Participatif
ACCÈS PUBLIC
25 / 06 / 2018 | 18 vues
Didier Cozin / Membre
Articles : 167
Inscrit(e) le 23 / 07 / 2012

Les entreprises de plus de 50 salariés s'exposent à d'importantes pénalités de formation à partir de mars 2020

Si la loi de formation 2018 comporte encore de nombreuses impasses sociales (comme ce CPF « universel » mais toujours aussi complexe et non financé), elle met les « grandes » entreprises face à leurs responsabilités éducatives.

La loi de mars 2014 avait introduit une obligation de formation avec des pénalités en cas d'absence de formation sur six années. Trois conditions étaient posées (en plus de l'organisation bisannuelle des entretiens professionnels) avec au moins deux conditions devant être remplies.

Les trois conditions fixées dans la loi de mars 2014 :

  • une formation quelle qu'elle soit (y compris une formation obligatoire, sécurité ou une simple journée d'information),
  • une promotion professionnelle ou une progression salariale (et l'ambiguïté du texte de loi a fait que de nombreuses entreprises ont conclu que les NAO comptaient dans cette condition),
  • une formation certifiante ou un élément de certification acquis au cours des six années précédentes (typiquement une formation de type CPF).

Pour simplifier : afin de ne pas encourir 3 000 euros de pénalité, l'entreprise devait prouver que chacun de ses salariés avait bénéficié sur six ans (2014-2020) :

  • d'une formation certifiante ou diplômante,
  • et/ou d'une promotion professionnelle (accompagnée d'une augmentation de salaire).

Des pénalités financières et des abondements correctifs (en heures de CPF) étaient encourus par les entreprises de plus de 50 salariés (représentant 50 % des effectifs salariés en France, soit 7 millions de personnes).

La réforme de 2018, votée en première lecture le 19 juin, renforce et simplifie ces nouvelles obligations de formation (article L.6323-13).

Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le salarié n’a pas bénéficié, durant les six années précédant l’entretien mentionné au II de l’article L. 6315 :

  • des entretiens prévus au même article L. 6315-1,
  • et d’au moins une formation autre que celle mentionnée à l’art.L.6321-2 (c'est-à-dire autre qu'une action de formation suivie pour assurer l'adaptation au poste de travail ou liée à l'évolution ou au maintien dans l'emploi).

Un abondement est inscrit à son compte et l’entreprise verse, dans le cadre de ses contributions au titre de la formation professionnelle, une somme dont le montant, ne peut excéder six fois le montant annuel mentionné à l’article L. 6323-11 (soit six fois 500 € ou 3 000 €).

Mi-2018, entre 50 et 70 % des salariés employés dans les « grandes » entreprises ne remplissent pas les conditions fixées par la loi de mars 2014.

Sur un effectif type de 1 000 salariés, si 700 salariés n'ont pas suivi de formations certifiantes ou diplômantes, les pénalités à payer (aux URSSAF désormais et sous le contrôle des organisations syndicales) seront de deux millions d'euros environ (soit 5 à 6 années de budget total de la formation).

Comment s'en sortir et comment remplir les obligations de formation sans faire sauter la banque  ?

Solution n° 1 : s'approprier au plus vite (dès la rentrée 2018) le compte personnel de formation en le faisant vivre dans toutes les organisations (le CPF, comme le DIF autrefois, devrait-être promu, encouragé et abondé par l'employeur) :

  • toutes les formations du CPF sont certifiantes (y compris 20 heures d'anglais ou d'informatique suivies du passage d'une certification) et ce sera donc la solution la plus simple et la plus rapide ;
  • la VAE et les bilans de compétences sont aussi éligibles au CPF ;
  • enfin, il suffira d'acquérir un élément d'une certification (socle des compétences, par exemple) pour ne pas encourir cette pénalité de 3 000 €.


Solution n° 2 : croiser les doigts et imaginer qu'en 2020, les pouvoirs publics accorderont un délai de grâce aux entreprises qui n'auront pas trouvé le temps de développer les compétences de leurs salariés durant six ans.

Le problème de la formation du personnel dans les entreprises de moins de 50 salariés reste énorme.

Comme l'a démontré une récente étude du CEREQ moins du un quart des TPE réalisent les entretiens professionnels (pourtant obligatoires pour tous depuis 2014) et encore moins de salariés auront sans doute bénéficié en six ans d'une formation certifiante ou d'une évolution professionnelle. Le droit du travail étant le même pour toutes les organisations, est-il normal que le droits et obligations de formation diffèrent en fonction de la taille des entreprises ?

Afficher les commentaires

Bonjour, Dans votre billet, vous traduisez "une formation autre que celle mentionnée à l’article L.6321-2" par une formation "autre qu'une action de formation suivie pour assurer l'adaptation au poste de travail ou liée à l'évolution ou au maintien dans l'emploi". Pour ce faire vous utilisez l'actuelle rédaction du L.6321-2. Or le projet de loi réécrit totalement cet article qui est appelé à viser désormais uniquement: "Toute action de formation qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaire". Cela ouvre donc un champ beaucoup plus large pour permettre à une entreprise de satisfaire son obligation et ce d'autant plus que la définition de l'action de formation va par ailleurs être très sensiblement assouplie. Cordialement