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19 / 12 / 2022 | 170 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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l'Agence France Locale (AFL) : un modèle coopératif original qui fait la preuve de son efficacité

Dès 2004, plusieurs collectivités ont expérimenté le financement direct sur les marchés via des opérations groupées d'appel au marché obligataire organisées par l’ancienne Association des communautés urbaines de France, aujourd’hui France Urbaine. Afin de poursuivre et d'approfondir cette démarche, plusieurs élus locaux représentatifs ont pris l’initiative de créer en avril 2010 une Association d’étude pour l’agence de financement des collectivités locales, destinée à imaginer ce qui deviendra l’Agence France Locale.

 

C'est finalement la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de régulation et de séparation des activités bancaires qui autorisa la création de l'Agence de financement des collectivités, désormais baptisée Agence France Locale.(AFL)  A la fin de l’année 2013, les deux sociétés nécessaires au fonctionnement du Groupe Agence France Locale ont été créées, autour de 11 membres fondateurs (une région, 3 départements, 4 EPCI et 3 communes).

 

La loi Engagement et Proximité du 27 décembre 2019 a, en son article 67, élargi la base des entités éligibles à l'adhésion à l'AFL en disposant que "les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux" peuvent rejoindre l'AFL. Un décret paru le 13 mai 2020 est venu spécifier les critères d'éligibilité des nouveaux actionnaires de l'AFL. 

 

En 2020, les collectivités locales membres ont formalisé la raison d'être du Groupe sous la forme d'un manifeste :  « Incarner une finance responsable pour renforcer le pouvoir d’agir du monde local afin de répondre aux besoins présents et futurs des habitants ».

 

Alors que l'AFL s'apprête à fêter ses 10 ans d'existence , entretien avec Yves Millardet, Président du Directoire.

 

Qu’est-ce que l’AFL et en quoi procède-t-elle d’une démarche originale ?

 

L’Agence France Locale, c’est une banque publique de développement qui a une particularité : avoir pour uniques « propriétaires » les collectivités et prêter exclusivement à elles. Ce sont les communes, petites ou grandes, les intercommunalités, les départements, les régions ou encore les syndicats qui investissent dans des « parts sociales » en apportant du capital. Les collectivités représentent 100% des actionnaires et 100% des élus au Conseil d’administration, leur donnant la maîtrise sur les orientations stratégiques de leur banque. Grâce à l’AFL, ils peuvent financer leurs projets locaux sous forme de prêts bancaires classiques, que l’AFL est en mesure d’octroyer après avoir levé des fonds sur le marché obligataire. L’AFL, c’est le circuit court de l’argent, en un mot.

 

Pourquoi ce modèle coopératif ? Il répond d’abord à un problème rencontré par les collectivités en 2008, après la crise des subprimes et la gestion déplorable de Dexia : beaucoup d’entre elles n’avaient plus d’accès au crédit. La situation était paradoxale, parce que les collectivités françaises étaient dans une situation solide malgré la crise. Mais l’initiative venait avant cela des communautés urbaines, qui s’étaient bien aperçues que l’union faisait la force pour lever des capitaux.

 

C’est pour remédier à cette situation que l’AFL a été créée, afin de permettre à toutes les collectivités d’aller directement sur les marchés. Le modèle est vertueux, en ce qu’il permet aux plus petites collectivités de bénéficier de la solidité des plus grandes et donc de conditions de marché favorables.

 

Quelles collectivités sont membres de l’AFL aujourd’hui ?

 

De onze membres fondateurs en 2014, on est passé à plus de 600 fin 2022. L’AFL aujourd’hui, c’est cinq régions, onze départements, douze métropoles, des dizaines d’intercommunalités et des centaines de communes.

 

Ces 600 collectivités représentent environ 22 % des investissements publics locaux et 52 % de la population française. Et ce n’est pas fini : nous savons que de très nombreuses collectivités ne connaissent pas encore le modèle de l’AFL et nous rejoindront dans les mois ou années à venir. Le potentiel de développement demeure considérable.

 

Combien de projets l’AFL a-t-elle contribué à financer ? De quelle nature ?

 

Depuis 2015, l’AFL a octroyé plus de 6 milliards d’euros de prêts. Concrètement, cela correspond à plus de 1600 contrats de crédit depuis 2015 et des centaines de projets qui ont vu le jour dans toutes les collectivités membres.

 

Je rappelle que les collectivités sont le premier investisseur public en France ! Nous accompagnons le financement de tous les secteurs où le monde local a une compétence d’investissement, qu’il s’agisse de l’accès aux services sociaux essentiels, de la transition écologique ou de la cohésion territoriale. Concrètement, l’AFL a pu contribuer à la modernisation des équipements de tri des déchets dans la Métropole de Lille, à la construction d’un centre culturel sur le Territoire de la Côte ouest à l’Ile de la Réunion, à la création de nouvelles classes de maternelle sur la commune du Bouscat près de Bordeaux ou encore au financement du transport scolaire pour le Syndicat intercommunal Marcillé-Visseiche en Ille-et-Vilaine.

 

Beaucoup d’Elus souhaitent s’assurer que le secteur bancaire reste à l’écart du financement des énergies fossiles. En adhérant à l’AFL, elles en ont la certitude absolue.

 

L’AFL propose-t-elle des prêts verts aux collectivités pour financer leurs projets écologiques ?

 

La valeur ajoutée de l’AFL est de faire beaucoup mieux que des prêts verts qui sont chronophages et extrêmement sélectifs pour les collectivités. L’AFL permet à ses collectivités membres de financer leurs investissements sociaux et environnementaux répondant à l’un des Objectifs de Développement Durable de l’ONU par des obligations durables, habituellement réservées aux grandes collectivités. Cela leur permet notamment de renforcer leurs efforts en faveur de la transition écologique dont les collectivités sont les principales actrices.

 

L’AFL atteint la décennie d’existence. Quel premier bilan tirez-vous de ce premier moment ?

 

Le bilan est extrêmement positif car l’AFL est un symbole très fort de l’innovation dont est capable le monde local. Créer une banque, peu d’acteurs privés y parviennent donc il faut saluer la capacité qu’ont eu les collectivités à le faire. Dans un environnement concurrentiel et très difficile, elles ont réussi à créer ex nihilo une banque qui est devenue un acteur incontournable du financement local. Aujourd’hui, l’AFL est le 4e prêteur aux collectivités en France d’après Finance Active, et même le 2e pour les collectivités de moins de 10 000 habitants d’après l’Observatoire Orféor des financements du secteur public local en 2021.

 

La présence de l’AFL au sein de l’écosystème local se traduit aussi par de nombreux partenariats avec les associations d’élus, avec les associations professionnelles de cadres territoriaux, ainsi qu’avec des acteurs publics comme l’ADEME. Les publications de l’AFL proposent à toutes les collectivités une expertise désormais inscrite dans la durée, avec la parution chaque année de notre Baromètre de la santé financière des collectivités, ainsi que d’études coproduites avec l’INET pensées comme des guides opérationnels sur des thématiques d’avenir : le financement de la transition, les budgets verts…

 

Quels sont les objectifs de l’AFL à court et moyen termes ?

 

La raison d’être de l’AFL est claire : incarner une finance responsable pour renforcer le pouvoir d’agir du secteur local, afin de mieux répondre aux besoins présents et futurs de ses habitants.

 

Face aux crises sanitaires, géopolitiques, climatiques, les collectivités ont su faire preuve de résilience et de volontarisme pour préserver leurs territoires. Elles sont déterminantes dans la réussite de la transition écologique, puisque 75 % des leviers de cette transition sont territoriaux. L’AFL entend, pour la prochaine décennie et pour après, être un acteur incontournable conférant aux collectivités des capacités d’action et une expertise sur tous leurs sujets. Et dans le même temps, il nous reste encore des efforts à faire pour faire connaître le modèle à l’ensemble des collectivités !

 

(*) pour en savoir plus sur l'AFL: http://www.agence-france-locale.fr/

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