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15 / 06 / 2021 | 344 vues
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Quels nouveaux leviers activer pour enfin atteindre l’égalité salariale entre les femmes et les hommes ?

À constater la lenteur avec laquelle les écarts salariaux entre entre les femmes et les hommes se comblent, il est temps d’accélérer le mouvement. Retour sur les échanges du 28 mai dernier portés par le cabinet SoExpert pour faire émerger de nouveaux leviers d’action.
 

Au rythme d'une réduction de 0,3 point par an, il faudra attendre encore 56 ans pour combler l’écart salarial de 16,8 % entre femmes et hommes pour un même volume de travail. « La durée minimale de travail d’un salarié à temps partiel fixée par la loi à 24 heures par semaine n’est pas effective quand on regarde toutes les dérogations dans les branches qui limitent une liberté de choix qui concerne avant tout les femmes », souligne Marie Saunier, consultante CSE chez SoExpert, qui considère que tous les leviers doivent être mobilisés, à tous les niveaux, pour accélérer la réduction des écarts salariaux dans les entreprises. Cela commence par la capacité du cabinet d’expertise missionné par le CSE, dans le cadre de l’information-consultation sur la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et d’emploi ou dans le cadre de la négociation de l’accord sur l’égalité professionnelle à analyser le fichier des rémunérations transmis par la direction.


« Il s’agit de dépasser les biais de l’index et le rapport de situation comparée pour livrer une analyse fine, service par service, qui nourrisse à la fois des avis motivés et des revendications », précise Marie Saunier. Ces revendications ne sont pas que collectives. « La responsable de la commission d’égalité professionnelle de notre CSE assure le service après-vente du rapport de l’expert auprès des salariées qui manquent de points de comparaison par rapport à leurs collègues masculins qui parlent plus facilement de salaire entre eux. Cela a été le déclencheur pour que des salariées se décident à monter au créneau pour négocier une augmentation des salaires », se réjouit Clotilde Véran, déléguée syndicale CFDT de l’UES Mediawan Rights & Thematics où SoExpert intervient en soutien du CSE.

Donner des repères

L’index d’égalité professionnelle n’a pas manqué d’être contesté à l’occasion du direct organisé le 28 mai par le cabinet d’expertise auprès des CSE SoExpert. Pour 59 % des 90 répondants à notre sondage proposé pendant le direct, l’index constitue un levier de communication interne. « Cet index a le mérite d’exister même s’il ne suffit pas à éclairer toute la complexité du sujet. En tant que DRH, je dois veiller notamment au moment du recrutement à ce que les écarts salariaux puissent se justifier par des parcours ou des expériences différentes. Le niveau de salaire à l’embauche est en effet un point essentiel à bien négocier car les éventuels retards pris sont très lents à rattraper. L’analyse des écarts doit prendre en compte toutes les dimensions, et aussi le fait que les évolutions salariales les plus fortes se font le plus souvent par la mobilité externe. L’incidence du nombre de changements d’employeur dans un parcours professionnel pour les femmes et les hommes est aussi à prendre en compte. À partir de là, il est essentiel que les salariées puissent avoir des repères salariaux tant en interne qu’à l’externe pour se sentir à l’aise pour se saisir du sujet de leur rémunération avec assurance et assertivité », considère Claire Silva, DRH du groupe AG2R La Mondiale qui propose du coaching et du mentorat, notamment aux femmes, pour leur apporter de la confiance et encore une fois des repères. Si ces actions d’accompagnement strictement individuelles ne sont pas intégrées dans l’accord (77 % des réponses du panel du direct), elles font l’objet de points réguliers en CSE en lien avec la politique d’égalité salariale.


Le besoin d’accompagnement individuel s’illustre pleinement au moment des entretiens d’évaluation pour affirmer ce que l’on a fait, sa manière de le faire et ses motivations. « Les femmes ont besoin de s’identifier à des repères féminins qui ne soient pas forcément associés à une énergie masculine pour prendre la place qu’elles ont envie d’occuper », explique Mélissa Demandre, experte comptable chez SoExpert et spécialiste en neurosciences appliquées au management, qui propose des journées dédiées aux femmes dans les cabinets d’expertise comptable à travers l’association Les Nouv’L Expertes qu’elle a co-fondée pour mettre des expertes comptables ayant décidé de créer leur propre cabinet en réseau, pour pleinement s’accomplir. Des ateliers sur l’assertivité et les parcours de collaboratrices possibles au sein des cabinets sont notamment proposés lors de ces journées. L’approche est donc collective mais vise bien à provoquer des déclics individuels. « Il est plus que jamais nécessaire de libérer la parole sur le sujet des écarts salariaux injustifiés. Or il est parfaitement possible de prévoir le cadre d’un droit d’expression collectif dans un accord d’égalité professionnelle. C’est même très approprié », explique Amélie Klahr, avocate en droit social et associée chez Covence Avocats. Un peu plus d’un quart des répondants à notre sondage en ligne déclarent qu’un tel droit d’expression se trouve intégré dans leurs accords.

Pour un engagement collectif

Quand les écarts salariaux deviennent insupportables, la voie du contentieux est ouverte. « Même si la charge de la preuve est allégée, il faut pourtant parvenir à récolter les données comparatives qui vont permettre de constater le caractère injustifié des écarts. Cela prend du temps », prévient Amélie Klahr qui conseille plutôt aux femmes concernées de s’engager dans des actions de groupe portées par des syndicats ou des CSE. L’occasion par ailleurs d’éviter l’isolement d’une action individuelle aux prud’hommes. « Il faut que les CSE se saisissent pleinement du sujet au risque de voir un mouvement #balancetonsalaire fleurir sur les réseaux sociaux avec des représentants des salariés dépassés. Pour cela, les femmes doivent continuer de renouveler les instances de représentation du personnel », estime Marie Saunier en partant du principe que tous les leviers d’action doivent être activés. Même les quotas dans les instances dirigeantes avec toutes les interrogations sur la théorie du ruissellement...