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24 / 06 / 2015 | 6 vues
Nadia Rakib / Membre
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L'obligation de sécurité de résultat : une « mission impossible » ?

Le code du travail prévoit que l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Oui mais que doit-on comprendre par « mesures nécessaires » ?

Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. Mais pas seulement. L’employeur doit aussi veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. Un vrai travail tant sur le fond que sur la forme, à ne pas négliger sous peine de lourdes sanctions !

En somme, les mesures nécessaires sont celles qui permettent à l'employeur d’assurer l'effectivité de son obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise.

Il ne faut donc pas la confondre avec « sa fausse jumelle » appelée « obligation de moyens ». En effet, la qualification d’obligation de résultat a pour effet d’engager la responsabilité de l’employeur de plein droit du seul fait de l’inexécution de son obligation de sécurité.

Ce dernier ne pourra s’en exonérer qu’en démontrant que l’accident ou l’événement dénoncé est dû à une cause étrangère présentant le caractère de la force majeure, c’est-à-dire un caractère imprévisible, irrésistible et extérieur à la personne qui l’invoque. En tout état de cause, l’obligation de sécurité qui pèse également sur le salarié n’affecte nullement le principe de responsabilité de l’employeur.

L’obligation de sécurité de résultat : une « mission impossible », vous dites-vous ?

Quoi qu’il en soit, ceci explique que la charge de la preuve qui repose sur le salarié s’en trouve allégée dans la mesure où il appartient à l’employeur de démontrer qu’il a pris toutes les mesures nécessaires à l’effectivité de l’obligation de sécurité.

Dans cette affaire, une salariée avait été engagée en qualité de dessinatrice par une société d’habitat et de création. Elle avait été placée en arrêt de maladie et le médecin du travail l'avait déclarée inapte à son poste de travail, sans seconde visite, pour danger immédiat. Elle a été licenciée pour impossibilité de reclassement et a décidé de saisir la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture de son contrat de travail.

  • La Cour d'appel de Rennes l'avait débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour tabagisme passif.

En l’espèce, elle avait retenu qu'il résultait du document manuscrit particulièrement détaillé et spontané, réalisé pour son entretien d'évaluation, que la salariée était très satisfaite de ses conditions de travail. En l’occurrence, elle dépeignait une bonne ambiance d'équipe et de bonnes relations avec son employeur et ne se plaignait en aucune façon de tabagisme passif.

De plus, l'employeur précisait qu'elle accompagnait ses collègues lors des pauses cigarette dans le garage et ceci alors même qu'elle n'y était nullement obligée. Ce dernier faisait aussi valoir que sa présence dans le cabinet était extrêmement réduite et qu'au vu du certificat médical produit, ses arrêts étaient motivés par une tendinopathie calcifiante, affection sans aucun lien avec un tabagisme passif.

Quid juris : Dans ces circonstances, l’employeur devait-il être tenu pour responsable de l’exposition « consciente et partielle » de la salariée au tabagisme passif ?

  • La Haute Juridiction a infirmé l’arrêt rendu par les juges rennais et a souhaité par cette jurisprudence rappeler à tout employeur que l’obligation de sécurité de résultat ne fait pas l’objet de « circonstances atténuantes ».

Dès lors, les juges du fond ont basé leur décision sur des motifs impropres à exonérer l'employeur de sa responsabilité en matière d'exposition de la salariée au tabagisme passif.

Enfin, il faut savoir que l'interdiction peut aussi concerner la cigarette électronique (« e-cigarette ») si cela est prévu par le règlement intérieur de l’entreprise. Si tel est le cas, le vapotage en méconnaissances des dispositions règlementaires produira les mêmes effets…

Sources
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 3 juin 2015, n° 14-11.324 14-11.339, inédit.
Cour d'appel de Rennes, arrêt du 27 novembre 2013.
Articles L. 4121-1 et L. 4122-1 du code du travail.
Articles 2. 1 à 2. 3 de la convention collective nationale des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement du 24 mai 2007.

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Suite au vote de la loi santé en avril 2015, la cigarette électronique est interdite dans tous les espaces de travail clos et couvert, même si l'existence d'un vapotage passif n'a pas été démontrée pour le moment. Un décret va rendre obligatoire la mise en place dans toutes les entreprises d'une zone de vapotage à la fois séparée des fumoirs et des communs. Les entrepreneurs vont être contents ! http://www.smokeway.fr/8-e-cigarettes