Organisations
La Poste: La nouvelle gouvernance hérite d’un bilan positif
Les résultats du premier semestre ont été présentés en duo, par le président Philippe WAHL et Philippe BAJOU, fraîchement nommé Directeur Général du Groupe par intérim le 31 juillet 2025. Il fait état d’un RNPG (Résultat Net Part Groupe) de 719 M€ qui s’améliore de +45,4 % soit 225 M€.
Toutefois, quelques bémols :
- le chiffre d’affaires est en léger repli (-0,3 %),
- l’activité industrielle et commerciale reste sous tension,
- le marché du colis mute fortement vers le hors domicile qui est beaucoup moins margé.
La concurrence est également féroce sur tous les marchés et les autres grands intégrateurs du colis (UPS, FEDEX) souffrent également de l’augmentation des flux chinois.
Pourtant donc, les résultats sont plutôt bons ; portés d’une part par une forte croissance de La Banque Postale, après deux ans d’un plan de remédiation drastique et d’autre part, par une réduction des charges dans toutes les Branches, principalement à la BGPN et à la BSCC.
Cette réduction des charges impacte, une fois de plus les postiers, qui en sont les principales victimes (réorganisations, salaires bloqués, sorties de l’entreprise, …). Pour nous, il reste inadmissible que La Poste réalise des économies sur le dos de ses agents. L’exemplarité de leur travail et leur résilience portent les bons résultats du Groupe mais leurs conditions de travail se dégradent et leur salaire n’augmente pas ou si peu ! Notre fédération s’est d’ailleurs refusée de valider les NAO cette année au vu du manque d’ambition de La Poste lors des négociations.
La conjoncture macro-économique est toujours aussi compliquée, en France, l’inflation grimpe moins vite que par le passé (à hauteur de 1 %) mais le pays subit une faible croissance du PIB par rapport à l’Europe (0.1 % contre 0.6 %) et des taux courts en baisse. Également, une décision européenne du 15 juillet a validé la compensation de l’aménagement du territoire à hauteur de 177 M€ par an.
La publication des comptes réglementaires pour 2024 révèle un coût total des missions de service public de 2,037 Mds€ laissant à la charge de La Poste 1 Md€. Ce chiffre est toutefois en baisse pour la première fois depuis sept ans. Notre organisation syndicale continue de porter le sujet de la compensation à l’euro près des missions de service public jusqu’aux plus hautes instances de l’État, car ce sujet est d’une importance capitale dans l’élaboration d’un nouveau plan stratégique. L’ARCEP a validé le 23 juillet 2025, la revalorisation des tarifs proposée par La Poste. Selon cette dernière, cette augmentation moyenne de 7.4 % est considérée comme indispensable pour l’équilibre économique du Groupe. La Poste a présenté une gestion économique saine et pérenne. FO Com salue que La Poste ait été reconduite en tant que prestataire du service universel postal pour les dix prochaines années par l’État.
Ce premier semestre, le Groupe a continué de se transformer pour atteindre ces résultats dans un marché très concurrentiel en poursuivant ses activités de missions de service public toujours fortement déficitaires.
Le résultat d’exploitation du Groupe est en forte hausse soit 1,509 Mds€, favorisé par la baisse des charges. Le RNPG observe une bonne performance financière tirée par le PNB de La Banque Postale et par l’activité assurance de la CNP. La dette nette s’améliore de 500 M€, aidée par divers éléments conjoncturels, tels que le dividende exceptionnel de LBP et la vente de La Poste Mobile. Le ratio d’endettement se redresse à 5,3 %. Les résultats extra-financiers ont été présentés pour la première fois lors des comptes du 1er semestre. On y note par exemple une décarbonation de - 7 %, un pourcentage de véhicules décarbonés en avance de 0,5 point pour la BSCC par rapport aux attendus et également un résultat en avance sur la décarbonation du dernier KM de 1,7 point chez GeoPost.
En plus de ces actions écologiquement vertueuses, La Poste annonce l’ouverture de la première station d’avitaillement en biogaz en Occitanie. Nous ne pouvons que nous féliciter de ces bons résultats, mais souhaiterait qu’ils soient partagés de manière plus équitable avec les personnels notamment en termes salariaux.
Notons que le REX (résultat d'exploitation) est positif et même en croissance de 82 M€ malgré une érosion du chiffre d’affaires. Ce résultat est dû à une forte réduction des charges. Selon la Branche, cette baisse du chiffre d’affaires est expliquée par une érosion des volumes courrier et par une activité colissimo en repli, le marché du colis ayant subi une véritable mutation en Europe.
La croissance du colis s’oriente principalement sur le hors domicile, 25 % de la livraison (+ 18 % de part de marché du hors domicile chez Colissimo), avec une pression sur les marges et une rentabilité qui se contracte. La BSCC vient de conclure un accord avec Amazon courant sur cinq ans permettant de conserver du trafic.
L’activité des imprimés publicitaires s’est redressée suite au plan de remédiations de Médiaposte, qui annonce un REX croissant de 22 M€. Cette croissance intervient après la reprise par la BSCC de la partie opérationnelle de la filiale Médiaposte. C’est au travers d’un accord de transition, dont nous avons été et restons un acteur majeur qui a permis de reclasser et d’aider 4 500 salariés de Médiaposte vers un autre métier au sein de la maison mère ou vers d’autres projets personnels. Une partie de l’activité de l’approvisionnement en logistique (timbres, colis, vêtements, consommables, ...) vers les bureaux de poste est transférée sur la PIC de ROYE.
Notre fédération dénonce le manque de préparation et d’organisation de ce transfert. Nous avons demandé la neutralisation des objectifs de vente et des écarts d’inventaire. La baisse d’activité induite par cette situation ne doit pas venir justifier la baisse des effectifs de demain à la BGPN.
Lors des déplacements de ses militants sur le terrain, nous rencontrons quotidiennement des clients et des postiers mécontents de la qualité de service (retard de distribution, conditions de travail, etc.). Pourtant, la Branche se félicite d’un niveau de NPS (satisfaction client) en progression. Il faut croire que seuls les clients satisfaits répondent aux sondages !
Force est de constater un climat macroéconomique toujours compliqué, du coup, défavorable pour GeoPost. Toutefois, le rebond observé est essentiellement dû à la forte croissance des flux chinois et une augmentation de 26 % sur le hors domicile soutenue par l’augmentation de lockers (consignes).
Il est à noter la création de 9 000 consignes en 2024 puis 3000 supplémentaires en 2025 en Pologne ; le Royaume Uni, quant à lui, complète son réseau avec 12 000 points de retrait supplémentaires. La baisse de 82 M€ du REX s’explique en partie par les coûts de mise en conformité de BRT (170 M€).
La situation de BRT (société DPD Group Italienne) s’améliore. Un accord minoritaire favorable a d’ailleurs été signé entre GeoPost et la famille BARTHOLINI. Il permet notamment la baisse des loyers et un renouvellement des baux sans limites dans le temps.
Pour notre organisation syndicale, c’est une bonne opération qui va compenser une partie des pertes de BRT (dues aux opérations de contrôle de la société par le procureur de Milan) et d’améliorer le résultat de BRT pour les années futures. GeoPost a également perçu une indemnisation de 16 M€ de Scalefast (plateforme de gestion des achats acquise en 2022) au titre de la police d’assurance sur la transaction. Face aux difficultés de Ninja Van, GeoPost ne souhaite plus investir dans cette société et a procédé à la dépréciation totale des titres pour 109 M€. De ce fait si Ninja Van stoppe son activité, cela ne détériorera pas les comptes de GeoPost puisque la totalité de l’investissement a été dépréciée.
La performance de la Branche (REX en hausse de plus de 5 M€ soit 66 M€) est due principalement à la baisse des charges (165 M€). Nous regrettons encore que les économies de charges se fassent sur les personnels.
Les résultats bancaires sont bons : forte montée en gamme des cartes bancaires, augmentation du multi-équipement et une augmentation du crédit conso de +7 %.
En 2024, la fréquentation des clients en bureau de poste s’était stabilisée, mais au cours du 1er semestre 2025, on observe, à nouveau, une baisse de 10 %. Le nombre de points de contact est repassé au-dessus des 17 000 dont seulement 6 508 bureaux de poste.
Les services courrier-colis en bureau de poste réalisent 1,6 Md€ de CA avec une baisse du trafic de 14 % malgré une bonne tenue des activités Vinted et Chronopost.
Quant à l’activité ETG (code de la route), elle continue de progresser (12 %) pour un CA de 12 M€, ceci favorisé par une augmentation des centres d’examen et l’abaissement de l’âge pour passer le permis à 17 ans.
L’excellent travail fourni par les postiers, permet à la BGPN de voir progresser ses performances extra-financières : NPS particuliers (+ 3 pts), NPS professionnels (+ 3 pts) et NPS LBP (+ 5 pts). FO Com rappelle que la satisfaction client est étroitement liée au professionnalisme des agents.
Au niveau des filiales, Docaposte a obtenu le label Numérique Responsable de niveau 2, plus haute distinction en France. Heva, filiale de Docaposte a obtenu l’autorisation de la CNIL pour établir un entrepôt de santé Freia. NumSpot a lancé sa plateforme de cloud souverain avec quatre entreprises françaises (banque des territoires, Docaposte, Dassault Système et Bouygues Telecom) et compte déjà une cinquantaine de clients.
À noter que Ma French Bank a fermé définitivement en juillet (188 000 salariés sont restés à LBP). Enfin, le parc d’identité numérique atteint 7,4 millions et continue de croître (+ 32 % en un an) et le nombre de coffres-forts Digiposte est en hausse de 16 % et s’élève à 12,9 millions.
Ces résultats ne doivent pas masquer les difficultés rencontrées par les chargés de clientèle dont l’effectif diminue. La reconnaissance de leur investissement n’est pas au rendez-vous. Les exigences, les responsabilités ainsi que les connaissances s’accroissent tandis que leur rémunération stagne. Leur métier, en constante évolution doit être reconnu !
La Banque postale rebondit avec un résultat de CNP Assurance toujours élevé et enregistre un RNPG (Le résultat net part du groupe) de 831 M€ (+ 61 % soit + 168 M€ par rapport au premier semestre 2024).
La CNP est en croissance grâce à une progression de la marge assurance et des bonis de sinistres sur la prévoyance.
La création de CNP Protection sociale, en partenariat avec La Mutuelle Générale, a permis de réaliser un chiffre d’affaires de 90 M€ et un résultat consolidé de 20 M€. Les taux longs se portent mieux, l’OAT a 10 ans est à 3,29 % et les taux courts sont en baisse (- 2,44 %). Le tout favorisé par la baisse du Livret A, qui, ne l’oublions pas, pénalise de nombreux épargnants. À noter qu’une baisse de 25 points de base fait gagner 72 M€ à LBP.
La baisse des DAV (dépôt à vue) qui semble par ailleurs se stabiliser, s’explique par le transfert vers l’épargne réglementée. On observe également une baisse de 45 M€ des charges, principalement sur les conventions avec La Poste et sur l’activité Guichet, mais le développement informatique se poursuit. Stéphane DEDEYAN, Président du Directoire de La Banque Postale, annonce un chantier de refonte des process dans les CREC (centres financiers), un modèle plus centré sur le client.
LBP réalise moins de crédits immobiliers : la production est passée de 3,6 Mds€ à 2,5 Mds€ en un an. Seuls, semble-t-il, les bons clients faisant du multi-équipements bénéficient encore de crédits immobiliers, mais, selon nous , cette situation ne peut perdurer : nous perdons des clients et nous ne risquons pas de rajeunir notre clientèle ! La BEDL ( Banque des Entreprises et du Développement Local) a rencontré des difficultés sur le financement car le TRI (Taux de rentabilité interne) de LBP est trop élevé par rapport aux autres banques mais La Poste espère combler l’écart au second semestre.
On constate une légère amélioration sur La Banque des Pros avec une conquête positive sur les clients en portefeuille et un développement des crédits sur les petits professionnels.
Louvre Banque Privée est en croissance. La bibancarisation avec les clients de LBP doit diminuer et à ce jour, elle doit augmenter le nombre de clients en faisant sa propre conquête.
En conclusion, notre organisation syndicale ne peut que se réjouir de bons résultats de l’entreprise portés par le redressement de La Banque Postale et principalement par
La CNP qui enregistre un résultat net de plus 13 %. Ainsi, avec un résultat net Groupe de 719 M€, les dirigeants vantent auprès du CSE Central une bonne situation économique.
Malheureusement, comme à l’accoutumée, nous déplorons que les salariés, qui contribuent à ces résultats par leur travail quotidien et leur professionnalisme, n’en récoltent pas les fruits. Les laborieuses et infructueuses Négociations Annuelles Obligatoires (NAO) en sont la meilleure illustration. Aucune augmentation générale pour les salariés de La Banque Postale, revalorisation inférieure à 1 % pour les classes I et II de la maison-mère, c’est à dire en deçà de l’inflation ce qui nous a empêchés de contractualiser, échec également à NEOLOG, bref un rendez-vous une fois de plus raté. Heureusement, quelques filiales du Groupe tirent leur épingle du jeu, par exemple à CHRONOPOST et DPD où FO Com a pu apposer sa signature pour un accord qui améliore le pouvoir d’achat des salariés.
La question salariale reste donc plus que jamais d’actualité et continue à être portée par notre organisation syndicale qui considère que c’est une question de justice sociale ; beaucoup de postiers se trouvent aujourd’hui en difficulté, voire en grande précarité financière.
De plus, il faut rappeler que payer correctement ses salariés est la première des reconnaissances. À l’heure où tous les personnels font face aux réorganisations et autres adaptations dans un contexte économique tendu, cette reconnaissance est une nécessité. D’autant que l’avenir risque d’être synonyme d’efforts supplémentaires.
La question du financement des missions de service public est toujours en suspens.
Les politiques d’austérité menées par le gouvernement et les mesures budgétaires vont immanquablement avoir, une fois de plus, des répercussions néfastes pour les services publics et en particulier pour le service public postal dont la Poste devra en supporter les conséquences. Rappelons que la sous-compensation des 4 missions coûte plus de 1 Md€ par an au Groupe. La diminution des volumes du courrier se traduit par une perte sèche de 500 M€ de chiffre d’affaires chaque année. Dans le même temps, La Poste vient d’être reconduite opérateur du service postal universel c’est-à-dire l’obligation de distribution du courrier 6 jours sur 7 sur tout le territoire.
Qui paye ?
Tout d’abord les postiers qui voient leurs conditions de travail se dégrader avec les suppressions d’emplois et leurs rémunérations stagner.
Pour les postiers rattachés aux fonctions liées à la distribution et l’acheminement se rajoute la constante « adaptabilité » organisationnelle. Les citoyens ensuite avec la hausse des tarifs. Après une augmentation générale de 6,8 % en 2025, la hausse sera de 7,4 % en moyenne au 1er janvier 2026. Bien sûr, et c’est un argument majeur pour La Poste, cette hausse tarifaire n’impacte que très faiblement le budget des ménages, environ 28 € par an en moyenne. Cependant, les conséquences pourraient toutefois être contre-productives.
D’une part pour le trafic colis pour qui le tarif devient « conséquent » dans un environnement ultra-concurrentiel, d’autre part, la hausse tarifaire est un tremplin pour la communication numérique, ce qui accentue la chute des volumes. Si cette stratégie peut permettre de garder la tête hors de l’eau lors des passages économiquement difficiles elle ne s’inscrit pas comme une solution pérenne.
Alors que , depuis 2020, le prix du timbre a augmenté de 40 % palliant la baisse d’activité, l’emploi, lui, a fondu délaissant, dans le même temps, la qualité de service.
Le remplacement du PDG par une gouvernance temporaire risque de freiner les décisions stratégiques et donc être préjudiciable. En effet, il est difficile pour le nouveau Directeur Général de dépasser le stade de la stratégie déjà prévue ou en cours.
Pour nous , cette situation ne peut être que transitoire, elle ne pourra perdurer qu’au risque de développer un climat anxiogène générateur d’incertitudes et d’inquiétudes pour les postiers, à commencer par ceux dont la mission est de déployer la stratégie du Groupe.
Comment l’État, actionnaire majoritaire, peut-il laisser un groupe public de 240 000 salariés et fonctionnaires sans Président ?
Tous ces défis à relever et cette période d’incertitudes à gérer nous obligent à un dialogue social solide et constructif. Pour FO Com, le nouveau dialogue social au sein de La Poste SA et les bouleversements qui s’ensuivent doivent maintenant bénéficier à tous les personnels.
Notre organisation, bien qu’opposée à la mise en place des CSE qui affaiblissent les actions syndicales, considère que ces nouvelles instances ne doivent avoir comme priorité que les intérêts des postiers, de tous les postiers.
Ainsi, dans les 32 nouveaux CSEE de la maison-mère, comme au sein des CSEE des filiales et du CSEC , notre fédération porte ses revendications qui sont vos revendications exprimées sur le terrain. Un bon dialogue social nous a permis quelques signatures d’accords :
- GEPPMM (Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels et Mixité des Métiers)
- QVCT (Qualité de Vie et Conditions de Travail)
- Égalité professionnelle
- Accord BSCC
- Accord aidant à LBP
Ces accords sont tous un plus pour chacun.
Ensemble, il nous faut les défendre, les faire appliquer. Ils viennent en complément des revendications stratégiques portées et débattues par notre organisation syndicale au sein du Conseil d’Administration. Nous entendons bien continuer, avec, toujours à l’esprit, des revendications claires : rémunérations, emploi, conditions de travail, service public.