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24 / 10 / 2019 | 150 vues
Frédéric Souillot / Abonné
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Les salariés exclus du champ d’application d’un accord minoritaire doivent participer au referendum de validation de cet accord

Selon l’article L 2232-12 du code du travail, dans les établissements pourvus d’un ou plusieurs délégués syndicaux, les salariés des établissements couverts par l’accord et électeurs au sens de l’article L 2314-18 issu de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 participent à la consultation.
 

Il en résulte que doit être consulté l’ensemble des salariés de l’établissement qui remplissent les conditions pour être électeurs dans l’entreprise sans préjudice de l’application, le cas échéant, des dispositions de l’article L 2232-13 du même code (Cass. soc., 9 octobre 2019, n° 19-10816).
 

Autrement dit, les salariés exclus du champ d’application d’un accord minoritaire doivent participer au referendum de validation de cet accord.
 

L’ordonnance n° 2017-1385 n’avait pas précisé les salariés qui devaient être consultés lorsqu’un accord est soumis à referendum. Ce referendum devait-il concerner les salariés uniquement bénéficiaires des dispositions de l’accord (dans ce cas, fallait-il également y inclure ceux qui, à l’avenir, seraient susceptibles de l’être ?) ou tous les salariés de l’établissement ? Dans cet arrêt, la Cour de cassation répond clairement à cette question.
 

Attention, dans le cadre d’un accord minoritaire catégoriel (et non d’un accord inter-catégoriel comme c’était le cas dans l’affaire du 9 octobre 2019), la consultation ne concernera que le personnel relevant d’une catégorie professionnelle déterminée relevant d’un collège électoral. En d’autres termes, la consultation sera menée à l’échelle du collège électoral, de sorte que seuls les salariés électeurs relevant de ce collège seront consultés.
 

À titre de parenthèse, rappelons que notre organisation syndicale demandait l’instauration d’un quorum pour la validation du referendum. Le législateur n’a pas entendu notre demande puisque la loi reconnaît que l’accord soumis à referendum est valide s’il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés. À défaut, il est réputé non écrit.
 

La Cour de cassation apporte une autre précision : la consultation demeure régulière, lorsque le syndicat représentatif n’a pas informé les autres syndicats représentatifs de sa demande d’organisation de consultation des salariés.
 

La notification a pour seul effet de faire courir les délais d’organisation de la consultation qui doit intervenir dans un délai de deux mois et le délai de huit jours au cours duquel les autres syndicats non signataires peuvent rejoindre les signataires initiaux pour atteindre le taux de 50 %.
 

Le protocole spécifique fixant les modalités d’organisation de la consultation des salariés doit être conclu entre l’employeur et des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages, sans exclure les syndicats non signataires (participent donc à la négociation du protocole spécifique toutes les organisations syndicales représentatives, même non signataires de l’accord minoritaire).
 

Du point de vue syndical, notre confédération est opposée au referendum.
 

Le referendum à l’initiative de l’employeur (nouveauté des ordonnances « Macron ») pourrait contrevenir à la convention n° 87 de l’OIT. En effet, il vise à affaiblir les syndicats majoritaires dans l’entreprise et, en ce sens, il est contraire au principe de la liberté syndicale dans la mesure où il met directement en cause l’action syndicale majoritaire, sans aucune autre initiative syndicale que l’abstention (voir blog Mediapart de Marie-Laure Morin, « Derrière le pragmatisme des ordonnances, la perversion des droits fondamentaux »).
 

De manière générale, le recours au referendum fragilise la démocratie sociale et nie la légitimité des organisations syndicales. La possibilité ainsi offerte, par la voie du referendum, de directement avaliser un accord d’entreprise en cherchant à persuader les salariés de retirer de fait la confiance qu’ils ont placée dans les syndicats représentatifs et majoritaires pourrait indûment influencer le choix des travailleurs et miner la position de ces syndicats, rendant ainsi la négociation plus difficile, ce qui est contraire au principe de promotion de la négociation collective, garanti par la convention n° 98.
 

Ce recours au referendum prévu par la loi est aussi contraire aux principes de la liberté syndicale garantis par la convention n° 87, dans la mesure où il peut être utilisé de manière à contourner les syndicats représentatifs majoritaires dans l’entreprise, empêchant ces organisations de continuer à prendre leur part dans la négociation. Notre organisation syndicale a d’ailleurs déposé une réclamation (article 24 de la constitution de l’OIT) devant le BIT sur cette question.
 

Le referendum risque de faire parler de lui encore longtemps...

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