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07 / 06 / 2023 | 50 vues
Bernard Ribet / Membre
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Réforme des retraites : pourquoi s'être obstiné ?

Comment en est-on arrivé là ?

En 1981 François Mitterand alors Président de la République avait décidé de fixer à 60 ans l’âge légal de départ à la retraite. Il s’agissait alors de permettre aux Français qui justifiaient de 37,5 annuités, de partir à la retraite dès 60 ans. C’était l’acquis social le plus important de cette fin de siècle.
 

Pourtant depuis 1993 et, quel que soit le gouvernement en place, nous sommes allés de régression en régression.
 

  • 1993 : le gouvernement Balladur porte la durée de cotisation requis pour une retraite à taux plein de 37,5 annuités à 40 annuités.
  • 2003 : la réforme Fillon aligne la durée de cotisation des fonctionnaires sur les salaires du secteur privé et la porte à 41 ans. Dans le même temps le calcul des pensions est effectué pour le secteur privé sur les 25 meilleures années au lieu des 10 meilleures années antérieurement.
  • 2010 : le gouvernement Fillon porte l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans
  • 2014 : la réforme Touraine allonge la durée de cotisations pour l’obtention d’une retraite à taux plein ; son application est progressive soit un trimestre tous les 3 ans de 2020 à 2035. Donc, à terme, 43 ans pour les générations 1973 et suivantes.
  • 2023 : la réforme Macron prévoit, entre autres, un recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans et 43 ans de cotisations nécessaires dès 2027.
     

Rien ne permet de douter, hélas, qu’on s’arrêtera là. Les gouvernements successifs jouent sur la barrière d’âge ou les trimestrialités de cotisations requises ou les deux à la fois. Toute remise en cause d’une conquête sociale est en soi inacceptable et nous ne pouvons que craindre par rapport à notre protection sociale en général et c’est bien cela l’enjeu.


C’est pourquoi nous devons rester mobilisés. Cette réforme inopportune et injustifiée renforce les inégalités.


En obligeant les Français à travailler 2 ans de plus lorsque la réforme aura son plein effet, les carrières longues seront évidemment pénalisées. Quant aux femmes déjà défavorisées dans le système actuel, elles le seront davantage demain du fait d’une carrière discontinue et interrompue pour pouvoir s’occuper de leurs enfants. Combien d’entre elles n’auront même pas le nombre de trimestres requis, arrivées à l’âge légal de la retraite et devront donc poursuivre leur activité professionnelle au-delà pour pouvoir bénéficier d’une retraite à taux plein.  Les chômeurs et les personnes en invalidité seront aussi pénalisés puisque l’âge légal pour faire valoir leurs droits à la retraite est repoussé de 2 ans.

 

C’est une réforme socialement lourde de conséquences.

 

Une des justifications de la réforme est l’augmentation de la durée d’espérance de vie. Ainsi depuis une décennie l’effet mécanique des mesures prises par les gouvernements successifs est de reculer davantage l’âge effectif de départ à la retraite. Or d’une part on admet à présent que les projections ont été surestimées et d’autre part, c’est l’espérance de vie en bonne santé qu’il faut prendre en compte. Et rien ne permet d’affirmer que ces années supplémentaires gagnées soient vécues en bonne santé.

 

Il faut aussi s’interroger sur la place des retraités dans notre société.

 

Les retraités ont un rôle majeur à tenir et ils sont le ressort du lien social par leurs engagements bénévoles dans la vie associative de notre pays et par le soutien qu’ils apportent, souvent au quotidien, à leurs enfants et petits-enfants. Notre société a donc besoin de ses retraités Elle a besoin de bénévoles. Elle a besoin de retraités disponibles. La réforme aura un impact néfaste et nous ne pouvons que le déplorer car c’est la cohésion sociale qui est en jeu.
 


Cette réforme s’inscrit dans un contexte social particulièrement dégradé après la pandémie du COVID, avec la guerre en Ukraine, ses conséquences au plan économique et les inquiétudes qu’elle fait naître et surtout aujourd’hui avec une inflation galopante liée à l’explosion du coût de l’énergie et des hausses de prix à la consommation qui atteignent des niveaux records.


Et cependant ce sont les retraites qui sont dans le viseur de la politique du gouvernement dont l’objectif est d’en diminuer le poids dans la dépense publique. Ainsi le gouvernement obéit à une logique purement financière alors qu’il attise la colère sociale et qu’un climat de violence s’installe dans notre pays ce qui est de plus en plus préoccupant.

 

Et pourtant il restait tant à faire. Il y avait des priorités, des chantiers à ouvrir en urgence et entre autres :

 

> Le pouvoir d’achat

 

Les leviers sont bien évidemment l’augmentation des salaires – qui avec le plein emploi constituent le moyen le plus sûr de financer notre système par répartition – et les pensions.
 

Les retraités connaissent d’année en année une baisse du pouvoir d’achat et le Conseil d’Orientation des Retraites l’a souligné dans son rapport remis en septembre dernier Et pour 2023 avec une revalorisation des pensions de 0,8 %, la situation empire. Nous ne sommes qu’à la fin du 1er trimestre mais les chiffres parlent d’eux-mêmes.
 

  • Entre janvier 2022 et janvier 2023 les produits dits « premier prix » ont augmenté de 20,95 % et les produits bios de 13,32 %.
  • Pour le seul mois de février les prix à la consommation ont augmenté de 6,2 % sur un an
  • Selon l’INSEE les produits alimentaires devraient voir leur prix s’accélérer pour atteindre une hausse de 15,4 % sur un an en juin 2023.


Alors que des superprofits ont été enregistrés depuis 1 an dans le domaine de l’énergie et des transports, les factures de gaz et d’électricité explosent : + 15 % en février en moyenne pour l’électricité et le gaz. Et il n’y a plus de bouclier tarifaire.


Le carburant est toujours aussi cher même si Total Energies plafonne ses fournitures de carburant à 1,99 € dans les stations jusqu’à la fin de l’année – ce qui est déjà beaucoup.
 

Au total nous « surfons » sur une inflation à deux chiffres pour une revalorisation pour cette année inférieure à 1 %.


Face à cette crise le gouvernement qui a écarté toute mesure de blocage, a initié avec les grands distributeurs un dispositif qui devrait durer jusqu’en 2023, le panier anti-inflation ! Mais après ? Nous sommes entraînés dans une spirale de hausse des prix non contrôlée.

 

> La santé

 

La pandémie du COVID a révélé les défaillances graves de notre système de santé :
 

  • Hôpital public en faillite
  • Crise des urgences
  • Accès aux soins et déserts médicaux
  • Coût des dépenses de santé et dépassements d’honoraires.


Il faut un programme ambitieux à la hauteur des besoins.

 

> La prise en charge de la perte d’autonomie

 

La loi « grand âge » tant attendue a été repoussées – mauvais signal. Une proposition de loi donc d’origine parlementaire est en discussion actuelle à l’assemblée nationale, la loi « bien vieillir » mais elle ne présente aucune action ou engagement concret en termes de moyens et équipements et en personnel et les financements ne sont pas là en tout cas en regard des besoins. Et il y a tant à faire en matière d’aide au maintien à domicile, d’aide aux aidants familiaux, d’offres d’hébergement adapté de qualité et accessibles. Ce sont là les attentes des Français, et notamment des retraités et des personnes âgées, qui sont confrontés à une réalité du quotidien de plus en plus rude.

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