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02 / 05 / 2016 | 5 vues
Social Nec Mergitur / Membre
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Les projets d’extension d’ouverture des bibliothèques ne passent pas chez les professionnels

Il n'y a pas eu de concertation mais, dans ce cas précis, les rayonnages se sont rencontrés, car c'est de concert que le personnel des bibliothèques universitaires et des établissements municipaux de la capitale conteste les lubies des pouvoirs publics de vouloir ouvrir plus tard le soir ou le dimanche « sans moyens ». Il faut dire que les élites politiques, toujours plus démagogiques dans ce cas, n’ont plus qu’un credo : ouvrir davantage les bibliothèques, peu important les objectifs et les conditions de ces extensions d’horaire. Une perspective largement contestée par les professionnels.

Du côté des bibliothèques universitaires, les agents interpellent vivement Najat Vallaut-Belkacem (ministre de l’Éducation) après son annonce d’ouvrir les établissements le week-end et en soirée (lire ici). « Ouvrir davantage les bibliothèques universitaires avec des moyens, des professionnels et de réelles compensations pour le personnel : pourquoi pas ? Mais avec un personnel non qualifié, des services dégradés et des espaces restreints, c’est non ! », ont ainsi déclaré plusieurs centaines de bibliothécaires dans une pétition mise ligne (lire ici).

Un camouflet pour la ministre car les agents ne sont pourtant pas forcément opposés à des extensions d’horaires. « Nous aurions même pu y être favorables, avec les moyens correspondants, dans les établissements ou les sections où, dans un constat partagé avec les représentants du personnel, il aurait été évident que cela répondait à un besoin social. Mais nous refusons toute extension des horaires d’ouverture dans le cadre que vous nous proposez, avec des moniteurs étudiants, non qualifiés, jetables et corvéables à merci, des services dégradés et/ou des espaces restreints. Ce n’est pas notre conception des missions de service public des bibliothèques universitaires ». Dur pour l'ancienne porte-parole de Ségolène Royal.

Et le personnel de renvoyer Najat Vallaud-Belkacem dans ses cordes : « Madame la Ministre, si vous voulez réellement améliorer les services offerts par les BU, augmentez d’abord les financements pour porter l’offre documentaire au niveau des standards internationaux ; et si vous considérez que, pour répondre à leurs missions, les bibliothèques universitaires doivent ouvrir davantage, créez les postes de titulaires nécessaires, abondez les budgets en conséquence et proposez au personnel des compensations attractives ». Comme ce n'est pas le cas, on peut donc dire que les signataires sont on ne peut plus cruels envers leur ministre de tutelle, laquelle affirme pourtant urbi et orbi appartenir au camp progressiste.

Une critique qui ne s’applique pas qu’au gouvernement puisque c’est également ce que disent les agents des bibliothèques municipales parisiennes après les annonces faites dans la presse par Bruno Julliard (adjoint en charge de la culture à Paris) d’ouvrir sept nouvelles bibliothèques le dimanche (lire ici). Mais, là aussi, ces extensions se feront sans moyens supplémentaires en tout cas, semble-t-il, sans recrutements de personnel titulaire d'après les syndicats.

Une véritable provocation selon les bibliothécaires parisiens qui rappellent que la situation est actuellement « catastrophique ». « Les restrictions budgétaires en vigueur depuis plusieurs années ont eu pour conséquence la diminution importante de personnel dans les bibliothèques municipales de la capitale. De fait, les établissements exsangues sont contraints de réduire leurs horaires d’ouverture en semaine quand ils ne sont pas carrément fermés brutalement », ont-ils ainsi affirmé dans un texte publié sur le site change.org. On est effectivement loin d’avoir les conditions pour ouvrir plus. 

Il faut dire que, pour le moment, l'adjoint à la culture table sur des ouvertures avec seulement une majorité d’étudiants à temps très partiel. Un étrange retournement de l'histoire quand on sait que Bruno Julliard lui-même ne doit son parcours politique qu'au fait d'avoir manifesté contre le contrat de première embauche (CPE) en 2005. Certains esprits taquins ont même décidé de lancer sur Twitter le mot-clef #ledimanchecestCPE « pour lui rappeler ses idéaux de jeunesse » (lire ici). Du pur mergitur.

En tout cas, les agents préviennent déjà le premier adjoint d'Anne Hidalgo : « Il n'est pas envisageable que les ouvertures du dimanche s'effectuent au détriment de la qualité du service public rendu aux Parisiens, ni dans les bibliothèques concernées, ni dans les autres bibliothèques du réseau. Dans les conditions que l’on nous impose, les bibliothécaires parisiens, soutenus par toutes les organisations syndicales de la Direction des affaires culturelles, refusent toute nouvelle ouverture le dimanche » (lire ici).

Un défi de taille pour l’ancien syndicaliste étudiant qui va probablement devoir négocier s’il veut sortir de cette impasse. En cas d’échec, il pourrait bien se coltiner un conflit social (et pas un petit !), selon les spécialistes qui connaissent bien l’histoire sociale des bibliothèques de la capitale. En effet, en 2010 un mouvement similaire avait duré pas moins de douze semaines au bout desquelles la mairie de Paris avait finalement été contrainte de proposer un protocole d’accord pour sortir de cette crise (lire ici).

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