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28 / 07 / 2017 | 131 vues
Olivier Brunelle / Abonné
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Formation à la DGFiP : l'état d'urgence

Dans les lignes directrices, le directeur général affirmait que « la formation doit se maintenir à haut niveau en s’adaptant ». Le bilan de la formation 2015 et les pistes de réflexion esquissées depuis démontrent à l’évidence que, loin d’être considérée comme un investissement indispensable à une administration d’expertise et d’excellence, la formation professionnelle est désormais une charge à réduire à tout prix.

L’examen du bilan annuel de la formation professionnelle est énuméré parmi les points de compétence du comité technique. Cet exercice s’avère néanmoins particulièrement compliqué à la DGFiP.

Tantôt le sujet est noyé dans des comités techniques de réseau (CTR)  à l’ordre du jour pléthorique, tantôt habillement glissé au milieu de projets dont l’administration sait d’avance qu’il mèneront à un dialogue compliqué avec les organisations syndicales nationales, tantôt primé par les priorités de la direction générale, il est toujours examiné tardivement voire pas du tout comme cela a été le cas du bilan 2014.

Le bilan 2015 de la formation professionnelle à la DGFiP n’a pas échappé à l’usage. Programmé lors du CTR début 2017, son examen n’a finalement été possible que dans le cadre d'un  groupe de travail fin mars sur l’insistance des organisations syndicales de la Direction générale des finances publiques. C'est dire...

Toutes ces péripéties pourraient n’être qu’anecdotiques. Elles sont hélas le symbole de discussions compliquées avec la direction générale. Pour nous, la formation professionnelle devrait être un sujet consensuel pour peu que toutes les parties considèrent celle-ci comme un investissement au service d’une administration d’excellence qui ne vit que de l’expertise et de la technicité de ses agents et de ses cadres.

La direction générale a l’habitude de rappeller qu’elle parvient à maintenir les dépenses de formation à hauteur de 7 % de la masse salariale quant le secteur bancaire n’y consacrerait que 4 %.

C’est oublier un peu vite que le système de formation du secteur bancaire est tout entier organisé autour de la promotion interne. C’est perdre de vue que la DGFiP y consacrait 8,77 % en 2010. C’est taire que la fonction publique d’État (hors Éducation nationale) se situe à 6,7 % et que, sur le périmètre ministériel, ce ratio s’élevait en 2015 à 7,8 %.

Mais c’est également négliger le fait que le choix d’un tel indicateur en dit long sur l’ambition de la DGFIP : rapporter un poste de dépense à la masse salariale est bel et bien (quoi qu’on en dise) un ratio de coût quand l’investissement, lui, se rapporte au chiffre d’affaire. Exprimer de cette manière l’effort de formation de de la DGFiP revient à la désigner à l’ensemble du réseau comme une charge à contenir, voire à réduire. Et ça, la DGFiP sait le faire !

Dès lors, comment s’étonner que, de bilan en bilan et année après année, les chiffres trahissent les véritables intentions de l’administration ? Le bilan de la formation professionnelle 2015 s’inscrit clairement et dans tous les domaines dans le prolongement des précédents.

Concours et préparation

La direction générale se félicite de l’attractivité confirmée des différents concours. Il est vrai que les chiffres globaux semblent le confirmer avec une progression de 9,6 % par rapport à 2014, soit plus de 77 000 inscriptions enregistrées en 2015.

Pour nous, si les concours restent effectivement attractifs, ils le doivent aussi beaucoup au contexte économique qui, malheureusement, ne s’arrange guère. Par ailleurs, si cette attractivité est réelle, une lecture différenciée par concours ou au regard de l’origine interne ou externe des postulants permet une lecture plus nuancée. Si le nombre d’inscrits aux concours externes augmente de 17,46 % avec plus de 50 000 inscrits en 2015 et une progression de 26 % sur la catégorie A tandis que la catégorie C ne progresse que de 13 %, en interne, le nombre d’inscrits reflue légèrement : -1,68 % en avoisinnant les 22 500 inscrits en 2015 et recule de 3,17 % sur les examens professionnels, avec 5 008 inscrits en 2015, contre 5 172 en 2014 et où seul l’examen professionnel de géomètre enregistre une progression (+19,6 %).

Le nombre d’inscrits au concours d’inspecteur principal est en diminution de 10,19 % et traduit une fois encore le malaise d’une partie des inspecteurs, constatant une réduction constante du nombre de postes offerts au concours et voyant s’assombrir les perspectives de déroulement de carrière.

Les concours internes de catégorie B enregistrent également une baisse de 4 %

Pour notre syndicat, cette évolution des concours internes est un symptome supplémentaire du mal-être des agents de la DGFiP. Les suppressions d’emplois à répétition, la diminution constante du nombre de postes offerts aux concours, la réduction drastique des plans de qualifications et les règles d’affectation avec obligation de mobilité contribuent à dissuader, voire à décourager nombre de candidats.

Par ailleurs, les difficultés persistent sur les concours informatiques où les taux d’échec peuvent même mener à recruter moins d’agents que de postes offerts au point d’inciter la direction générale à envisager une évolution des épreuves jugées dissuasives pour une partie des candidats.

Le même réflexe défensif est à l’œuvre pour faire face aux difficultés d’attractivité des métiers du cadastre. Là encore, c'est par la modification des épreuves de concours que la Direction générale prétend renforcer l’attractivité des métiers du cadastre.

Mais la tentation d’aller chercher les compétences à l’extérieur de la DGFiP n’est jamais très loin.

La lecture des chiffres du bilan 2015 montre un haut niveau persistant d’absentéisme aux concours.

Plus d’un candidat inscrit sur 3 est absent le jour des épreuves. Ce chiffre monte même à 1 candidat sur 2 en catégorie C.

Un tel niveau d’absentéisme doit interroger nos modes d’organisation des concours tant en termes de calendrier qu’en termes de localisation des centres d’examen. La nouvelle cartographie des centres d’examen mérite à ce titre d’être réexaminée au regard des difficultés rencontrées par certains candidats sur l’ensemble du territoire y compris en Île-de-France.

Les mesures coercitives annoncées unilatéralement en fin de CTR consistant à organiser le même jour les épreuves des concours internes et externes ou à limiter à 5 le nombre de tentatives pour réussir le concours d’accès à une catégorie resteront sans effet sur le niveau d’absentéisme. Nous ne croyons pas au théorème du pharmacien qui veut que pour que le remède soit efficace, il faut qu’il ait mauvais goût.

Ces dispositions obèrent très directement la promotion interne des agents de la DGFiP, remettent en cause les orientations prises pour améliorer la parité hommes-femmes méconnaîssent les difficultés personnelles et professionnelles des préparants aux concours, notamment des agents chargés de famille.

C’est la raison pour laquelle notre syndicat a proposé aux agents de massivement signer une pétition intersyndicale qui sera remise au directeur général à l’occasion du comité technique de réseau du 6 juillet.

Depuis plusiseurs années, nous attirons l’attention de la DGFiP sur la nécessité d’assurer plus efficacement la promotion des missions et des concours de la DGFiP. L’administration devrait donc se donner les moyens de mieux communiquer sur les concours. Les contacts réguliers du syndicat avec les candidats confirment que leur information est loin d’être toujours satisfaisante.

Les partenariats extérieurs avec des grandes écoles, des universités, des IUT et les IEP (comme la présence dans les salons ou la participation à des colloques) doivent être renforcés en s’appuyant sur la proximité qu’offrent les responsables locaux de formation.

Mais la promotion des concours mérite également d’être renforcée en interne. Certes, la mise en ligne d’information sur intranet permet l’information des candidats à la préparation puis aux concours mais chaque année un nombre non négligeable d’agents absents ou n’ayant pas pris connaissances des dates d’ouverture ou des dates limites d’inscription se voient refuser leur inscription pour quelques jours de retard.

Pour nous, chaque agent devrait se voir notifier par courriel ou par courrier qu’il remplit les conditions pour préparer ou s’inscrire aux différents concours. Libre à lui d’y donner suite ou non. Les moyens modernes de communication doivent permettre un tel accompagnement sans creuser les déficits publics.

L'année 2015 a été celle de la réinternalisation du concours commun C, effective en 2016 et ayant nécessité de lourds travaux organisationnels et techniques, comme de la préparation à l’extension de la téléinscription aux concours internes et examens professionnels désormais opérationnelle.

En 2015, plus de 10 000 agents se sont lancés dans la préparation d’un concours ou d’un examen professionnel et un peu plus de 5 200 ont participé à un ou plusieurs stages présentiels. Variable selon les préparations, le nombre global d’inscrits aux préparation à distance a diminué de 9,5 % en 2015. L’inscription aux cycles présentiels, lui, affiche une baisse de 12,1 % (après des baisses respectives de 10 % pour les préparations et 28 % pour les cycles présentiels en 2014).

Les préparations continuent par ailleurs d’exercer un effet important sur la réussite des agents : un contrôleur engagé dans la préparation a ainsi 3,5 fois plus de chances de réussir le concours d’inspecteur qu’un « non-préparant ».

Là encore, la direction générale a entrepris de « rationaliser » les cyles présentiels en 2015, ce qui se traduit concrètement dans la moitié des préparations par une diminution des durées de stages : - 5 jours pour inspecteurs, -1 jour pour contrôleur et -1 jour pour contrôleur principal.

Rappelons par ailleurs que ces durées avaient déjà été réduites du fait de l’intégration des galops d’essais à laquelle nous nous sommes opposés.

On ne peut se saisfaire de voir qu’un tiers seulement des inscrits à la préparation au concours d’inspecteur accède au troisième stage présentiel. Pour le syndicat, le rôle de la préparation n’est pas de sélectionner ceux qui sont le plus susceptibles de réussir le concours mais bien d’amener le maximum d’agents au niveau du concours. Préparer les concours dans les conditions de travail actuelles en ayant charge de famille relève clairement de la gageure, quel que soit le niveau de la motivation individuelle. La Direction générale devrait y songer, a fortiori lorsqu’entre 50 et 70 % des préparants sont des préparantes.

Une telle sélectivité finit par subrepticement transformer la préparation en préselection.

Notre syndicat ne croit pas non plus au théorème du psychanalyste qui veut que la cure soit plus efficace si l’on paye et a réitéré sa revendication de la gratuité totale des préparations.

Formation initiale

La formation initiale est le sujet qui aura occupé l’essentiel des discussions avec l’administration, au point d’éclipser le plus souvent les autres secteurs de la formation professionnelle. En 2012, de longs et fastidieux échanges avaient permis d’aboutir à une architecture des formations initiales fusionnées en trois temps carrière/dominante/premier métier, respectivement de 12 mois pour les inspecteurs, 7 mois pour les contrôleurs et 6 semaines pour les agents administratifs. Bien que largement perfectible et résultant d’une addition de soustractions, cet équilibre permettait de concilier les connaissances nécessaires au déroulement d’une carrière et l’acquisition des compétences techniques attendues sur le premier métier dans une logique d’entonnoir qui épargnait au stagiaire l’enfermement dans l’employabilité immédiate.

Rappelons que la mise en œuvre de ces formations initiales rénovées n’aurait pas été possible sans l’investissement extrêmement fort des équipes de l’ENFIP dans des conditions loin d’être optimales et enserrées dans un calendrier particulièrement contraint.

La durée de scolarité était par ailleurs émaillée de stages pratiques qui, pour n’être pas véritablement de l’alternance à proprement parler, permettait de découvrir la diversité des structures et des missions puis de confronter les enseignements théoriques à la pratique et à la vie des services. Ces scolarités ont été à plusieurs reprises modifiées pour tenir très partiellement compte des observations des organisations syndicales, des enseignants et des représentants des stagiaires qui d’année en année, de conseil de promotion en groupes de travail ont dressé le bilan des scolarités fusionnées que nous refusait l’administration.

Au-delà de la satisfaction globale des stagiaires mesurée par l’ENFiP, les formations initiales restent encore, 5 ans après, perçues comme excessivement théoriques, extrêmement denses et amputées de la pratique des applications informatiques. Jusqu’à une période récente, ce diagnostic semblait partagé. Les échanges se concentraient donc sur les voies et moyens de « professionnaliser » davantage, de réintroduire de la pratique et la maîtrise des grandes applications informatiques sans lesquelles il n’est plus guère possible de travailler dans les services de la DGFiP.

Quelques chiffres

  • 3 593 agents de catégorie A,B et C ont été formés dans les établissements de l’ENFiP au cours de la scolarité en 2015-2016. Cela représente une baisse de 7,44 %, soit 289 stagiaires de moins par rapport à l’année précédente qui s’explique principalement par la très nette diminution du volume de la promotion des inspecteurs (-35,68 %).
  • Les LEP/LA baisse de 14,29 % avec 354 stagiaires en 2015, contre 413 en 2014.
  • Le nombre d’agent pactes et agents administratifs recule de 9,33 % avec 1730 stagiaires en 2015, contre 1 908 en 2014.

Notre organisation syndicale a défendu ses positions, salué les évolutions qui nous semblaient aller dans le bon sens et dénoncé les atermoiements et carences persistantes. Le syndicat  prétend notamment que l’un des objectifs que doit poursuivre une formation s’adressant à des adultes doit également intégrer la nécessaire conciliation vie professionnelle/vie privée, mieux prendre en compte la vie personnelle des stagiaires et qu’aménager les emplois du temps en évitant de les densifier contribue aussi à l’amélioration des conditions de travail, tout en facilitant les apprentissages.

Notre organisation syndicale a toujours souligné la durée insuffisante et incohérente avec les autres catégories et qui plus est sacrifiée aux impératifs de gestion de la formation initiale des agents administratifs qui doit prioritairement être renforcée. Le doublement de cette durée doit permettre de professionnellement mieux armer ces collègues et faciliterait par ailleurs la recherche de solutions à leur indispensable accompagnement social, aujourd’hui négligé.

De la même manière, nous avons fortement défendu le principe d’une partie carrière, certes à repenser dans son contenu, mais que d’aucuns auraient volontiers sacrifié au nom de la défense de la technicité et s’aperçoivent aujourd’hui qu’ils encourageaient ainsi une logique de métier qui tend à s’imposer.

Car c’est bien cette idée qui transpire des nouvelles orientations de l’administration. Après une phase présentée comme de « réflexions » la DGFiP entend désormais intégralement refonder les formations initiales en commençant dès 2018 par la formation initiale des inspecteurs. Les premières perspectives sont loin d’être neutres. D’abord raccourcie puis menacée, la partie carrière subsisterait sous la forme d’une formation socle dont le contenu reste à batir et à discuter.

La partie dominante disparaîtrait au profit de formations en blocs métier de périmètre plus réduit et axés sur la première affectation. La partie premier métier disparaîtrait en totalité alors que c’était celle qui permettait de véritablement personnaliser les parcours et alternait période de pratiques et retours pédagogiques en établissements. Le stage pratique serait ramassé dans la seconde partie de la scolarité et deviendrait probatoire.

Nous condamnons cette orientation et défendons sa suppression pour toute les catégories de personnel où elle subsiste encore, notamment pour les contractuels handicapés de la catégorie B. Sauf à nous expliquer qu’aurait été constaté un taux structurel d’erreur de casting qui interrogerait lourdement notre appareil de formation, cette disposition scandaleuse ne se justifie absolument pas.

Instruits par l’expérience, nous n'avons aucune raison de penser que cette période de stage dans la direction d’affectation ne se traduira pas comme aujourd’hui pour les stagiaires par une prise de fonction immédiate avec son cortège d’objectifs, de charge de travail et de productivité attendue sans le soutien d’un véritable tuteur de même grade bénéficiant des facilités indispensables à l’exercice cette fonction. Ce regroupement des stages en fin de scolarité dissimule mal un raccourcissement de fait de la formation initiale des inspecteurs.

Enfin, la direction générale envisage la mise en place d’un mouvement de première affectation distinct du mouvement général et basée sur le rang de classement au concours et plus, comme aujourd’hui, sur l’ancienneté administrative.

L’argument de l’administration est la connaissance tardive de l’affectation dans le cycle actuel de gestion. Notre syndicat  partage l’idée que l’incapacité durable à former les stagiaires en l’absence d’information sur le métier qu’ils auront à exercer fait peser sur tout l’appareil de formation un risque mortel. Mais la croissance exponentielle des positions ALD invalide  largement l’argument de la direction générale. 

Notre organisation syndicale a donc revendiqué la disparition préalable de la position ALD sans laquelle ne subsiterait du nouveau dispositif imaginé que les inconvénients : première affectation sur les postes laissés vacants à l’issue du mouvement général, pénalisation des internes en termes de reclassement, choix de première affectation réalisé à l’aveugle en tout début de scolarité en particulier pour les externes.

Pour nous, la disparition de la position ALD conduit nécessairement à repenser un mécanisme des affectations prioritaires plus juste qui pourrait dès lors s’organiser sur la base du fait générateur de la priorité comme le revendique le syndicat. Nos revendications sur l’organisation de deux mouvements de mutations par an et le bénéfice du droit au retour pour tous les promus de C en B offrirait, à l’évidence, y compris sur ce sujet spécifique, des solutions alternatives.

Les discussions doivent encore se poursuivre sans que nous ne disposions à ce stade d'éléments plus précis. Toutefois, la démarche de l’administration qui semble davantage se préoccuper de « la formation initiale de demain » que de celle d’aujourd’hui accompagne son revirement vers l’employabilité immédiate d’une fort inélégante conception du dialogue social consistant à engager les travaux de réécriture et à présenter la réforme au personnel de l’ENFiP, sans l'y associer et sans véritables discussions avec les organisations syndicales.

Pour nous, l’urgence est de répondre aux attentes concrètes des stagiaires et du réseau, pas de nous lancer dans la construction d’une nouvelle cathédrale de la formation initiale. Il est par ailleurs totalement irréaliste d’envisager les formations initales sans davantage les articuler avec la formation continue qui devrait constituer la véritable priorité de la direction générale.

La formation continue

Nous assistons en fait à un étrange renoncement collectif que nourrit une approche absentéiste de la formation professionnelle.

Depuis des années, notre syndicat porte une appréciation extrêmement critique sur cette partie du bilan de la formation. Le millesime 2015 fait apparaiîre une baisse du nombre de bénéficiaire de 30 % que la direction générale explique par la fin de programmes importants de formation à destination de vastes publics. Si cet argument est en partie recevable pour expliquer les variations d’une année sur l’autre, il est inopérant sur une période longue, en quelque sorte corrigée des variations saisonnières.

Depuis 2010, le volume de jours par agents de formation continue a littéralement chuté de 41,07 %, passant de 523 461 jour par agent en 2010 à 308  466 jour par agent en 2015. Le nombre de bénéficiaires, lui, a fortement reculé de 24,19 % sur la même période passant de 258 071 à 195 643.

L’explication qui vient immédiatement à l’esprit est celle des suppressions d’emplois qui frappent si durement la DGFiP au titre de la sinistrement fameuse exemplarité. Or, dans le même temps, les effectifs payés n’ont reculé « que » de 10,46 %. Les causes sont donc à rechercher ailleurs.

Nous assistons en fait à un étrange renoncement collectif que nourrit une approche absentéiste de la formation professionnelle. Celle-ci s’est progressivement installée dans les postes, les services et les directions qui se débattent quotidiennement dans les conséquences de l’insuffisance de moyens humains et matériels.

Les agents s’autocensurent certains qu’ils sont de retrouver le lendemain le travail qu’ils n’auront pu terminer la veille. Les responsables d’unités sont trop systématiquement contraints d’opposer la nécessité de service pour tenter de préserver ce qu’il reste d’exercice des missions. Les formateurs ne disposents plus de la disponibilité nécessaire face à une charge de travail qu’on se refuse à aménager. Les restrictions budgétaires successives conduisent les directions à multiplier les tracasseries ou les mesures dilatoires sur les remboursements de frais ou les délais de route.

Pour nous, ce renoncement est pour la DGFiP un poison lent mais dont les effets seront, à terme, fatals.

La dégradation d’un autre indicateur de la DGFiP dans des proportions comparables aurait immédiatement déclenché une avalanche d’instructions, de notes, d’audits et de plans d’actions. Le reflux d’une année sur l’autre de 14 % du volume de formation continue des professeurs des écoles a immédiatement déclenché un audit du Secrétariat général de la modernisation de l’action publique (SGMAP). Rien de tel à la DGFiP. Loin de réclamer un audit du SGMAP dont le personnel se passe volontiers, le syndicat en appelle à une prise de conscience collective et à une remobilisation de l’ensemble des acteurs pour refaire de la formation continue une priorité.

Le bilan 2015 met très fortement en avant le développement de l’e-formation, vantant l’enrichessement du catalogue et soulignant que 27 326 stagiaires ont pu être formés grâce à l’e-formation. Cours filmé, CLOM etc. : tout y passe ! C’est Tintin en numérique, tout en reconnaissant du bout des lèvres une baisse non chiffrée du nombre d’apprenants par rapport à 2014.

Naturellement, les difficultés rencontrées pour disposer d’un espace spécifique autre que son propre poste de travail, l’insatisfaction des stagiaires de formation initiale, le faible nombre d’apprenants qui suivent la formation dans son intégralité ne sont même pas mentionnées.

N'oublions pas qu’en juin 2015, le directeur de l’ENFiP estimait à plus de 4 millions et demis d’euros les économies liées à l’e-formation lors d’un groupe de travail, le directeur général les a chiffré à plus de 6,6 millions au niveau national devant les n° 1 départementaux, le 25 juin de la même année, en y incluant les « frais de déplacement et les économies de rémunération des enseignants ».

Pour nous, l’e-formation, véritable mantra de l’administration, ne saurait constituer une solution satisfaisante et revient pour le syndicat à continuer de tirer pour faire croire qu’on a encore des munitions.

Le sursaut passe nécessairement par une réflexion autour du recensement des besoins de formation de leur expression et de leur satisfaction. Le couplage de cet exercice avec l’entretien professionnel mène trop souvent à évacuer le volet formation.

La capacité des services de formation à répondre aux besoins exprimés est très largement dépendante des moyens mis à leurs disposition. Or nous réclamons depuis longtemps en vain que cette problématique puisse être abordée en groupe de travail national. Il n’est plus possible de négliger l’état d’un réseau qui dispense 85 % du volume de formation. La situation des praticiens formateurs sous tous ses aspects, de l’aménagement de la charge de travail à l’indemnisation doit être repensée, ce qui peut fournir l’occasion d’élargir la réflexion à la fonction de tuteur qui mérite mieux que la désignation d’office sans reconnaissance.

Le bilan annuel de la formation doit passer d’une approche exclusivement quantitative à une dimension plus qualitative en intégrant par exemple un indicateur retraçant le taux de couverture des besoins recensés.

L’exclusion de formation doit être redéfinie et son suivi renforcé pour permettre d’apporter des réponses individuelles adaptées. La DGFiP, administration d’expertise ne peut se satisfaire d’une toise placée à une demie journée de formation sur 3 ans, a fortiori lorsqu’une heure et demie d’e-formation est décomptée pour la demi-journée. Il n’est pas possible de se consoler avec un taux d’exclusion ainsi mesuré à moins de 2 % des effectifs (1,63 % en 2015).

Le portrait robot de l’agent DGFiP exclu de formation reste celui d’une femme de catégorie C, de 50-59 ans, ce qui, au passage, n’est pas encore l’âge de la retraite. Parmi les motifs d’exclusion, passons sur l’absence de besoin de formation ressentis dans une période où, assurément, rien ne change à la DGFiP, deux motifs confirment notre analyse: une offre qui ne répond pas aux besoins et un manque de temps lié à la charge de travail ou au temps partiel. CQFD.

Il est impératif de mieux articuler formation continue et formation initiale, quitte à fixer dans le cadre des parcours de formation un volume de jours de formation continue durant la période de stage pratique. Il est d’ailleurs envisageable de moduler le nombre de jours selon la catégorie permettant ainsi de se concentrer sur la catégorie C qui est celle qui, en dépit des progrès enregistrés (7,60 jours en 2015, contre 3,62 jours en 2014), a traditionellement le moins accès à la formation.

Le développement de synergies formation initiale/formation continue en cours au sein de l’ENFiP sur le modèle toulousain pourrait également y contribuer, pour peu que l’on s’assure du strict respect du volontariat des chargés d’enseignement. Par ailleurs, cela pourra accessoirement conforter l’implantation de tous les établissements auxquels notre syndicat est attaché depuis la création de l’ENFiP.

Ce n’est qu’avec une articulation renforcée que les formations initiales pourront être substantiellement dédensifiées au bénéfice de davantage de synthèses et de reformulations, d’exercices pratiques, de réintroduction des apprentissages informatiques sur bases d'école ou du renforcement des stages pratiques indispensables à une professionalisation accrue. De ce point de vue, le parcours sur trois ans construit avec les bureaux de métier en charge du contrôle fiscal à destination des vérificateurs (initiation, perfectionnement et expertise) constitue assurément une piste à suivre et à élargir sur l’ensemble des missions.

Le regroupement de ces indicateurs et quelques autres à déterminer dans une démarche de qualité portée par la Direction générale et déclinée localement au même niveau que les autres objectifs de métier, la réaffirmation du rôle, de la place du réseau local de formation et le renforcement des moyens mis à sa disposition permettrait de rendre à nouveau visible ce qui ne l’est plus depuis longtemps et de remobiliser l’ensemble des acteurs autour d’une formation continue redevenue prioritaire.

Comme nous l’écrivions en juin, depuis Aristophane (Vème siècle avant Jésus-Christ), nous  savons que « la formation des hommes, ce n’est pas remplir un vase, c’est allumer un feu ». Reste à savoir si la DGFiP a encore des allumettes...

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