Recherche d’économies : l’escalade de tous les dangers
Le concours Lépine des mauvaises idées...
Depuis quelques semaines, FO pointe Le concours Lépine des mauvaises idées en matière de mesures ou réformes visant dès 2026 de nouvelles économies pour les finances publiques. A l’évidence, le concours se poursuit et même bat son plein.
Qu’elles émanent du gouvernement, du patronat ou encore de la Cour des comptes, nombre des pistes évoquées ont un point commun : leur mise en œuvre constituerait une attaque des droits des travailleurs, actifs ou retraités.
Les retraités dans le collimateur
Ainsi en est-il de l’idée, développée par le Medef et le président du COR, de supprimer aux retraités imposés sur leur revenu l’abattement de 10% (instauré par la loi de finances de 1978). Celui-ci a été accordé par souci d’équité, compte tenu du fait que seuls les retraités étaient pénalisés par les modifications successives apportées dans le cadre du calcul de l’impôt, dont les grands bénéficiaires étaient les contribuables autres que les retraités et les salariés rappelaient fin mars huit unions de retraités .
Et les Unions de fustiger un discours qui vise à livrer les retraités à la vindicte publique en les traitant de nantis et de privilégiés afin de les opposer au reste de la population. Le gouvernement tente de diviser en stigmatisant, (…) pour continuer d’exonérer les très riches d’impôts et de cotisations.
La Cour des comptes propose elle de désindexer les pensions, soit ne plus caler leur revalorisation sur l’inflation, mécanisme en vigueur depuis 1987 pour les pensionnés du privé et depuis 2003 pour ceux du public. La Cour, estimant que les retraités Français sont bien mieux lotis (pensions, niveau de vie…) que leurs homologues européens, explique en substance qu’ils peuvent assumer des efforts. Concrètement, une moindre revalorisation des pensions, et surtout qu’elle soit inférieure à celle des salaires.
Parmi ses pistes : une indexation des pensions tenant compte de l’évolution des salaires d’une part et de l’évolution du ratio entre le nombre de retraités et les cotisants d’autre part. (...)
Une fois le système équilibré (ce qui peut nécessiter d’agir sur d’autres paramètres comme l’âge de départ ou le taux de cotisation), un tel mécanisme garantit une forme de stabilité au système des retraites.
L’outil magique serait donc un appauvrissement des retraités ?
La sécu particulièrement visée
D’autres idées fusent, telle, du côté du patronat de la CPME, celle de la hausse de la durée du travail qui permettrait, en résumé, aux salariés de se financer une retraite par capitalisation. Celle aussi, vieille lune, d’une TVA sociale visant pour encore alléger le coût du travail à supprimer des cotisations et à les remplacer par un impôt indirect inique s’il en est, puisque touchant chaque consommateur, sans distinction, riche ou pauvre.
Depuis ces dernières semaines, l’idée de ressusciter la TVA sociale mort-née en 2012 semble avoir cheminée au sein même de l’exécutif. Tant le chef de l’État que le Première ministre estiment que le mécanisme peut faire partie des pistes pour une modification du financement du modèle social.
La Cour des Comptes, elle encore, et qui vient de publier le 26 mai un rapport alarmiste sur les finances de la Sécurité sociale à l’horizon 2027 et pointe une dérive des dépenses de la branche maladie, propose ce qu’elle nomme un bouclier sanitaire. Concrètement, il s’agit d’un mécanisme mêlant une moindre prise en charge des dépenses pour frais de santé par la Sécu et un reste à charge augmenté mais qui serait à régler, ou pas, en fonction de ses revenus. Autant dire que cette différenciation entre assurés sociaux va à l’encontre du principe d’égalité des droits à la sécurité sociale.
Le gouvernement a pointé quant à lui mi-avril avril la très grande dérive, depuis 2019, des arrêts maladie et appelle à une responsabilité accrue des salariés. Alors qu’il a décidé déjà une moindre indemnisation des arrêts, mesure en vigueur depuis le 1er avril, il est amené à concéder toutefois que certaines conditions de travail- sous-entendu des mauvaises conditions- peuvent conduire à des arrêts.
Pour l’instant aucune mesure de chasse aux arrêts n’est annoncée (dans le cadre de la lutte contre les fraudes, l’assurance maladie a décidé d’introduire au 1er juillet prochain un nouveau formulaire Cerfa pour les déclarations papiers), mais l’histoire récente a montré, dans la fonction publique notamment – que la recherche d’économies peut amener, par exemple, à la décision injuste d’un allongement du nombre de jours de carence... Avant que face à la détermination syndicale, le gouvernement soit contraint d’y renoncer.
En amont de la présentation en juillet des grandes lignes budgétaires pour 2026, le catalogue des mauvaises idées se dote de nouvelles pages.
Ainsi la Tva sociale ou encore l’idée d’une « année blanche », soit un gel des dépenses publiques. Sans dire lesquelles. Le gouvernement, s’il affirme vouloir demander un effort à tous les Français, campe, lui, sur la défense d’une stabilité fiscale, écartant donc toujours – pour des recettes fiscales et sociales supplémentaires – de solliciter les plus riches et les grandes entreprises. Les organes vitaux à la cohésion sociale sont dans le viseur pour la recherche d’économies. Ainsi la Sécurité sociale ou encore la Fonction publique.
Ce que nous avons en France, ce n’est pas un problème de prélèvements obligatoires, de niveau d’impôts. (…) C’est un problème de dépenses publiques déclarait le 5 juin dans les médias le ministre de l’Economie, Éric Lombard précisant Il n’y aura pas de hausse d’impôt d’ensemble. Ce qui inclurait une sollicitation des plus riches et des entreprises.
Début juin encore, en phase avec ces propos ministériels, le FMI, fidèle à son credo, estimait que la France devra prendre des décisions difficiles. Concrètement pour une réduction des dépenses et en prenant garde de ne pas trop convoquer la fiscalité, au risque sinon de peser notamment sur la confiance des entreprises. De son côté, l’agence américaine de notation S&P a maintenu fin mai le AA- de la France, soit une note dite de perspective négative. Comprenez la menace maintenue d’une prochaine dégradation de notation en cas de déficit public non résorbé au plus vite.
Sur le ton de la gravité, le 27 mai, le Premier ministre avait indiqué de son côté qu’il sera demandé un effort à tous les Français. Mais tandis que le gouvernement vise un effort de 40 milliards d’euros sur les Finances publiques en 2026 et principalement par une baisse des dépenses (État, collectivités locales, sécurité sociale), il semble toujours écarter pour autant l’obtention de recettes supplémentaires, fiscales et sociales, par une participation plus large des plus favorisés ainsi que des entreprises. Pour ces dernières par exemple, et comme le demande FO, par une conditionnalité des aides publiques, notamment des allègements de cotisations sociales, qui représentaient près de 77 milliards d’euros en 2024.
Annonces de grand froid sur les dépenses
C’est dans ce contexte et sur fond de situation économique nationale atone et instable, conséquence notamment de la guerre commerciale sur les droits de douanes lancée par les USA, mais aussi de dépenses consacrées au réarmement, que les idées d’économies fusent de tous bords. La dernière en date, une « année blanche », soit un gel des dépenses (absence de leur indexation à l’inflation), proposée par des parlementaires. Ils estiment qu’en maintenant à leur niveau actuel les dépenses de l’État, des collectivités et les prestations sociales, une économie de 15 à 25 milliards d’euros pourrait être obtenue. Par cette glaciation radicale, seraient impactés les retraites, les prestations sociales, celles de santé, les impôts, la CSG, les moyens de l’État pour ses missions ou entre autres encore les dotations des collectivités.
Le ministre de l’Economie ne dit mot sur ce scénario de gel global ou partiel et renvoie à la concertation d’ici mi-juillet. Le 8 juin en revanche, il affirmait concernant la Fonction publique : Il faut qu’on engage la baisse du nombre de fonctionnaires. La veille, la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, estimant qu’en matière d’économies pour 2026 le compte n’y est pas pour l’instant, prônait une réorganisation massive de l’État, assortie de la fusions ou suppression d’un tiers des opérateurs de l’État et ajoutait : nous allons demander, ministère par ministère, à revoir les besoins de recrutement d’une part et les revalorisations salariales d’autre part.
Une déclaration annonciatrice de la poursuite de l’austérité dans la sphère publique. Anciennement à la tête de la Fonction publique (de 2020 à 2022), la ministre ne peut ignorer cependant que le déficit d’attractivité dont souffrent les trois versants du secteur public provient de salaires trop faibles – par le manque de revalorisation des traitements de nouveau gelés depuis 2024 et de grilles salariales tassées – ou encore des mauvaises conditions de travail, du fait d’une insuffisance d’effectifs. Une situation qu’a participé à construire le mouvement de suppressions d’emplois entamé en 2007 et qui assorti de diverses réformes – qui ont déstructuré les services à coups de fusions notamment – a conduit à cette dégradation continue des conditions de travail.
La protection sociale dans le box des accusés
Ce printemps est décidemment celui des idées tous azimuts pour la réduction des dépenses. Quoi qu’il en coûte aux travailleurs, actifs et retraités, et assurés sociaux. Après celles d’une désindexation des pensions ou encore d’une suppression de l’abattement fiscal de 10% appliqué aux retraités, mesures auxquelles FO s’est opposée, l’idée d’une moindre prise en charge des affections de longue durée (ALD permettant une exonération du ticket modérateur) vient d’être évoquée par le ministre de la Santé, Yannick Neuder.
Réagissant dès le 6 juin, l'organisation a rappelé son opposition à toute atteinte au droit d’accès aux soins. Cette mesure sur les ALD (dispositif créé en 1945) constituerait une attaque contre une population fragile.
Treize millions de personnes, soit 20% de la population, sont aujourd’hui concernées
Mais à l’heure du chantier de la construction budgétaire de 2026, les remises en cause et attaques diverses et variées, en particulier du système de protection sociale, se multiplient. Le 26 mai dans un rapport, la Cour des comptes pointait une perte de maîtrise des comptes sociaux, prônait des réformes sévères et 5,2 milliards d’économies cette année dans la branche maladie.
A noter cependant que la Cour, se penchant sur les allègements de cotisations patronales, propose de revoir leur architecture. Elle indique aussi qu’en termes de compensation – de l’État vers la Sécu, subissant un manque à gagner – la fraction de TVA dédiée a eu depuis 2019 une progression moins dynamique que celle des allégements. Au final, il y a un montant de sous-compensation total estimé par la Cour à 18,3 Md€ depuis 2019, dont 5,5 Md€ en 2024.
Retraite, TVA sociale… Quoiqu’il en coûte aux travailleurs ?
Le Conseil d’orientation des retraites (COR) vient lui de se projeter, façon science-fiction, en 2070, soit dans 45 ans... Le COR est présidé par Gilbert Cette, nommé en novembre 2023, sept mois après l’adoption à coups de 49.3 de la réforme des retraites et succédant à Pierre-Louis Bras dont les propos non alarmistes sur le système des retraites contredisaient ceux de l’exécutif.
En 2070 donc, il faudra avoir reculé, progressivement, l’âge légal de départ en retraite à 66,5 ans (en 2030, à 64,3 ans, donc plus que la réforme de 2023 le prévoit) préconise désormais le COR dans un rapport, déjà éventé, au scénario pessimiste (concernant les ressources du système de retraite) et qui sera publié le 12 juin.
Le COR estime que le déficit du système sera de 0,2% de PIB en 2030 et de 1,4% en 2070. Interviewé par le journal Le Monde, le secrétaire confédéral chargé de l’emploi et des retraites, Michel Beaugas, indiquait C’est du Gilbert Cette, avec sa grille de lecture néolibérale et son obsession du déficit public.
Relancée la TVA sociale, mort-née en 2012, fait quant à elle partie des grandes idées en vogue pour des économies en 2026. ll s’agirait de supprimer des points de cotisations sociales pour les reporter, par une hausse de taux, sur la TVA, cet impôt forfaitaire payé par tout consommateur, riche ou pauvre. Une partie de TVA irait en retour financer certains aspects de la protection sociale.
Le refus d’une double peine pour les assurés
En cas de points de cotisations salariales ôtées, la hausse mécanique du salaire net masquerait l’absence de véritable de hausse du salaire, puisque le brut n’augmenterait pas. La TVA sociale constituerait une nouvelle atteinte au salaire différé (formé des cotisations notamment) sur lequel est assis historiquement le financement de la Sécurité sociale. Et le relèvement de la TVA gonflant les prix, ce serait pour les travailleurs une menace sur leur pouvoir d’achat. Et donc sur la dynamique de la consommation en général.
En cas de cotisations sociales employeur ôtées, ce que demande de longue date le patronat pour une baisse toujours plus forte du coût du travail, le système contribuerait à diminuer encore plus la participation des entreprises à la protection sociale. Un mouvement entamé il y a trente ans par la création des exonérations de cotisations patronales et la fiscalisation des cotisations.
L’exécutif qui préconise une modification de financement de la protection sociale se montre favorable au système de TVA sociale. Le 5 juin, la ministre du Travail et de l’Emploi, Astrid Panosyan-Bouvet qualifiait d’anomalie française le fait que 65% de la protection sociale est financée par le travail. Pour elle Cela nuit au recrutement, cela nuit au maintien de l’emploi et cela nuit également au pouvoir d’achat.
Instituer la TVA sociale ce serait tuer la Sécurité sociale, anéantir le modèle du chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Une double peine pour les assurés qui financeraient la Sécu par l’impôt le plus injuste, mais qui financeraient du même coup les milliards de cadeaux aux entreprises
« Un impôt sur la consommation, c’est le prélèvement le plus injuste qui existe ! indiquait le 1er juin interviewé par la Tribune du dimanche le secrétaire général de la confédération, Frédéric Souillot.
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Finances publiques 2026 : les menaces s’affinent
L’art d’entretenir le suspense. A quelque trois semaines de la déclaration annoncée du chef du gouvernement devant détailler l’axe des projets budgétaires pour 2026 (projet de loi de finances et projet de financement de la Sécurité sociale) qui seront présentés au Parlement à l’automne, aucun indice précis n’est apporté. Seule la visée générale de ces futurs textes est confirmée : il s’agira par leur biais de réaliser un effort de 40 milliards d’euros sur les finances publiques, avec l’objectif maintenu de ramener le déficit public de 5,4% du PIB, prévu en 2025, à 4,6% l’an prochain. Au vu des déclarations gouvernementales, on comprend cependant que l’effort se ferait principalement par une forte et douloureuse réduction des dépenses publiques (État, Sécurité sociale, collectivités territoriales).
Le 22 juin, la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin précisait les perspectives pour l’État. Pour 2025, nous sommes en train de faire 23 milliards d’euros d’économies sur l’État et pour 2026, il y a une règle, c’est que nous n’augmenterons pas les dépenses de l’État. Ce qui fait craindre un gel de ces dépenses, et par un non-adossement de leur évolution sur l’inflation, concrètement, leur baisse.
Alors que le gouvernement assure d’un plan budgétaire responsable et crédible ainsi que l’indiquait la ministre dans les médias -concédant toutefois que rien qu’au sein des ministères les discussions sont difficiles, chaque secteur défendant ses moyens-, le dispatching des efforts sur les finances publiques pour 2026 est à haut risque. A plus d’un titre.
Les collectivités locales sont déjà vent debout contre de nouvelles coupes et un possible gel des dotations de l’État. Le comité des finances locales, menaçant de censure sur le terrain (arrêt des participations aux plan État/Région, refus de transfert de nouvelles missions, …) rappelle que les collectivités ont été sollicitées pour 80 milliards d’euros d’économies depuis 2014 et que leur épargne brute a chuté de 7,3% l’an dernier. Leur crainte est l’endettement à venir.
Dépenses de santé : nouveau serrage de ceinture dès cette année
La Sécu, elle, notamment dans ses secteurs maladie et retraites, est attaquée de tous les côtés pour ses dépenses. Le 19 juin, le patron du Medef évoquant une déresponsabilisation sur le sujet des dépenses, estimait que la dérive principale des finances publiques provenait des régimes sociaux, notamment maladie et retraites. Il préconisait de remettre en cause un certain nombre de dispositifs sociaux.
La veille, les experts du Comité d’alerte sur les dépenses sociale s’étaient alarmés d’un probable dépassement de l’Ondam (objectif des dépenses de santé) de 0,5% (1,3 milliard d’euros) en 2025. Tandis que cet objectif d’évolution des dépenses est toujours inférieur à ce que nécessiteraient les besoins ne cesse de souligner FO depuis des années. Le Comité pointe le poids des indemnités journalières, des dépenses hospitalières et de médicaments.
Celles-ci sont aussi dans le collimateur du gouvernement pour des économies en 2026, par des mesures qui pourraient impacter les travailleurs et assurés, dont les plus modestes. L’accélération des mesures austères débute même dès cette année. Ainsi le 25 juin, auditionnées par la commission des Affaires sociale de l’Assemblée, la ministre des Comptes publics ainsi que Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles ont annoncé un plan d’économies de 1,7 milliard d’euros cette année. Plan venant s’ajouter donc aux mesures décidées dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025.
Haro sur les arrêts de travail
Parmi les mesures (dont certaines concernent les professionnels -médecins généralistes, spécialistes, pharmaciens, kinés, taxis - notamment par des non-revalorisations de rémunérations ou le décalage de celles-ci), le gouvernement prévoit, pour les dépenses hospitalières et celles du médico-social, de faire appel- pour 700 millions d’euros- à une réserve prévue par le dernier budget.
Est annoncée aussi une économie de 100 millions d’euros sur les indemnités journalières. Ces dernières semaines le gouvernement qui vise à ce qu’elles diminuent avait dans son collimateur des centaines de médecins, soupçonnés de trop en prescrire. Selon la Cnam, le nombre d’arrêts a augmenté de 27,9 % entre 2019 et 2023. La direction générale de la Cnam propose de son côté que les arrêts prescrits par les médecins de ville soient limités à une durée de quinze jours. A un mois, en ce qui concerne ceux prescrits dans le cadre hospitalier. En cas de prolongation, qui se ferait dans le cadre d’une nouvelle consultation, l’arrêt serait limité à deux mois.
Médicaments : une industrie florissante et aidée
De son côté, la ministre Amélie de Montchalin semble remettre en cause la visite obligatoire d’un salarié avec un médecin du travail (secteur médical sinistré, car non attractif et en manque d’effectifs) à l’issue d’un arrêt maladie d’un mois. Le gouvernement compte aussi que soient réalisées 500 millions d’économies sur les dépenses de médicaments, via notamment semble-t-il une action sur le prix des génériques. Ce type d’économies impacterait a priori les pharmaciens. La ministre Catherine Vautrin n’a rien précisé à propos d’une éventuelle sollicitation des industriels, mais indiqué qu’il n’y aura pas d’accord avec le Leem (le syndicat des entreprises du médicament), lobby de poids. Celui-ci, à l’annonce du plan d’économies, a déclaré : Nous regrettons l’intention du gouvernement d’amplifier les baisses de prix de médicaments.
Selon le Leem lui-même, en 2022, l’industrie du médicament affichait 70 milliards d’euros de chiffre d’affaires, dont 48% à l’export. Ces industriels se portent bien. A titre d’exemples, en 2024, Sanofi affichait un bénéfice net de près de six milliards d’euros. Novartis de près de douze milliards de dollars. A noter encore les aides publiques que reçoit ce secteur (y compris les multinationales), à travers notamment le CIR (crédit impôt recherche) et le soutien à la recherche au développement (R&D). Ce qui au total, en coût et manque à gagner représente chaque année plusieurs milliards d’euros.
Par ailleurs, dans le cadre de France 2030 et de la relocalisation de production de médicaments sur le territoire, quatorze projets sont soutenus par un financement public, au total à hauteur de 50 millions d’euros. Les aides à la relocalisation (via France Relance et France 2030) sont depuis la période covid de plus de 800 millions pour un investissement productif de 1,7 milliard d’’euros.
Quid de la recherche de recettes supplémentaires ?
Plus largement, alors que des anathèmes semblent vouloir être jetés toujours sur les mêmes secteurs en 2026 - particulièrement les services publics et la protection sociale qui cependant ont fait leur preuve, notamment en tant qu’outils de cohésion sociale -, un paramètre de l’équation pour des efforts sur les finances publiques semble toujours écarté : la recherche de recettes supplémentaires, fiscales et sociales, par sollicitation plus forte des plus riches et des grandes entreprises.
L’éventualité d’une taxation supplémentaire des grandes fortunes, -par exemple de 2% au-delà de 100 millions d’euros de patrimoine ainsi que le proposait une mesure adoptée en février dernier par l’Assemblée mais rejetée le 12 juin par le Sénat-, n’apparaît pas comme une piste pour le gouvernement. Pas plus pour l’instant une conditionnalité des aides publiques aux entreprises (représentant quelque 200 milliards d’euros par an dont un manque à gagner de près de 80 au titre des allègement de cotisations sociales), ce que demande FO.
Sur fond d’économie morose…
Or, faire peser sur les travailleurs, leur sécu et leurs services publics, le poids le plus important de l’effort en 2026 risquerait d’être d’autant plus lourd de conséquences que l’économie est enlisée dans la morosité. L’Insee indiquait en effet 18 juin la destruction de 120 000 emplois en deux trimestres et de 90 000 autres à venir d’ici la fin de l’année, cela avec une croissance du PIB qui ne devrait ne pas dépasser 0,6% (le gouvernement prévoit 0,7%). Par ailleurs, le chômage grimperait à 7,7% fin 2025, et la consommation des ménages serait en repli, à 0,7% (contre 1% en 2024), Et l’Institut d’indiquer encore que les investissements des entreprises seront en baisse de 0,8%, ceux des ménages en recul de 0,6%. De même pour les investissements publics.
Loi de simplification : de quoi toujours inquiéter
Après un parcours parlementaire de plus d’un an, chaotique et ponctué de pauses, le projet de loi de « Simplification de la vie économique » a été adopté le 17 juin en première lecture par l’Assemblée nationale lors d’un vote solennel (275 votes pour, 252 contre, 21 abstentions). C’est donc cette version – portant la très médiatique suppression des ZFE (zones à faibles émissions interdites d’accès aux voitures polluantes) – qui sera examinée en commission mixte paritaire (réunissant 7 députés et 7 sénateurs) afin d’établir un texte commun aux deux chambres.
Si la suppression de la « simplification » du bulletin de paye – à laquelle FO s’était opposée- est confirmée, d’autres mesures de ce texte aux 26 mesures interrogent, et pour certaines inquiètent. Cela même si la version initiale (portée en 2024 par le Premier ministre, Gabriel Attal) a donc été expurgée par endroits.
Déréglementations en vue
Ce texte fourre-tout amoindrit ainsi nombre d’obligations environnementales faites aux entreprises. Autre décision de l’Assemblée, adopté en première lecture, c’est un « comité interministériel de la Transformation publique » qui serait chargé d’apprécier l’impact de toute nouvelle norme avant son entrée en vigueur dans les TPE et PME. Le texte initial prévoyait que cela soit les entreprises seules qui les testent. Le projet conçoit aussi entre autres de faciliter l’accès des entreprises aux marchés publics via de nouvelles déréglementations (relèvement des seuils d’accès). D’autres mesures concernent plus directement les salariés.
Ainsi, ce projet prévoit, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, de réduire à un mois (contre deux) le délai d’information des salariés en cas de projet de vente/reprise acceptée de l’entreprise. Et, en cas de non-respect de cette obligation d’information aux salarié, l’amende sera moindre, passant de 2% du montant de la vente à 0,5%.
Le texte créé aussi la possibilité de réaliser par défaut les réunions du CSE et des IRP par les outils numériques (visioconférences, actuellement limitées à trois par an), sauf disposition contraire des statuts et sauf avis contraire expressément exprimé par les parties concernées.
Rayés d’un trait de crayon…
Parmi les mesures adoptées encore, la suppression, au nom des économies, de plus de vingt comités, instances consultatives et agences. Contre cinq suppressions prévues initialement. Si les Ceser ont été préservés (grâce à l’action FO notamment), le texte -qui décide aussi que pour toute commission ou instance consultative créée, deux devront être supprimées- prévoit par exemple l’arrêt du comité de suivi de la réforme « 100% santé », celui de l’Agence de financement des infrastructures de transports/AFIT (en 2026), du Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur ou encore de l’Observatoire national de la politique de la ville... Réduire les opérateurs, c’est accroître la dépendance aux prestations privées, plus coûteuses et moins pilotables, au détriment de l’intérêt public pointait récemment la FEETS-FO.