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25 / 09 / 2017 | 1 vue
Didier Cozin / Membre
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La farce du compte personnel de formation continue désormais dans la fonction publique

Peu de personnes lisent le Journal Officiel la veille des élections présidentielles, pourtant dans le JO publié le 10 mai 2017 (daté du 6 mai, veille du second tour des présidentielles) les Pouvoirs Publics se sont crus obligés de naufrager un peu plus la formation des fonctionnaires avec un décret improvisé et lacunaire sur le CPF des six millions de fonctionnaires et assimilés.

Ce décret, si urgent qu'on ne pouvait attendre la fin de la période électorale, tente d'expliquer comment en finir avec le DIF (Droit à la formation) des fonctionnaires, DIF qui n'aura jamais été mis loyalement en œuvre en 10 années par les 3 fonctions publiques (trop coûteux, trop anticonformiste, trop dérangeant des habitudes de l'administration)

Le CPF dans la fonction publique, une énième déclinaison du DIF mais cette fois dans la plus totale improvisation : on a oublié les heures !

Dans ce décret, daté du 6 mai 2017, il n'est nulle part fait mention du nombre d'heures de CPF dont disposeraient les "heureux" titulaire du CPF (qui seront rarement de réels bénéficiaires).
Si le capital annuel d'heures de formation dans le DIF était connu et communiqué (20 h dans le privé comme dans le public), si le nombre d'heures de CPF est inscrit dans la loi du 5 mars 2014 « Art. L. 6323-11. − L’alimentation du compte se fait à hauteur de vingt-quatre heures par année de travail temps complet jusqu’à l’acquisition d’un crédit de cent vingt heures, puis de douze heures par année de travail à temps complet, dans la limite d’un plafond total de cent cinquante heures." avec le CPF dans la fonction publique il en est autrement et par négligence (ou incompétence) on a donc publié ce décret lacunaire et impossible à mettre en œuvre.

Les autres points de ce décret pochette surprise sont à l'avenant, une longue litanie  de limitations qui réduisent à néant les capacités d'initiative des agents publics en matière de formation

  • Article 2 : "L'utilisation du CPF porte sur toute action de formation... ayant pour objet l'acquisition d'un diplôme, d'un titre, d'un certificat de qualification professionnelle ou le développement des compétences nécessaires à la mise en œuvre du projet d'évolution professionnelle".

Ce qui signifie qu'aucune formation n'est possible sans projet certifié et validé d'évolution professionnelle, le CPF servira d'alibi ou de temps pour préparer un concours.

  • Article 6 : "L'agent sollicite l'accord écrit de son employeur sur la nature, le calendrier et le financement de la formation souhaitée, en précisant le projet d'évolution professionnelle qui fonde sa demande".


La caractéristique principale du CPF était la possibilité de partir en formation sans solliciter l'avis de son employeur. Cette opportunité de changement professionnel et d'initiative personnelle ("Compte Personnel") disparaît avec le CPF dans la fonction publique.

Le fonctionnaire restera donc pieds et poings liés face à sa hiérarchie qui daignera (ou non) lui accorder le droit de se former.

L'argent du CPF, l'autre grand absent du décret


Comme aucun budget ne pourra être libéré pour le CPF des fonctionnaires (tout comme autrefois pour leur DIF) et que les OPCA (organismes collecteurs des fonds de la formation) n'existent pas dans la fonction publique (l'Etat étant son propre assureur et financeur, on nous le répète assez souvent) il est évident qu'aucune administration ne disposera du moindre sous pour la réalisation de CPF pour leurs agents.

Tout comme avec le DIF depuis 10 ans, on déplorera, en 2020 ou en 2025, que le CPF sera resté anecdotique, un alibi ou un leurre formation.

Pour finir avec ce décret impressionniste et son (involontaire) sens de l'humour un extrait de l'article 6 prouvant que pour l'administration il n'y a pas de petites économies

« En cas de constat d'absence de suivi de tout ou partie de la formation sans motif valable, l'agent doit rembourser les frais mentionnés au premier alinéa. »

Ce qui signifie que si un intrépide fonctionnaire en venait malgré tout à partir en formation CPF, et s'il était absent sans motif « valable » (le motif valable étant sans doute laissé à la libre appréciation de sa hiérarchie) il devra rembourser le prix de sa formation.

On peut imaginer dans ces conditions que les personnels de catégorie C auront vite compris et intégré ce message : «  la formation n’est pas faite pour vous et si vous veniez à vous absentez durant votre formation on vous fera regretter votre demande de CPF ».

 

 

 

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