis. Par ailleurs, cela a contribué naturellement à gonfler le prix des actifs (financiers et immobiliers surtout), créant potentiellement des bulles ainsi qu’une aggravation des inégalités sociales au sein de nos sociétés, avec les troubles et risques de déstabilisation qui en découlent. À ce constat critique s’ajoute le fait que la croissance potentielle semble s’affaiblir dans presque tous les grands pays alors que les niveaux de dettes sont bien plus élevés en absolu et en relatif des PIB qu’avant la crise de 2008. Nous atteignons ainsi près de 90% du PIB en zone Euro et près de 100% aux États-Unis. Les repères sont ainsi faussés et il est difficile dans ces conditions d’investir dans « une optique d’attente » sur les obligations, bien que les performances obligataires soient encore très positives cette année, avec une progression de l’ordre de 8% sur les indices « global aggregate » qui mêlent obligations d’entreprises et gouvernementales.
 

Comment sortir de cette spirale et quelles nouvelles mesures pourraient donc prendre les Banques Centrales en cas de retournement de la conjoncture ?
 

Ces derniers mois ont été riches en propositions, émanant des politiques comme de nombreux économistes. Les dernières idées tournent autour de nouveaux plans de relance pour soutenir la croissance. Cette thématique est même évoquée en Allemagne où le pays est confronté à un ralentissement sérieux, son économie étant très sensible aux échanges internationaux. De plus, avec de tels niveaux de taux, les dettes peuvent être « rollées » (dette remboursée et aussitôt renouvelée) éternellement… et tant pis pour les déficits qui sont de ce fait plus facile à financer !
 

Par ailleurs, un groupe de 5 experts de Blackrock (économistes et anciens banquiers centraux) a publié cet été une réflexion sur des pistes innovantes en matière de politique monétaire, de façon à être préparé en cas de rechute économique. Ils suggèrent de remettre une idée qui avait été imaginée en son temps par Milton Friedman, à savoir une sorte « d’helicopter money » : très schématiquement, ils suggèrent de confier aux Banques Centrales la gestion d’un « compte spécial » de dépenses qui serait activé tant qu’un certain niveau d’inflation cible ne serait pas atteint. Pour la zone Euro, concrètement et pour rester en conformité avec les statuts juridiques, cela consisterait à offrir des prêts à taux 0 perpétuels aux citoyens. Cette issue interpelle, mais elle semble possible et les dettes publiques risquent de ce fait de ne jamais être remboursées. À suivre.

 

Pas étonnant de voir l’or monter dans ces conditions. Nous l’avions recommandé lors de notre publication de mai. L’once d’or a été l’un des « tubes de l’été » avec une progression de près de 22% depuis les plus bas de mai. Nous comprenons aisément que la recherche d’actifs tangibles continue dans ce contexte monétaire. Nous pensons qu’il peut y avoir une correction ponctuelle à court terme autour de 1 450 dollars l’once, ce qui donnera des points d’entrée car les objectifs suivants, qui nous semblent atteignables, devraient se situer autour de la zone des 1 650.
 

Beaucoup de littérature économique a également été déployée cet été au sujet de l’inversion de la courbe des taux américains : les rendements à 10 ans sont passés sous ceux à 2 ans à plusieurs reprises. Cela s’explique logiquement par le fait que les investisseurs de long terme anticipent une baisse des taux monétaires qui se répercutera sur la partie courte de la courbe des taux, ce qui lui redonnera une forme « normale ».
 

Le fait est que, historiquement depuis 50 ans, une inversion – dans la majorité des cas - est suivie par une récession avec un délai compris entre 6 et 18 mois. Le dernier exemple frappant qui est dans toutes les têtes est l’inversion survenue en 2006 et 2007, qui a précédé la catastrophe de 2008. Beaucoup d’économistes programment donc la fin du très long cycle actuel de l’économie américaine autour de la fin de l’année 2020. Pour Donald Trump, qui a l’échéance des élections présidentielles en novembre 2020, cela risque d’être juste, car nous savons que la santé de l’économie est un prérequis dans les chances d’être réélu, pour un Président aux États-Unis. Il risque donc de faire tout ce qui est en son pouvoir pour prolonger le cycle. De nouvelles baisses d’impôts sont évoquées, de même que la réactivation de plans de relance d’investissement.
 

Concrètement, les risques de ralentissement de l’économie mondiale se multiplient et nous flirtons avec le seuil très critique de 3% : au niveau mondial, nous considérons qu’il marque en effet la différence entre l’expansion et la récession.


L’économie était déjà en ralentissement et les grands organismes internationaux (FMI, OCDE…) avaient déjà révisé leurs estimations à la baisse. Nous en étions à des attentes autour de 3,2% / 3,3%.
 

Mais le climat de guerre commerciale entre la Chine et les États- Unis, qui s’est intensifié cet été, a sérieusement contribué à faire baisser la confiance des chefs d’entreprises et des marchés. D’ailleurs, la baisse du commerce mondial s’est accélérée récemment.
 

Sur le fond, rien de bien nouveau par rapport à nos analyses précédentes. Il y a une certaine légitimité à demander une plus grande ouverture à la Chine car le pays a bénéficié de la mondialisation ces deux dernières décennies. Il y a de vrais enjeux de long terme entre les deux pays pour des questions de suprématie sur des sujets de normes technologiques, monétaires, de propriété intellectuelle, d’influence…
 

À court terme, les deux Présidents souhaitent probablement montrer une certaine fermeté pour des questions d’image intérieure, mais personne n’a intérêt à ce que les choses ne s’enveniment vraiment : Donald Trump pour l’élection présidentielle, Xi Jinping alors que les festivités du 70e anniversaire de la Chine populaire se profilent, que son image est écornée avec Hong Kong et que l’économie ralentit. Mais force est de constater que ce raisonnement rationnel a des limites : la communication « dérape » souvent, avec des annonces intempestives sur les droits de douane qui engendrent une sorte d’escalade dans les rapports.
 

Ceci a déclenché cet été une « mini guerre » des changes : le RMB a perdu soudainement en août près de 2% contre le dollar, passant au-dessus de la borne de 7 RMB pour 1 USD. Quasi simultanément, la majorité des devises émergentes ont reperdu du terrain contre le dollar. Ceci illustre bien que les investisseurs deviennent averses au risque sur ces sujets.


Les dernières statistiques chiffrées donnent une croissance estimée de 2,3% cette année aux États-Unis, de 1,1% en zone Euro et de 6,2% en Chine, avec des indicateurs avancés orientés à la baisse dans l’ensemble, ce qui laisse entrevoir de nouvelles révisions à la baisse.

 

 


 

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