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03 / 02 / 2014 | 9 vues
Françoise Gauchet / Membre
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TMS : un fléau contemporain

Première cause de maladies professionnelles, les troubles musculo-squelettiques (ou TMS*) touchent tous les secteurs d’activité ou presque. Principalement en cause : l’intensification du travail. Le dernier numéro de la revue FO Hebdo en a fait un dossier spécial particulièrement « éclairant ».

Entre 10 % et 20 % des salariés seraient atteints d’au moins un trouble musculo-squelettique et ces proportions ne cessent de croître.

  • * Étude du réseau expérimental de surveillance épidémiologique des TMS dans les Pays-de-la-Loire (2006).

Que recouvrent les TMS exactement ? On recense diverses pathologies affectant les muscles, les tendons et les nerfs qui permettent le mouvement des poignets, des épaules, des coudes, des genoux, du dos et autres parties du corps.

Les TMS au féminin et au masculin

Les TMS sont plus fréquents chez les femmes que chez les hommes et ce, pour plusieurs raisons. Elles sont plus nombreuses à être concernées par des tâches répétitives, dans des conditions précaires : secteur du nettoyage et industrie agroalimentaire, par exemple. Marie Pezé, psychanalyste et docteur en psychologie, initiatrice de la première consultation « souffrance au travail » en milieu hospitalier en 1997, apporte de son côté l’éclairage suivant : « Si les femmes sont massivement la cible privilégiée des TMS, ce n’est pas tant à cause de leur morphologie ou des facteurs hormonaux, si souvent invoqués, que parce que l’organisation du travail les exclut massivement des postes de conception et de décision ».

Les TMS en quelques chiffres

  • 95 % des maladies professionnelles reconnues pour les salariés agricoles et 80 % des maladies professionnelles reconnues pour les actifs du régime général ;
  • 40 % du coût total des maladies professionnelles pour les actifs du régime général ;
  • 89 % du coût total des maladies professionnelles pour les actifs du régime agricole ;
  • 40 % du coût des traumatismes et maladies liés au travail dans les pays du nord.

Quels sont les secteurs concernés ?

Les secteurs les plus exposés en nombre de TMS déclarés et reconnus sont la grande distribution, l’aide et les soins à domicile, le secteur de la propreté, le BTP, l’agroalimentaire. Les  salariés agricoles de la viticulture, du traitement de la viande et des cultures spécialisées (telles que le maraîchage ou l’arboriculture) sont également très exposés. « Mais tout salarié est potentiellement concerné par les TMS », affirme Salomé Mandelcwajg.

Conception, textile, scieries, plasturgie, fonction publique hospitalière etc. : aucun secteur n’est épargné. Pour la simple raison que l’intensification concerne l’ensemble du monde du travail, y compris les métiers du soin, dans lesquels elle emprunte des chemins inattendus.

« Dans les maisons de retraite, au nom d’une humanisation que l’on ne peut que saluer, il a été décidé d’habiller les personnes âgées tous les jours pour ne plus les laisser en pyjama. C’est une intention louable. Mais c’est très coûteux, physiquement, pour les salariées dont les moyens et le nombre n’ont pas augmenté. D’autant plus que certaines personnes âgées peuvent être difficiles à soulever », explique Annie Deveaux, médecin du travail.

Pour les soins à domicile, les salariées doivent se débrouiller avec des temps d’intervention de plus en plus courts. « C’est un travail intense, fait par des femmes toutes seules. Beaucoup disent qu’elles ne peuvent plus faire chez elles ce qu’elles font chez les autres : faire le ménage, ranger, se coiffer. Tout cela porte atteinte à la qualité de leur vie privée : une femme me confiait récemment ne plus pouvoir porter ses petits-enfants », reprend le Docteur Deveaux.

Quels remèdes, avec quels partenaires ?

Pour faire chuter la prévalence des TMS, plusieurs types de mesures doivent être envisagés de façon concomitante. Des mesures techniques pour commencer, qui doivent porter sur les facteurs de risques biomécaniques (les efforts, les positions angulaires extrêmes, la répétitivité des gestes). Dans ce cadre, on peut alléger le poids des masses manipulées, adapter la hauteur des postes de travail, ajouter des assistances physiques, utiliser des matériaux absorbant les vibrations etc.

Des mesures organisationnelles ensuite, avec notamment l’apprentissage de gestes et de mouvements justes pour soulever et transporter les charges. On peut par exemple apprendre à solliciter les jambes, qui sont les segments les plus puissants du corps, plutôt que les bras ou le dos. Ou encore changer les cadences de travail. Mais pour remédier aux TMS, il n’existe aucune solution toute faite. À chaque fois qu’une pathologie se déclare, c’est la situation de travail (unique) de la personne concernée qu’il faut revoir. « Il faut aller là où le boulot se fait », martèle un membre du secteur protection sociale de la confédération.

  • « Comment faites-vous votre travail ? Où avez-vous mal ? »


Pour pouvoir appréhender cette réalité très concrète, il est nécessaire de faire appel à une analyse ergonomique et ergomotrice du duo homme/travail. Pour cela, les employeurs peuvent se tourner vers les services de santé au travail, notamment en interentreprises.

Les ergonomes sont habilités à venir établir un diagnostic et rechercher des solutions. Selon Odile Riquet. « il faut se retrouver autour d’une table, avec de vraies marges de manœuvre ».

Il faut que les médecins du travail comprennent l’engagement subjectif dans le travail ». Pour Salomé Mandelcwajg il faut aussi « revenir à une organisation collective et en finir avec les objectifs personnels et les rémunérations au mérite ».

Les instances représentatives du personnel (IRP), les délégués du personnel, les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), la médecine du travail etc. sont autant de structures « qui peuvent aider et alerter sur les TMS. Elles peuvent être une force de proposition pour mettre ces pathologies sur le devant des négociations. Même si l’employeur reste le vrai responsable de la santé et de la sécurité au travail », ajoute Salomé Mandelcwajg.

Pour inciter les employeurs à revoir leur organisation, d’aucuns défendent « des incitations publiques beaucoup plus drastiques, avec des ristournes sur les investissements par exemple ».

Pour tout contact :
Salomé Mandelcwaig, assistante confédérale au secteur protection sociale > 01 40 52 84 55

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