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09 / 05 / 2014 | 35 vues
Jean Luc De Boissieu / Membre
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Une municipalité peut-elle soucrire des contrats collectifs pour ses administrés ?

Les dernières élections municipales ont donné aux medias l’occasion de revenir sur l'initiative assurantielle de Caumont-sur-Durance.

Cette commune de la Drôme a eu idée de proposer à tous ses administrés et à tous ceux qui y travaillent d’adhérer à un contrat collectif souscrit par elle et destiné à les couvrir en complémentaire de santé.

Pour ce faire, la commune a, semble-t-il, négocié avec une mutuelle de santé active dans la région un contrat collectif auquel les habitants ont la faculté d’adhérer. La presse fait état de ce que cette initiative pourrait faire des émules puisqu’il paraît que plusieurs dizaines de mairies ont mis à leur programme électoral la création d’une mutuelle villageoise.

Même si les mutuelles du GEMA ne sont pas leaders sur le marché de la santé, elles ne peuvent manquer de regarder cette initiative avec attention et de s’étonner de l’absence de réactions face à une novation qui pourrait faire tâche d’huile : aux salariés la couverture dans le cadre de leur entreprise ; aux autres la mutuelle du village ou de la commune et ainsi serait réalisée la promesse du Président Hollande de généraliser la complémentaire de santé pour tous les Français.

Pour les personnes qui ne pourraient adhérer au contrat collectif municipal, elles pourraient toujours avoir recours aux dispositifs nationaux destinés à favoriser l’accès à la complémentaire de santé des plus défavorisés : CMU, ACS, aide médicale d’État…

Zones d'ombre


Une première série d’interrogations porte sur la capacité juridique d’une commune à proposer à ses administrés de souscrire des contrats d’assurance : aujourd’hui la santé, mais demain la prévoyance, la MRH, la protection juridique…

De nombreuses questions viennent immédiatement à l’esprit.

- Une commune a-t-elle le droit de proposer un bien ou un service marchand à ses administrés ?

- S’agit-il d’une initiative personnelle d’un membre du conseil municipal ou d’une décision officielle dudit conseil municipal ?

- Ou du centre communal d’action sociale ?

- La préfecture de la Drôme a-telle procédé à un contrôle de légalité de la décision prise ?

- Quelle que soit l’autorité municipale responsable, y a-t-il eu un appel d’offres répondant aux règles du code des marchés publics ?

- Ne conviendrait-il pas de rendre publiques les conditions d’intervention de la mutuelle choisie ainsi que toute convention qu’elle aurait pu passer avec la collectivité locale ?

En droit des assurances également, cette initiative soulève des questions.

- Cette commune se livre-t-elle à des activités d’intermédiation en proposant ce contrat de groupe à ses administrés ?

- Une personne morale de droit public a-t-elle le droit de développer de telles activités ?

- Dans l’affirmative, doit-elle et peut-elle s’inscrire sur le registre de l’ORIAS ?

Là encore, le positionnement d’une commune dans la chaîne de distribution n’est pas clair et mériterait de plus amples investigations.

Questions de concurrence


Enfin, comment ne pas s’interroger sur la compatibilité de cette initiative avec le droit de la concurrence ?

Comment ne pas rapprocher ce nouveau cas de figure des débats qui ont entouré les clauses de désignation en protection sociale d’entreprise : même si elle intervient sur des contrats à adhésion facultative, la commune ne devrait-elle pas recommander un contrat plutôt que de le souscrire ?

On le voit, de quelque façon que l’on tourne le problème, ce montage soulève de multiples questions. Reste à savoir qui dans l’État s’estime en charge de les étudier.

Le fait que plusieurs ordres juridiques et plusieurs ministères puissent être concernés explique probablement que personne ne se sente investi du devoir d’instruire ces questions.

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