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07 / 03 / 2011 | 5 vues
Virginie Rault / Membre
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Écarts d'activité et de rémunération entre hommes et femmes

De nombreux travaux étudient le différentiel d’activité et de rémunération entre hommes et femmes. Cette problématique est analysée ici à partir des données disponibles au régime général. La génération de 1944 a été retenue pour l’analyse, car c’est la première qui a quasiment liquidé en totalité sa pension de droit propre et pour laquelle une information complète de la carrière est disponible, année par année.

Un écart important de participation au marché du travail entre les deux genres

Les taux de participation présentés ici ont été calculés à partir des données de la CNAV en retenant une définition proche du taux d’activité du BIT. Seule diffère de cette définition l'absence de prise en compte du service militaire. Pour la génération de 1944, le taux de participation des femmes au marché du travail est toujours inférieur à celui des hommes, sauf à l’âge de 20 ans, pendant la période de service militaire.

Si les périodes sous les drapeaux étaient incorporées en tant qu'activité, les hommes auraient à tout âge une participation supérieure. L’écart est maximum autour de 30 ans, avec 38 points de pourcentage. Notons qu’une partie de l’écart de participation au marché du travail peut s’expliquer par la naissance des enfants.

Chez les hommes, le taux de participation au marché du travail selon l’âge présente une forme « en cloche » : il augmente jusqu’à environ 25 ans, puis suit un plateau légèrement décroissant et enfin décline fortement après 55 ans. Le taux d’activité masculine culmine à 97 %.

Le profil de participation des hommes de la génération de 1944 connaît par ailleurs un creux significatif vers 20 ans, lié à une durée de service militaire qui correspondait à plus d’une année civile d’absence du marché du travail.


Pour les femmes, le taux d’activité selon l’âge forme un « M » : il est donc significativement différent de celui des hommes de la même génération au même âge.

Le pic d’activité féminine est atteint vers 20 ou 21 ans, avec 78 % de taux de participation pour la génération 1944 ; cette participation décline ensuite jusqu’à 30 ans, puis progresse à nouveau jusqu’à 45 ans environ, mais sans retrouver le niveau atteint à 20 ans. Enfin, on observe le même déclin du taux d’activité que pour les hommes sur la fin de carrière.

À titre de comparaison, Minni et Moschion (2010) publient des taux d’activité des femmes par génération et par âge issus des enquêtes Emplois 1975-2002.

À partir de cette source, le taux d’activité des femmes nées en 1945 est de 60,4 % à 31 ans, soit un taux très proche de celui obtenu à partir des données CNAV au même âge pour la génération précédente : 60,1 %.

Des carrières féminines hétérogènes du fait des interruptions de carrière


Au sein de la génération 1944, 31 % des femmes monopensionnées ont une carrière continue, contre 79 % pour les hommes. La proportion d’assurés qui a eu au moins une année civile sans activité au régime général entre le début de carrière et 45 ans est nettement plus élevée chez les femmes que chez les hommes : au sein des carrières monopensionnées de la génération de 1944, ce sont 69 % des femmes qui ont connu une interruption de plus d’une année civile, contre 21 % des hommes.

Outre la différence de taux de participation au marché du travail et celle de la fréquence des interruptions d’activité, les carrières des femmes et des hommes se distinguent également par leurs rémunérations.

Pour illustrer cet aspect de façon pertinente, il est préférable d’étudier des carrières féminines plus homogènes en regard des carrières des hommes, qui sont le plus souvent des carrières continues.

Le salaire des hommes atteint plus fréquemment le plafond de la Sécurité sociale


Le salaire des femmes ayant des carrières sans interruption, atteint moins souvent le plafond de la Sécurité sociale que celui des hommes, quel que soit leur âge.

La part d’assurés nés en 1944 et dont le salaire annuel est au moins égal au plafond de la Sécurité sociale forme une courbe en cloche selon l’âge. Le point culminant se situe autour de 36 ou 37 ans : 57 % des hommes et 37 % des femmes qui n’ont pas interrompu leur carrière au régime général présentent au moins un salaire annuel égal ou supérieur au plafond de la Sécurité sociale. Il y a une diminution significative de la part des salaires
qui atteignent le plafond de la Sécurité sociale entre 45 et 55 ans pour les deux genres. Cette baisse s’explique par des sorties du marché du travail après 45 ans, une augmentation du nombre d’assurés sans salaire une année donnée et un nombre significatif de salaires en baisse d’une année à l’autre, tandis que le plafond de la Sécurité sociale croît en euros constants.

Profils de salaires pour les carrières continues au régime général

Le salaire médian exprimé en euros constants en 2009 croît avec l’âge pour les femmes et les hommes. Les hommes ont un salaire toujours supérieur à celui des femmes de la même génération au même âge. En moyenne, sur l’ensemble de la carrière (entre 20 et 55 ans), le salaire médian des femmes représente 79 % du salaire plafond de la Sécurité sociale pour les femmes nées en 1944, et 92 % pour les hommes.

Pour la génération de 1944, le salaire médian des hommes à 25 ans est supérieur de 21 % à celui des femmes.

À 40 ans, la différence entre le salaire médian des hommes et des femmes reste encore au même niveau (19 %).

L’évolution du salaire médian des hommes correspond à celle du plafond de la Sécurité sociale entre 30 et 47 ans, ce qui est cohérent avec le fait que plus de la moitié des hommes atteint ce même plafond pour cette tranche d’âge.

Pour les femmes, l’évolution du salaire médian peut être décomposée en une part liée à l’évolution du plafond de la Sécurité sociale et une part liée à l’évolution du niveau individuel des salaires.

Or, cette évolution de la composante individuelle du salaire médian des femmes est corrélée positivement à l’évolution de la part des salaires au moins équivalents au plafond.

Des écarts de salaires de 20 % entre hommes et femmes

En construisant trois tranches d’âges reflétant les périodes du cycle d’activité, le resserrement de l’écart salarial entre genres au milieu de la carrière apparaît et l’on peut mesurer un écart salarial moyen entre genres sur l’ensemble de la carrière. Cet écart de salaire médian entre les hommes et les femmes ayant des carrières continues au régime général est évalué à 20 % pour la génération de 1944. Notons cependant que les écarts médians entre hommes et femmes sont fluctuants au cours de la carrière pour cette génération, notamment entre 25 et 30 ans.

Ces résultats se situent dans la fourchette de l’écart salarial mesuré par différentes études : entre 11 % et 27 %.

Nos résultats ont la particularité d’être mesurés sur une population nombreuse et relativement homogène.

Conclusion

Les données de la CNAV constituent un outil précieux pour le suivi de l’évolution des inégalités entre hommes et femmes. Elles ont les qualités des données administratives : il n’y a pas d’effet de sous-déclaration ni d’oubli de la part de déclarants potentiels. Ainsi, la totalité de la carrière salariale est connue après la reconstitution de carrière, même si elles ont aussi des imperfections, comme celle de ne bénéficier que de salaires plafonnés avant 1999.

L’évolution de l’écart salarial entre genres selon les générations peut ainsi être étudiée avec une grande finesse pour les carrières continues au régime général.

Quelques résultats provisoires sont déjà disponibles pour la génération 1950 dans la mesure où 58 % des assurés de cette génération ont effectué leur reconstitution de carrière. Le taux d’activité féminine progresse : à 30 ans, le taux de participation des femmes au marché du travail est de 65 % pour la génération 1950, contre 60 % pour celle de 1944.

Cependant, le profil du taux de participation des femmes conserve la forme d’un
« M », qui continue à le différencier du comportement de participation des hommes. La proportion de carrières continues chez les femmes semble stable entre les deux générations (un peu moins d’un tiers), ce qui devra être confirmé lorsque toutes les carrières auront été reconstituées.

Enfin, l’écart de salaires plafonnés entre genres pour les carrières continues est maintenu (19 % pour la génération 1950 contre 20 % pour celle de 1944), tout en étant moins fluctuant au cours de la carrière.

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