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24 / 11 / 2025 | 12 vues
Eric Peres / Abonné
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Transparence salariale: Où en sont les cadres et les entreprises ?

 

La directive européenne sur la transparence salariale, qui doit être transposée d’ici juin 2026, va modifier en profondeur les pratiques de rémunération dans les entreprises. L’Apec dresse un état des lieux du point de vue des cadres et analyse le niveau de préparation des organisations. Elle met en évidence une demande claire de transparence, des difficultés persistantes pour accéder à l’information salariale et plusieurs défis RH identifiés par les employeurs.

 

Une demande forte de transparence mais un sentiment d’opacité marqué

 

Plus de six cadres français sur dix (64%) souhaitent que les salaires soient connus de tous dans l’entreprise, une proportion comparable à celle observée en Allemagne, en Espagne ou en Italie. Les échanges sur la rémunération ne constituent pas un tabou : 80 % en parlent avec leur manager, 79 % avec leurs proches et 63 % avec leurs collègues. Malgré cela, 46 % jugent leur entreprise opaque sur le sujet des salaires, contre 28 % en Italie ou 33 % en Espagne.

 

Les mécanismes d’augmentation sont également perçus comme insuffisamment lisibles. 49 % des cadres estiment les critères d’augmentation opaques, et 41 % considèrent que leur entreprise n’est pas juste dans l’attribution des hausses. Les cadres des grandes entreprises (58 %), les non-managers (60 %) et les femmes (52 %) expriment encore plus fortement ce ressenti d’opacité.

 

Des difficultés à se situer sur le marché et un accès limité aux informations internes

 

Les cadres cherchent activement à s’informer : 69 % consultent les salaires publiés dans les offres de leur propre entreprise, 63 % s’appuient sur d’autres offres d’emploi et 53 % utilisent des outils de comparaison. Pourtant, un cadre français sur deux déclare ne pas bien connaître les salaires des postes équivalents dans son entreprise. Dans les grandes entreprises, cette proportion atteint 65 %.

 

L’accès aux données internes reste limité : 66 % des cadres indiquent avoir du mal à accéder à une grille de salaire ou aux niveaux minimums par type de poste, et 74 % jugent difficile de connaître les salaires moyens par poste. Enfin, 81 % ne savent pas quelles personnes ont été augmentées, ce qui contribue à la difficulté de se situer.

 

Des entreprises encore peu alignées avec les obligations de la directive européenne

 

Les offres d’emploi n’affichent pas toujours les salaires : seules 46 % des entreprises publient systématiquement cette information. Lorsqu’elles le font, 82 % indiquent une fourchette plutôt qu’un montant précis, et 76 % signalent que les candidats peuvent négocier au-delà de la fourchette affichée. Par ailleurs, 60 % demandent encore le salaire actuel ou précédent du candidat, une pratique qui deviendra interdite.

 

Les obligations liées à la politique salariale sont elles aussi peu anticipées : seul un tiers des grandes entreprises met une grille salariale à disposition des salariés et 26 % des organisations déclarent avoir entamé une démarche de préparation à la directive. Parmi elles, 12 % ont déjà pris des mesures concrètes.

 

Quatre défis RH identifiés : coût, justification, climat social et attractivité

 

Les entreprises anticipent des besoins importants de mise en conformité : analyse des données salariales, révision des classifications et adaptation des processus d’augmentation ou de promotion. Ce travail est décrit comme « un investissement lourd » par plusieurs responsables RH et pourrait nécessiter des ressources dédiées, notamment dans les PME.

 

Le second défi porte sur la justification des salaires. 63 % des managers déclarent avoir du mal à expliquer certaines différences de rémunération dans leur équipe. La possibilité pour les salariés de demander des explications sur les critères d’augmentation ou les niveaux moyens de salaire renforcera la nécessité d’outils objectifs.

 

Des impacts possibles sur le climat social et sur les pratiques de recrutement

 

La transparence salariale pourrait créer des tensions internes : 62 % des managers pensent qu’elle pourrait entraîner des conflits entre collègues et 52 % redoutent des conflits avec leurs propres collaborateurs. Du côté des cadres, 89 % chercheraient à renégocier leur salaire s’ils apprenaient qu’un collègue de poste équivalent est mieux rémunéré, et six sur dix envisageraient même de changer d’entreprise.

 

Dans le recrutement, les effets sont ambivalents. 49 % des entreprises estiment que l’affichage des salaires attire surtout des candidats motivés par la rémunération, et 38 % pensent que cela peut décourager des profils pertinents. Certaines observaient moins de diversité dans les candidatures lorsque les salaires étaient affichés, notamment chez les candidates qui s’autocensuraient face à des fourchettes jugées trop élevées.

 

L’étude de l’Apec : https://urls.fr/9dfran

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