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16 / 07 / 2019 | 186 vues
Karim Lakjaâ / Membre
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Rejet par le CSFPT de la prime d’intéressement aux performances collectives des services dans les collectivités territoriales

Dans la fonction publique territoriale, deux projets de décret modifiant le dispositif de prime d’intéressement aux performances collectives des services dans les collectivités territoriales et leurs établissements publics (PIPCS) ont été présentés au conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) du 10 juillet.
 

Le premier modifiait le décret n° 2012-624 du 3 mai 2012, assouplissant les conditions de mise en œuvre par l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement public de la prime d’intéressement aux performances collectives des services. 
 

En lien avec le précédent, le second relevait de 300 à 600 euros le plafond annuel de la prime d’intéressement aux performances collectives des services pouvant être allouée aux agents des collectivités territoriales et de leurs établissements publics. 
 

Ces deux textes ont reçu un avis défavorable de la part des membres du CSFPT.
 

Cet avis a fait l’objet du vote suivant :

  • collège employeur : avis favorables à l’unanimité ;
  • collège des organisations syndicales : 18 défavorables (CGT, FO, CFDT, FA FPT et SUD, 2 abstentions (UNSA).
     

La délégation CGT a été la plus véhémente à l’égard de la PIPCS, rappelant notamment que lors de la FS3 ayant examiné ce projet de décret, la DGCL (malgré sa bonne volonté) n’a pu présenter d’évaluation sur le nombre d’employeurs territoriaux mettant en œuvre la prime d’intéressement aux performances collectives des services. 
 

De même, elle n’a pu présenter d’estimation du nombre d’agents et cadres territoriaux actuellement couverts par cette prime.
 

Pour la CGT, en résumé, il n’existe aucune évaluation de cette prime de performances. Or, de manière cartésienne et de méthode judicieuse, il conviendrait pourtant de présenter ces éléments au CSFPT avant que celui-ci ne s’exprime et ne modifie le dispositif. En l’absence d’évaluation statistique par la DGCL, la CGT disposant d’éléments d’analyse qualitative a donc poursuivi comme suit.
 

La prime d’intéressement aux performances collectives des services constitue un outil pour astreindre le fonctionnaire à la dégradation du service public. Cet outil n’est pas nouveau. Il a été mis en place en 2012 sous Nicolas Sarkozy mais n’a jamais été généralisé par les employeurs territoriaux.
 

La politique de l’actuel gouvernement, matérialisée par le projet de loi dit « de transformation » pourrait lui donner une seconde vie. 
 

Avec le RIFSEEP, l’intéressement collectif constitue, en effet, le deuxième outil pour assujettir les agents à l’asphyxie financière des services publics. Il s’agit de demander de faire plus avec moins de moyens de fonctionnement (suppression de postes, précarisation des emplois, réduction des budgets, intensifications des taches…) conduisant à l’épuisement et à la souffrance au travail.
 

L’autorité territoriale dira qu’elle n’est pas responsable des dépressions voire des suicides puisque que ce sont les agents qui l’ont décidé pour eux-mêmes, en adhérant aux objectifs de leur service et en les poursuivants. Les droits collectifs seront perçus comme des résistances à la production du travail prescrit par la hiérarchie. La suppression des CHSCT se comprend ainsi.
 

Il s’agit donc de faire accepter la dégradation de la qualité des services publics en échange d’une prime collective et en faisant des agents et cadres les acteurs de cette détérioration, de cette dévastation et de cette destruction.
 

La CGT estime également que, compte tenu de la baisse des rémunérations voulues par les gouvernements successifs, il faut craindre que les agents ne considèrent cette prime comme un succédané.
 

Or, il n’en est rien. La perversité de ce outil repose avant tout sur la pression que les collègues exerceront sur eux-mêmes pour obtenir la dite prime d’intéressement. Ceux qui s’extrairont de cette démarche par éthique professionnelle seront marginalisés. Quid par la suite de l’évolution de leur rémunération et de leur carrière, avec des CAP vidées de toute prérogative en la matière ?
 

Pur produit de l’idéologie managériale, cette prime doit être également considérée comme un outil de contrôle de l’assiduité en organisant une forme de rémunération du « présentéisme », en stigmatisant les congés ordinaires, les congés maladies et les temps qualifiés de non productifs (pauses, temps de repas).
 

Enfin, la CGT a noté que l’un des projets de décret comportait une nouvelle provocation gouvernementale, comme l’ont qualifié plusieurs membres de la FS3 lors de la séance ci-dessus évoquée. Cette provocation tient en une limitation supplémentaire des prérogatives du comité technique prévue par une disposition du projet de décret. La provocation permanente est la méthode adoptée par le gouvernement. En témoignent les propos d’Olivier Dussopt dans l’hebdomadaire Le Point, qualifiant les organisations syndicales de déconnectées du terrain. 
 

Considérant ces éléments, la CGT a voté contre les deux projets de texte.
 

En conclusion, la CGT a déclaré que ses revendications construites sur le terrain avec les agents sont claires :
 

  • abrogation des décrets sur l’intéressement collectif et du RIFSEEP,
  • intégration des primes dans le traitement indiciaire,
  • revalorisation du point d’indice,
  • organisations collectives du travail respectueuses des droits humains,
  • gestion du personnel respectueuse du droit à la participation, du droit syndical, du droit aux congés et du droit à la formation des agents,
  • mise en place d'une évaluation collective du travail intégrant l’éthique professionnelle, les effets sur la santé et l’environnement,
  • évaluation des objectifs des politiques publiques selon des critères définis collectivement et démocratiquement.
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