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23 / 05 / 2025 | 10 vues
Sandra Déraillot / Membre
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Agences des Nations Unies : des pertes douloureuses de financement

Les agences internationales (OIT, HCR, OMS, Onusida…), étranglées financièrement par le retrait de contributions américaines décidé par l’administration Trump, engagent des restructurations brutales.

 

Près de 10 % des postes supprimés à l’Organisation internationale du travail (OIT), entre 25 et 30 % d’effectifs en moins au Programme alimentaire mondial (PAM), et des milliers d’emplois en voie d’être effacés au sein de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), de l’Onusida et de l’Organisation internationale des migrations (OIM). C’est complètement inadmissible, réagit Branislav Rugani, secrétaire confédéral FO au secteur international. Cela signifie qu’un changement d’équipe dirigeante dans un pays peut remettre en cause la continuité de l’action d’une organisation internationale. Les autres États doivent absolument mettre la pression sur les États-Unis pour empêcher cela.

 

Car c’est l’annonce brutale du retrait des financements internationaux américains par l’administration Trump qui a enclenché ce mouvement. A l’OIT, notre budget est constitué de la contribution obligatoire des États, élaborée sur la base du PIB et révisée tous les deux ans, à laquelle s’ajoutent des contributions volontaires dédiées à des missions précises, explique Séverine Deboos, secrétaire générale du syndicat des personnels de l’OIT. Ce sont ces contributions volontaires que les États-Unis ont décidé d’annuler. Cela représente un impact sur 8 % de notre staff mondial. Et les activités définancées concernent la lutte contre le travail des enfants, la promotion de la liberté d’association et la lutte contre le travail forcé...

 

Ailleurs, comme au Haut-commissariat aux réfugiés (qui compte entre 18 000 et 19 000 salariés), les contributions sont exclusivement volontaires. Or le financement américain représentait plus d’un tiers de notre budget, observe Nathalie Meynet, responsable de l’association du personnel du Haut-commissariat aux réfugiés. Et comme il n’était pas fléché, on pouvait l’orienter vers les projets les moins bien financés. Côté santé, les financements américains représentent 20 % du budget de l’OMS.

 

Les annonces ont choqué la communauté des salariés des organisations internationales. Nous avons l’habitude de travailler sur des contrats courts d’un ou deux ans, mais en général on sait quand cela va se terminer, ou si le poste a vocation à être reconduit, rapporte Séverine Deboos. On a le temps de s’organiser pour rebondir. Mais là c’est totalement inattendu, on n’a jamais connu cela dans l’histoire du BIT.

 

La surprise a été telle que quelques centaines d’employés d’organisations internationales ont manifesté le 1er mai à Genève, où siègent la plupart des organisations internationales. Une grande première. Il s’agissait de rappeler ce qu’est notre travail en tant que personnel humanitaire et de montrer qu’on ne pourra plus le faire, poursuit Nathalie Meynet qui est également présidente du CCISUA (Coordination des syndicats et associations des personnels internationaux). Car si le personnel est affecté par ces coupes budgétaires, il y aura aussi moins d’argent pour les programmes à destination de populations vulnérables, souligne-t-elle.

 

Le gros des licenciements reste à venir

 

Des employés de différentes organisations ont déjà reçu leur lettre de licenciement. Au HCR, les personnels installés en Amérique latine ont été les premiers touchés. Mais le plus gros des licenciements surviendra d’ici à la fin du mois de mai, quand les budgets seront finalisés, observe Nathalie Meynet. L’OIT quant à elle a déjà congédié 250 de ses employés. Le préavis est seulement d’un mois. Un mois pour rédiger les rapports finaux, annoncer aux partenaires la fin de la mission et se préparer à partir, c’est très court, poursuit Séverine Deboos. Du côté du HCR, il n’apparait tout simplement pas possible de clore des activités dans un délai aussi bref : Il faut le temps de transférer nos activités à des organisations locales, de donner un préavis pour le bail des locaux, etc., détaille Nathalie Meynet.

 

Comme dans toutes les organisations internationales, les employés ne relèvent pas du droit du travail du pays dans lequel ils exercent. Chaque organisation dispose de son propre statut du salarié, et si ceux-ci bénéficient bien d’une couverture retraite et santé, ils ne cotisent pas systématiquement à un régime d’assurance chômage. Les personnels sont donc en position délicate.

 

Avec le contexte international, le financement du réarmement et les politiques d’économies budgétaires un peu partout dans le monde, Séverine Deboos s’inquiète quant à la possibilité de combler le trou représenté par la décision américaine. Ce recul des subventions volontaires américaines est d’autant plus inquiétant à l’OIT que la contribution obligatoire des États doit être révisée en juin prochain, souligne-t-elle. FO et cinq autres organisations syndicales siégeant à l’OIT rédigeront une motion de soutien lors de la prochaine Conférence internationale du travail et entendent peser contre les suppressions de postes et de missions.

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