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15 / 05 / 2020 | 347 vues
Philippe Grasset / Abonné
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Si tous les agents ne sont pas faits pour le télétravail, tous les managers ne le sont pas non plus...

Le 7 mai, un groupe de travail s’est tenu en audioconférence avec le fédérations syndicales sur ce sujet majeur dans le contexte actuel.
 

Sujets à l'ordre du jour :

  • Le bilan du recours au télétravail durant l’état d’urgence sanitaire et les perspectives,
  • Le projet d'enquête en lien avec l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT)
     

Nous constatons que, à la « faveur » de la crise sanitaire actuelle, le télétravail s'est durablement installé dans notre environnement professionnel. Les situations sont très diverses selon les directions mais il est certain que le télétravail doit rester le mode de travail à privilégier, voire à amplifier, dans la période de « déconfinement » pour préserver la santé de tous.
 

Bilan du recours au télétravail
 

Le recours au télétravail dans l’urgence, qualifié de travail confiné par l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail, s’est imposé aux agents et aux directions hors de tout cadrage formel, engendrant des problèmes techniques (manque d’ordinateurs, difficultés de connexion et logiciels inadaptés) avec, en parallèle, une disparition du collectif de travail.
 

Notre fédération avait regretté l’absence de données pour la DGDDI (Douanes), c’est chose faite puisque le nombre de télétravailleurs (environ 5 000) apparaît dans les statistiques depuis début mai.
 

Ils doivent pour la majorité d’entre eux travailler en mode dégradé en utilisant leur matériel personnel. La direction a reconnu avoir fait un gros effort d’adaptation fonctionnel et managérial, pour gérer la situation au mieux. En revanche, elle a indiqué avoir mobilisé son réseau (en cours de création) de psychologues du travail pour diffuser les « bonnes pratiques », qui ont pu être reprises dans certains des « flash(es) agents » diffusés quotidiennement.
 

La DGFIP estime que le bilan de la période est plutôt positif ; il faut souligner l’investissement des équipes informatiques pour mettre des matériels à disposition mais aussi adapter des applications, avec la mise en ligne de formations à distance. De nouvelles demandes de télétravail continuent d'arriver dans les directions, refusées par manque de matériel disponible.
 

Néanmoins, nous estimons que nombre d’entre elles sont motivées par la peur de revenir dans les services sans les protections nécessaires. Nous avons également pointé des dérives dans le management : « flicage » ou volonté de faire basculer les agents en ASA, sous prétexte qu’ils ne travailleraient pas ou pas assez.
 

Pour l’INSEE, 80 % des agents possédaient déjà un poste nomade professionnel et ont donc aisément basculé en télétravail. Cette situation a généré des problèmes d’accès au réseau. La direction a instauré des outils collaboratifs : Zoom, des espaces dédiés à la prévention des risques et un accompagnement des encadrants. La création d’un extranet a permis à tous les agents d’avoir accès à l’information. L’envoi d’un questionnaire a fait ressortir la problématique des TMS, pointée par 40 % des agents, donc celle de l’ergonomie des postes de travail.
 

La CCRF avait déjà procédé au renouvellement du matériel informatique avant la crise également, donc 90 % des agents sont en télétravail. Mais attention, ce chiffre ne concerne que la centrale et les services à compétence nationale. En effet, les agents perdus dans les affres des directions interministérielles n’ont pas du tout le même ressenti, leur situation complexe et difficile a été pointée par nos soins lors de l’audioconférence avec Bruno Le Maire.
 

Comme nous avions pointé l’attitude de la DGE, où les agents n’ont pas été contactés que ce soit sur leurs missions ou la situation liée au covid-19 pendant presque un mois. En revanche, cette direction a été plus prompte à leur envoyer un courriel exigeant de poser des jours de congés avant le 23 mai !
 

La présidente a confirmé que le télétravail devait être privilégié après le 11 mai, d’où la décision des ministres de continuer le déploiement de matériels informatiques (5 000 portables commandés en attente de livraison et conversion de postes fixes).
 

Cependant, elle précise qu’il y a une nécessité de recréer des collectifs, notamment pour les cadres qui seront amenés à progressivement revenir en présentiel. Ce ne devrait cependant pas être massif et généralisé. Le secrétariat général va travailler à adapter et enrichir la fiche sur les « conseils pratiques sur le télétravail », notamment en enrichissant la partie consacrée aux managers.
 

Sur la question de la formation, si l’e-formation apparaît comme une solution plus simple, le télétravail doit être inclus dans la formation obligatoire de tous les agents et en formation continue pour les encadrants.
 

Le projet d'enquête sur le télétravail en lien avec l’ANACT
 

Compte tenu des difficultés à déterminer la liste des destinataires et afin d’éviter les biais d’un échantillonnage, les fédérations ont demandé que ce questionnaire soit adressé à tous les agents des MEF. Chaque agent étant en mesure de juger s’il doit répondre ou non
 

Cette enquête a été conçue par le secrétariat général avec l’appui de l’ANACT. Elle comporte 4 éléments : des questions préliminaires, la nouvelle organisation du travail, le nouveau collectif de travail et des pistes d’améliorations pour la sortie de crise.
 

Notre organisation syndicale a demandé à ce que ce questionnaire soit « genré » et qu’il intègre la problématique de la garde d’enfants.
 

La partie sur la nouvelle organisation du travail aborde les outils, l’organisation, les relations avec les collègues et le soutien/accompagnement.
 

En l'état, certaines questions sont beaucoup trop vagues, notamment celles sur les outils. Il faut différencier les moyens informatiques, mis ou non à la disposition des agents, des outils numériques : logiciel, VPN…


De la même façon, afin d’avoir des résultats cohérents et exploitables, certaines questions ne devraient être ouvertes qu’aux encadrants. Enfin, l’agent pourra s’exprimer sur les pistes d’amélioration à mettre en place de son point de vue.
 

Le CHSCT-M a passé une convention avec l’ANACT qui aborde le thème du télétravail sous l’aspect des conditions de travail et de la prévention des risques.
 

Pour  l’ANACT, il convient de différencier le télétravail stricto sensu du travail « confiné » mis en place pendant la crise sanitaire mais la situation n’est pas pire ou différente que celle observée dans d’autres environnements professionnels.
 

Sur le vécu de chacun, le questionnaire est une première étape qui doit être suivie d’un retour d’expérience, d’un recensement des aléas et des difficultés rencontrés quotidiennement pour affiner l’analyse.
 

L'ANACT souligne également la nécessité de ne pas réfléchir uniquement au télétravail mais aussi à l’organisation globale du travail qui va être affectée par cette situation.
 

Elle propose plusieurs thèmes : réfléchir au matériel et aux outils nécessaires, à l’accompagnement des collectifs de travail, y compris des collectifs propres des « managers » et aux différents risques.
 

Le secrétariat général de Bercy propose d’établir une fiche de « processus » et méthodologique afin de préciser ce que l’intervention à venir de l’ANACT pourrait être pour le prochain groupe de travail de juin.

 

Dans le « monde d’après », le télétravail va devenir un élément incontournable dans notre organisation de travail, qui ne doit pas s’imposer aux agents. Il doit être encadré et volontairement choisi, par des agents ayant pleinement et concrètement mesuré ses conséquences psychologiques et pratiques.
 

Il doit mener à une adaptation des modes d’organisation du travail et à une évolution des pratiques managériales. Si tous les agents ne sont pas faits pour le télétravail, tous les managers ne le sont pas non plus.

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