Participatif
ACCÈS PUBLIC
03 / 11 / 2025 | 20 vues
Sandra Déraillot / Membre
Articles : 14
Inscrit(e) le 09 / 04 / 2025

Un taylorisme augmenté: critique de l'intelligence artificielle

Sans résistance, l’IA ne fera pas que supprimer des emplois....Un sociologue du travail se penche sur l’impact de l’intelligence artificielle sur la qualité des emplois : sans surprise la dégradation est annoncée. « L’ IA telle qu’elle existe aujourd’hui relève du taylorisme numérique : c’est un outil déployé pour déposséder les travailleurs de leur contrôle sur le travail. »

 

IA

 

Juan Sebastián Carbonell, sociologue du travail, propose, dans un ouvrage bref et facile d’accès (*), une critique de l’intelligence artificielle repositionnée dans une histoire longue de l’organisation du travail. Il montre combien le changement technologique a toujours été le produit de choix qui peuvent être combattus.

 

Les mêmes débats que ceux qui surgissent aujourd’hui autour de l’IA sont survenus lors de l’avènement de la mécanisation et de la robotisation. Car, « ceux qui contrôlent la disposition des ressources et le rendement des investissements choisissent parmi les applications technologiques disponibles celle qui est la plus favorable à leurs intérêts tels qu’ils les définissent. » Un impact qui touche aussi les postes qualifiés

 

L’enjeu, selon le sociologue, n’est alors pas tant la perte d’emplois qui peut résulter du déploiement de cette technologie que ses effets sur la qualité de l’emploi. Et Carbonell de citer plusieurs exemples pour lesquels l’application actuelle de l’intelligence artificielle n’est ni un gain de temps, ni une amélioration de la qualité du travail, mais plutôt un morcellement des tâches qui permet de déposséder le travailleur de la maîtrise de l’ensemble des tâches qu’il réalisait jusqu’à présent, pour ne plus devenir qu’une sorte de contrôleur final de qualité, moins bien rémunéré.

 

Ainsi en est-il du métier de traducteur, à qui les promesses du marketing vantaient l’IA comme un assistant effectuant les tâches les moins intéressantes, telles que la traduction technique, pour ne laisser que les travaux les plus nobles, les plus littéraires, les plus créatifs à l’humain.

 

Compte-tenu des limites de l’outil (et de la spécialisation des professionnels qui ne peuvent changer de matière rapidement), nombre de traducteurs se sont vus transformés en éditeurs, chargés de vérifier et de peaufiner la qualité des textes, ce qui n’est pas nécessairement plus facile, mais s’avère moins bien rémunéré. « Hier comme aujourd’hui, les travailleurs ont de bonnes raisons de s’opposer au changement technologique au travail », conclut l’auteur, appelant même à un « renouveau luddite », du nom de ces ouvriers anglais du XIXe  siècle qui brisèrent les machines dont ils craignaient qu’elles dégradent la qualité de leur travail, leurs compétences, leurs revenus, et qu’elles ne finissent par supprimer leurs postes.

Pas encore de commentaires