Participatif
ACCÈS PUBLIC
22 / 07 / 2013 | 5 vues
Franck Mikula / Membre
Articles : 34
Inscrit(e) le 22 / 04 / 2009

Nous voulons un accord sur la qualité de vie au travail chez Air France

Notre PDG annonce dans la presse une nouvelle phase de restructuration et la négociation de mesures lourdes pour septembre.

Avant que la direction ne cherche quelles économies elle pourrait encore nous faire avaler, nous avons à l'UNAC une vraie bonne idée. Air France ne devrait-elle pas rentrer dans une négociation sur la qualité de vie au travail afin de répondre à des attentes fortes des salariés : être mieux reconnu dans son travail et mieux équilibrer vie professionnelle et vie personnelle, sujet plus que jamais d’actualité dans ce contexte de crise et d’efforts consentis par l’ensemble des salariés.

Les navigants cumulent les sources de souffrances : la délocalisation, l’isolement, les contraintes familiales, les problèmes de sûreté, les déroutements, les agressions à bord ou en escales, les décès à bord, les turbulences, les séquelles de l’AF 447, les troubles du sommeil etc.

Mais s’ajoute à ces souffrances un stress, créé par le déséquilibre entre la perception que le PNC a des contraintes inhérentes à son métier et le constat d’une réalité différente, symbolisée par ce que l’on appelle à l’UNAC « la qualité empêchée » : le PNC souffre de ne pouvoir « bien faire son travail » en raison des non-conformités récurrentes à bord et d’un espace de travail souvent inadapté et en raison de cabines mal conçues.

Un exemple qui illustre ce sentiment, les vols affrétés pour ETIHAD :

  • service à la carte avec plateaux dégroupés et obligation de confectionner des sets de couverts ;
  • couverts insuffisants et simplement essuyés par le PNC sur une serviette avant d’être redonnés à un autre client, histoire de propager les virus de manière optimale ;
  • le PNC doit déposer une cassolette, trop souple, à mains nues sur le plateau.

De même, la réduction prochaine des COMPO PEQ sur LC a été négociée, associée à une modification du service consistant principalement en la réduction de la taille du plateau (jetable) générant moins de manipulations. Pourtant l’entreprise s’obstine à vouloir maintenir certains plateaux au format actuel (KSML, « à la carte ») ce qui obligera le PNC à de nouvelles manipulations annihilant totalement les bénéfices escomptés des nouvelles méthodes de service.

  • Ces exemples, parmi tant d’autres, expliquent pourquoi il n’est pas étonnant de constater une augmentation du nombre de membres du PNC souffrant de syndromes anxio-dépressifs : en 2012, près de 300 de nos collègues ont dû « bénéficier » d’un suivi psychologique personnalisé. L’entreprise prendra-t-elle un jour en compte cette souffrance ?

C’est toute l’organisation de la production des navigants qui devrait être repensée autour des conditions de travail et des conséquences à long terme sur la santé du PNC. L’ensemble de la chaîne managériale doit aussi être impliqué fortement dans la prévention des risques psychosociaux. Ainsi, pourquoi la rémunération de nos directeurs ne serait-elle pas indexée à des critères sociaux plutôt que de n’être indexée qu’aux résultats économiques et financiers ?

La mise en place de tels critères pousserait la direction à écouter un peu plus les acteurs de terrain que nous sommes, salariés comme représentants des salariés. Bref, tout le contraire de ce qui se fait aujourd’hui. Pour preuve, alors que le président s’est engagé à associer les représentants du personnel dès la conception des cabines afin d’éviter de reproduire les expériences désastreuses des 35J et 42J, des discussions sont menées, sans nous, sur les aménagements des futurs avions (BEST, B787 etc.).

Voilà pourquoi le PNC ressent un découragement, une lassitude, un désengagement, pire une souffrance. Il n’est pas écouté et encore moins entendu et pourtant c’est bien lui, et de plus en plus le seul, qui est en contact avec les clients.

Une autre souffrance ressentie est la difficulté à équilibrer vie privée et vie professionnelle. Le projet PNC a accouché de « facilités » comme les escales préférentielles (tellement efficaces qu’elles n’ont que le bénéfice d’exister) et les outils de production ne permettent toujours pas un lissage de notre activité entre 2 périodes de repos mensuel. Une fois, on a peu l’impression de travailler ; une fois, on ne sait pas comment faire pour survivre à l’enchaînement des vols.

Quand l’entreprise mettra-t-elle en place, sur les bases de province, une visibilité des plannings sur 8 semaines glissantes, comme elle s’y était engagée ? Comme par hasard, la direction n’a pas recueilli les 20 % de volontaires pour le rythme 6ON/3OFF/S6...

Pourtant, de vraies solutions existent : le compteur CJR sur moyen courrier permet la pose sous forme de DDA des RADD reportés, le développement d’un outil efficace de production qui permettrait la pose de plus de DDA vol, plus de DDA repos, simultanément, et optimiserait nos plannings en lissant notre activité et donc notre fatigue. 

La qualité de vie au travail conditionne non seulement le bien-être des salariés mais également leur productivité. Quand la direction réalisera-t-elle que plus le PNC est heureux de faire son travail, plus les passagers seront contents de voyager avec notre compagnie ?

D’autre part, selon l’ANACT (Agence nationale d’amélioration des conditions de travail), 37 % des salariés français manquent de reconnaissance. La problématique du manque de reconnaissance est un élément important à prendre en compte lorsque, comme à Air France, on a l’ambition de vouloir appréhender les risques psychosociaux ou d’éviter leur prolifération. Des études montrent qu’un manque de reconnaissance multiplie par quatre le risque de vivre une détresse psychologique favorisant ainsi l’apparition du « burn-out ».

Il serait notamment judicieux de s’intéresser, sérieusement, pour une fois, aux idées reçues telles que « pas besoin de reconnaissance, trop de reconnaissance accentue l’ego ». Pour autant, se contenter d’injecter une forme d’évaluation permanente dans un système ayant pour modèle « la carotte et le bâton » serait un remède pire que le mal. La direction doit enfin prendre de la distance avec ce trouble obsessionnel compulsif dont elle souffre depuis trop longtemps...

C’est ce modèle qu’il faut changer, l’outil suivra.

Chacun comprendra que ces évolutions radicales mais indispensables prennent du temps et ont un coût. C’est pourquoi nous disons qu’il faut dès à présent s’atteler à trouver les solutions. Il faut prendre le temps nécessaire d’une montée en charge graduée, avec l’ambition forte qu’un jour, peut-être, à défaut de devoir toujours guérir des drames humains dans l’urgence, Air France saura les prévenir.

La direction doit s’attaquer à la souffrance quotidienne.

La qualité de vie au travail se définit comme :

  • la conciliation vie professionnelle / vie privée : rythmes et horaires de travail, accès aux services, transports, garde d’enfants ;
  • la qualité de l’organisation du travail : qualité de la prescription, capacité d’appui de l’entreprise dans la résolution des dysfonctionnements, démarche de progrès, réduction de la pénibilité, anticipation de la charge de travail ;
  • la qualité des relations sociales et de travail : reconnaissance, respect, écoute, information et participation aux décisions.
Pas encore de commentaires