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29 / 05 / 2023 | 127 vues
Hélène Fauvel / Abonné
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L’urgence sociale c’est d’en avoir pour son boulot, pas pour ses impôts

Comment peut-on raisonnablement imaginer restaurer la cohésion sociale et le consentement à l’impôt en transformant les citoyens en consommateurs selon une conception bien étrange de la fiscalité et du pacte républicain ? Comment peut-on encore imaginer y arriver au moyen d’un questionnaire commençant par : « Pensez-vous que vous payez trop d’impôts ? »
 

N’étant plus à une incohérence près, le Gouvernement, toujours sourd au rejet massif de la réforme des retraites, prétend maintenant, pour faire diversion, consulter la population sur l’usage des deniers publics.

 

Ainsi, sur une plateforme au nom pas populiste pour un sou « en avoir pour mes impôts », les contribuables sont invités à répondre à un questionnaire sur la manière de dépenser le produit de leur impôt par grands postes budgétaires.

 

  • Dépensons-nous trop ou pas assez sur tel poste ?
  • Devrions-nous dépenser plus ?
  • Le service public dans tel ou tel domaine s’est-il dégradé ou amélioré (un peu, beaucoup, très fortement) ? 

 

La transparence ne va toutefois pas jusqu’à indiquer les montants dépensés pour les aides publiques aux entreprises pudiquement nommées « Soutien à l’économie » et « aide à la recherche et au développement ».  Pire, il est possible de répondre plusieurs fois au questionnaire ce qui en dit très long sur la fiabilité du résultat de cette consultation.


Si nous étions joueurs, nous pourrions même parier que ce résultat correspondra à ce que souhaite faire le Gouvernement.

 

Le principe même de l’impôt consiste pourtant à ne pas avoir droit en échange de son versement à une prestation précisément identifiable.  Mais, qu’importe, le Gouvernement, jouant aux apprentis sorciers, ne recule devant aucun excès démagogique.

 

Il prend ainsi le risque d’introduire l’idée que chacun pourrait choisir ce qu’il finance avec ses impôts, que ceux qui paient beaucoup pourraient espérer recevoir davantage de la collectivité, bref que l’intérêt général serait donc subitement devenu la somme des intérêts particuliers. Celui qui n’a pas d’enfant, pourrait refuser de financer l’école, celui qui n’a pas de voiture les routes, celui qui n’est jamais malade l’hôpital, celui qui habite en ville les zones rurales et inversement. 

 

Comment peut-on raisonnablement imaginer restaurer la cohésion sociale et le consentement à l’impôt en transformant les citoyens en consommateurs selon une conception bien étrange de la fiscalité et du pacte républicain?

 

Comment peut-on encore imaginer y arriver au moyen d’un questionnaire commençant par : « Pensez-vous que vous payez trop d’impôts ? »

 

Loin d’un débat public sur la nécessité de réformer la fiscalité pour la rendre plus juste et plus progressive et en améliorer le consentement, c’est juste de la communication.
 

Cette consultation agite au contraire les passions tristes et tous les vieux démons français nourris par un discours poujadiste selon lequel la France serait un enfer fiscal où certains exemptés d’impôts directs bénéficieraient plus que d’autres du produit de la fiscalité.

 

Exit le pacte républicain et la solidarité ! Il faut que j’en ai pour mes impôts.

 

Ne serait-il pas plus efficace pour restaurer le consentement à l’impôt d’assurer à chacun « d’en avoir pour son boulot » ? 

 

L’urgence, c’est d’augmenter les salaires, l’urgence c’est de conditionner les aides publiques aux entreprises à la création d’emploi, au maintien dans l’emploi et à l’augmentation des salaires.  

 

L’urgence sociale c’est d’en avoir pour son boulot, pas pour ses impôts.

 

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Le chef de l’Etat a annoncé la semaine dernière deux milliards d’euros de « baisses d’impôts pour les classes moyennes d’ici la fin du quinquennat ».

 

Trois pistes sont évoquées :

- baisser encore les cotisations sociales,

- augmenter la prime d’activité

- ou réduire l’impôt sur le revenu.

 

Une nouvelle fois, ces annonces créent de la confusion, assimilant grossièrement l’impôt et les cotisations sociales.

 

Pour nous,  il s’agit en outre d’une opération de communication vers les « classes moyennes » laissant croire que la fiscalité progressive et la sécurité sociale freinent les augmentations de salaires. Dans la même logique que la plateforme « en avoir pour mes impôts », l’entreprise de délégitimation de l’impôt progressif et du modèle social se poursuit.

 

Comme en 2019, les mêmes éléments de langage sont mis sur la table au prétexte de redonner du pouvoir d’achat. En réalité, les exonérations de cotisations sociales et la prime d’activité ont pour objectif de réduire encore davantage le coût du travail. Elles fragilisent le financement de la sécurité sociale et favorisent la prolifération du travail précaire et des bas salaires en les subventionnant.

 

D’un point de vue budgétaire, notre organisation syndicale  dénonce la contradiction à vouloir réduire les déficits et la dette publique tout en poursuivant les baisses de recettes.

Le gouvernement se garde bien d’ailleurs de préciser comment ces deux milliards d’euros seront financés.

 

Quelles dépenses sociales, quels services publics devront encore être sacrifiés ?

 

Durant le précédant quinquennat, les baisses de recettes ont coûté au total 52 milliards d’euros aux finances publiques. Il n’est visiblement pas question de remettre en cause les baisses accordées aux ménages les plus aisés ni aux entreprises.

 

Pour nous , il est surtout  indispensable de réhabiliter le consentement à l’impôt républicain par une fiscalité progressive permettant de financer la solidarité nationale et des services publics de qualité.