Participatif
ACCÈS PUBLIC
13 / 12 / 2016 | 3 vues
Françoise Gauchet / Membre
Articles : 167
Inscrit(e) le 07 / 05 / 2008

Amiante dans les services de l'Etat : des années d'atermoiements

Ce dossier récurrent n'en finit pas. Depuis des années, notre organisation et l'ensemble des fédérations syndicales en ont fait un dossier prioritaire à partir du « fameux » sujet de la tour Tripode de Nantes. Un vrai parcours du combattant au gré des changements ministériels.

Où en est-on aujourd'hui ?

Le comité expert amiante mis en place à Bercy a tenu début novembre deux jours consécutifs  de réunion pour faire un point actualisé sur un ordre du jour particulièrement chargé dans un contexte de plus en plus préoccupant, notamment pour le suivi médical pendant l'activité et post-professionnel des agents concernés.

Notre fédération a d'emblée fait observer à la DRH qu'on nous proposait de travailler sur le suivi médical des agents exposés à l’amiante mais qu'on ne donnait pas aux organisations syndicales les moyens de mettre ce dispositif en œuvre.

On est, par exemple, incapable de le faire à Montargis avec un seul médecin de prévention et la suppression du poste d’infirmière.

Certes, un énorme travail de recensement des agents est en cours par ce seul médecin mais des moyens supplémentaires sont urgents sur ce dossier, comme à Nantes qui est un exemple emblématique : un seul médecin de prévention au lieu de trois pour le suivi médical spécifique des agents du Tripode et pour les quelques 3 500 agents de Loire-Atlantique.

Où sont la volonté politique et la mise en œuvre concrète :

  • du désamiantage des bâtiments domaniaux et locatifs amiantés ou du déménagement des agents dans des locaux sains (exemples à Montargis, à Fort-de-France) ;
  • des dossiers techniques d'amiante (DTA) et de leur mise à jour et de la pose de la signalétique ;
  • d’une réelle prise en compte du risque d’exposition à l’amiante dans les services des archives : des lots d’archives provenant du Tripode et les archives de la DG de l’INSEE sont actuellement affectés ;
  • quel dossier a été transmis (ou le sera) par notre ministère à la DGAFP concernant la reconnaissance du Tripode site amianté, en vue de l’audience du 30 novembre prochain des fédérations de fonctionnaires ;
  • qu’en est-il de l’application à Bercy du droit à cessation anticipée d’activité et à l’attribution de l’allocation spécifique de cessation anticipée (ACAATA) pour les agents atteints d’une maladie professionnelle provoquée par l’amiante ? Qu’en est-il de la circulaire d’accompagnement centrée sur la mise en œuvre de ce dispositif ?

Nous souhaitons des propositions fortes, de réels engagements et leur mise en œuvre : il est urgent de passer aux actes.

La DRH a reconnu que l’approche amiante est bien globale même si la mise à jour réglementaire a imposé la tenue d’une réunion spécifique concernant le suivi médical, que des outils existent et qu’il faut passer aux actes et à leur mise en œuvre. Les agents attendent leur application concrète.

Demande de classement site amianté du Tripode de Nantes

La DRH a évoqué le CTM du 4 octobre 2016 et la lettre de l’ensemble des fédérations en particulier, demandant la reconnaissance en site amianté du Tripode de Nantes. Elle a précisé qu’elle avait bien saisi la DGAFP, qu’elle lui avait transmis les documents et les courriers des fédérations allant dans ce sens, dans la perspective de l’audience des fédérations de fonctionnaires. La DRH a bien précisé qu’elle soutenait ce dossier et qu’elle avait prévu des entrevues avant l’audience.

Rappelons que plus de 1 800 agents de l’INSEE, du Trésor Public, du Ministère des Affaires étrangères et du restaurant inter-administratif ont été intensément exposés à l’amiante dans le Tripode Beaulieu à Nantes de 1972 à 1993.

Évacué à cause de cette présence massive d’amiante, le Tripode a été désamianté, puis détruit le 27 février 2005. Le classement site amianté serait une mesure symbolique de reconnaissance du combat mené depuis 30 ans par l’intersyndicale amiante Tripode, avec le soutien actif des agents.

Prévention du risque amiante DTA et signalétique.

Signe d’engagement, pour la DRH, la note du secrétaire général de Bercy aux directions générales en date du 23 août 2016 leur rappelant leurs obligations :

  • de réaliser, au plus tard le 31 décembre 2016 et pour chaque bâtiment, un dossier technique d'amiante qui doit être obligatoirement mis à jour « lors de toute opération de repérage, de surveillance ou de travaux portant sur des matériaux et produits contenant de l’amiante » ;
  • de mettre en place une signalétique d'amiante claire dans les zones et sur les matériaux amiantés, conformément à la circulaire de la fonction publique du 28 juillet 2015 et aux engagements de Bercy bien antérieurs à cette circulaire ;
  • notre fédération a demandé et obtenu que ce dispositif soit inséré dans la note d’orientation 2017, feuille de route des CHSCT qui devront assurer le suivi de sa mise en œuvre.

Concernant le décret de la fonction publique « relatif au droit à la cessation anticipée et à l’attribution de l’allocation spécifique de cessation anticipée d’activité aux fonctionnaires et agents contractuels de droit public de la fonction publique reconnus atteints d’une maladie professionnelle provoquée par l’amiante » (ACAATA) : la DRH a précisé que la circulaire ministérielle d’application de ce décret sortirait en début d’année 2017…

Suivi médical post-professionnel : mise à jour réglementaire du dispositif

Les textes ont nécessité la mise à jour de ce dispositif : le décret n° 2009-1546 est maintenu. Le décret n° 2009-1547 est abrogé et il est remplacé par le décret n° 2015-567 qui fixe les modalités du suivi médical post-professionnel des agents de l’État à une substance CMR. La circulaire du 28 mai 2010 est abrogée et remplacée par la circulaire du 18 août 2015 pour tous les CMR.

Les recommandations de la haute autorité de santé sont également prises en compte. Ce guide réactualise le dispositif adopté au CHSCT-M du 17 décembre 2013.

Face à la complexité des textes, l’objectif de ce guide est de clarifier le dispositif en un seul document. D’autre part, il a bien été précisé que l’administration est garante de la traçabilité, d’autant plus qu’elle doit rédiger l’attestation d’exposition qui récapitule l’ensemble des expositions intervenues tout au long de la carrière des agents concernés.

Nouvelle appellation : la « fiche de suivi des expositions » remplace la « fiche de prévention des expositions à certains facteurs de risques professionnels ».

Nouveau modèle d’« attestation d’exposition amiante et CMR » : cette attestation concerne les agents pour lesquels une « fiche d’exposition » à l’amiante ou aux CMR a été établie. L’« attestation d’exposition » leur est remise par le service RH au moment de leur cessation d’activité (retraite, démission…). Elle ouvre droit au suivi médical post-professionnel.

Nouveauté prévue par le décret : la possibilité pour l’agent de choisir son médecin traitant

Dans ce cas, l’administration en assure la prise en charge financière. S’il est choisi par l’agent, le médecin traitant devra transmettre les documents au médecin de prévention et le CHSCT doit en être informé. Donner des informations aux médecins traitants sur la rédaction des imprimés spécifiques à la fonction publique devient une nécessité même si le suivi médical par les médecins de prévention sera, fort heureusement, recommandé aux agents.

Autre nouveauté, un bilan annuel de la mise en œuvre du suivi médical post-professionnel devra être présenté devant les CHSCT.

FO finances transmettra ce dispositif médical post-professionnel mis à jour, accompagné de son plan de diffusion, dès sa validation en CHSCT-M. Une information pratique et concrète pourra ensuite être donnée aux agents, les CHSCT veilleront à sa mise en œuvre.

Présentation pour information, de la méthodologie du suivi médical suite à exposition aux ACD-CMR

Présenté pour information, ce document particulièrement technique prenant en compte les connaissances scientifiques actuelles, est destiné aux médecins de prévention pour leur permettre de savoir comment repérer un ACD et un CMR.

Il constitue un relevé des recommandations applicables pour la surveillance professionnelle des agents exposés ou ayant été exposés à des agents chimiques dangereux (ACD) notamment des CMR (substances cancérogènes, mutagènes et dangereuses pour la reproduction).

Il permet ensuite de mettre en place un suivi médical pendant l’exposition, post-exposition et post-professionnel. Il se situe dans le cadre du plan gouvernemental anti-cancer. La co-exposition sera ajoutée à ce document.

Suivi médical des agents pendant leur activité

Ce guide destiné aux services de RH et aux médecins de prévention a le mérite de remplacer, en un seul document, les très nombreuses instructions en la matière qui existent depuis 1996, en prenant en compte les évolutions réglementaires.

Il énumère et détaille les différents types de visites médicales notamment celle de cessation d’activité, les modalités d’organisation de la surveillance médicale.

Il intègre les visites de pré-reprise après arrêts maladie supérieur à 6 mois, après congés de longue maladie (CLM) et congés de longue durée (CLD). Il rappelle l’importance de la fiche de liaison et de la fiche de visite.

Traçabilité des expositions : récapitulatif des fiches et attestations

L’ensemble des nouvelles fiches et attestations, évoquées plus haut, sera conservé par l’administration qui garantit la traçabilité des expositions. Elles seront remises aux agents concernés. Ces fiches et attestations seront validées en CHSCT-M à travers des deux dispositifs : le suivi médical pendant l’activité et le suivi médical post-professionnel :

Agents en activité :

  • « la fiche d’exposition amiante » : pour les agents en activité ayant été exposés à l’amiante ;
  • « l’attestation de présence amiante » (ex. « certificat de présence ») : elle est destinée aux agents qui ont été au cours de leur carrière, soumis à des expositions dite environnementale intramurale dues à la libération possible de fibres d’amiante dans l’environnement intérieur au cours : d’opérations d’intervention sur des matériaux amiantés ayant libéré des fibres d’amiante (travaux sans mesure de protection, travaux avec mesure de protection insuffisantes ou déficientes), de la dégradation constatée de matériaux amiantés (dégradation spontanée ou accidentelle en dehors de travaux).

À la cessation d’activité :

  • « l’attestation d’exposition amiante et CMR » : elle est rédigée à la cessation d’activité et résume la traçabilité de l’ensemble des expositions à l’amiante subies par les agents. Elle permet la mise en œuvre du suivi médical post-professionnel lors de la cessation d’activité (elle comporte désormais trois volets, voir plus haut).

Site de Montargis : état d’avancement du recensement des agents destiné à la mise en place d’un suivi médical

En 1976, au centre des finances publiques (CFP) de Montargis, de nombreux travaux sur des matériaux amiantés ont libéré des fibres d’amiante. Maintes fois revendiqué, un suivi médical sera organisé au bénéfice des agents concernés. Un courrier leur a été adressé afin qu’ils puissent bénéficier d’un suivi médical post-exposition (pour les actifs) et post-professionnel (pour les retraités).

Conformément aux préconisations de la haute autorité de la santé de 2010, cette surveillance consistera en la réalisation d’un scanner tous les dix ans.

Pour nous, ce suivi médical revendiqué à maintes reprises est un premier pas à étendre aux expositions à l’amiante postérieures à 1976, compte tenu du nombre important de travaux intervenus depuis cette date dans cet immeuble « Pailleron » amianté. En réponse, le ministère s’est dit favorable à l’étude de faisabilité.

Notre fédération a maintes fois revendiqué le relogement des agents dans un bâtiment sain : ce qui a été possible à Montauban doit l’être à Montargis. 

Des éléments chiffrés sur ce recensement ont été communiquées : 73 agents recensés dont 61 habitent le Loiret ; 29 agents ont été vus par le médecin de prévention dont 1 a refusé de passer un scanner. De plus, 28 agents ont eu une prescription de scanner. À ce jour, 19 scanners ont bien été réalisés : leurs résultats ont démontré que tout était normal.

Amiante dans la gestion des bâtiments           

La suite et la fin de l’étude lancée en avril 2016 et abordée en juin dernier, concernant l’élaboration et la mise à jour des dossiers techniques d'amiante et la mise en œuvre de la signalétique d'amiante sur 992 bâtiments domaniaux a été présentée. Elle reprend les trois points suivants :

  • recensement et état de l’actualisation des DTA : 97 % des bâtiments domaniaux ont un DTA soit 962 DTA pour 992 bâtiments mais 53 % ne l’ont pas mis à jour (511 bâtiments) ;
  • actualisation des DTA suite à travaux ou repérages complémentaires : 600 bâtiments sur 992 ont effectués des travaux ou des repérages : 408 DTA (soit 68 %) ont été mis à jour en conséquence et 192 d’entre eux n’ont pas fait de mise à jour.
  • état de la mise en œuvre de la signalétique d'amiante : seuls 268 bâtiments sur 992 (32 %) disposent d’une signalétique d'amiante, 724 bâtiments n’ont toujours pas de signalétique et 71 bâtiments seraient en train de les mettre en œuvre. Enfin, 163 DTA n’indiquent pas d’amiante ou ces sites ont été désamiantés (17 %).

Pour nous, ces résultats sont largement perfectibles.

La note du secrétaire général de Bercy adressée aux directions générales le 23 août 2016 devrait contribuer à une amélioration. Elle leur rappelle leurs obligations en la matière : les DTA et leurs mises à jour sont une obligation de l’employeur qui doit en assurer le financement et leur réalisation par des professionnels. Il en est de même de l’apposition d’une signalétique claire sur les matériaux amiantés afin d’éviter toute contamination lors d’interventions. À cet égard, le problème budgétaire a clairement été évoqué.

Pour notre fédération, une véritable volonté politique de mise en œuvre manque encore sur ce dossier, celle-ci devrait se concrétiser par de nécessaires moyens humains et budgétaires, force est de constater que nous sommes encore loin du compte.

Proposition de feuille de route ministérielle : celle-ci est destinée à énumérer les engagements ministériels concernant l’amiante mais, faute de temps, celle-ci n’a pu être abordée et devra être reformulée.

Déjà évoquée au comité d'experts de l'amiante de juin dernier, les fédérations syndicales attendent toujours une feuille de route ambitieuse : élimination des bâtiments de type « pailleron », désamiantage des sites subissant des réaménagements importants, réaffirmation de la priorité absolue du principe de désamiantage et des règles énoncées par le « guide prévention du risque amiante dans la gestion des bâtiments ».

Leur respect doit conditionner le rythme des réorganisations en cours et à venir.

La feuille de route doit également traiter de la problématique des archives amiantées, la prise en compte des nouvelles valeurs limites d’exposition aux poussières d’amiante et des niveaux d’empoussièrement, la mise en œuvre de diagnostics amiante exhaustifs.

Par ailleurs, notre fédération demande à ce que l’administration adopte un point de vue global sur la problématique de l'amiante afin de dégager des solutions pérennes et satisfaisantes du point de vue de la prévention des contaminations à l’amiante du personnel et qu’elle bâtisse un plan ministériel de désamiantage actualisé et ambitieux des bâtiments domaniaux (au nombre de 992) et locatifs (2273 dénombrés en 2015).

Organisation du comité d'experts de l'amiante en 2017 : deux réunions par an seront organisées. La mise à jour du « guide prévention du risque d'amiante dans la gestion des bâtiments » sera effectuée. Il devrait acter le fait que l’ensemble des agents des MEF, notamment les agents des DISI et des services informatiques, ne doivent pas intervenir sur des matériaux amiantés. Notre organisation syndicale  sera attentive à la concrétisation de cet engagement.

Dossier amiante Hôtel des Finances du site de Cluny, en Martinique : les fédérations FO finances et solidaires ont interpellé le Ministère sur ce dossier urgent dans l’intérêt des agents du pôle C de la DIRECCTE.

Suite à des travaux entrepris en septembre 2015, 13 prélèvements ont été effectués en juin 2016 ; pour 10 d'entre eux, les résultats des analyses révèlent la présence d’amiante dans les sols, murs, plafonds, calorifugeage et joints de dilatation.

Les agents légitimement inquiets pour leur santé demandent une solution adaptée à la gravité de la situation, le plus rapidement possible. Seul un engagement d’une réponse écrite a été formulé aux fédérations. Espérons que celle-ci apportera des solutions concrètes face à l’urgence de la situation.

Archives amiantés : risque nouveau et mobile, un courrier des fédérations évoquait déjà le sujet dès le 23 septembre 2015 et interpellait notre ministère afin qu’un dispositif de prévention et de suivi médical soit mis en place, à l’instar de celui du ministère de la Culture, dans sa circulaire du 5 aoùt 2015 « relative à la prise en compte du risque d’exposition à l’amiante dans les services d’archives ».

La mise en place d’un groupe de travail « amiante/archives » émanant du comité d'experts d'amiante a été décidé pour élaborer une véritable méthodologie à Bercy sur le sujet.

Au moment où, dans le cadre de leur futur déménagement, des fibres d’amiante ont été détectées dans les archives du sous-sol de la Direction générale de l’INSEE, un comité de suivi du déménagement de l’INSEE (sous l’égide du CHSCT-administration centrale) a été constitué.

Une partie des archives ayant été transférée dans les locaux de l’INSEE de Metz, le CHSCT de Moselle est lui aussi saisi.

À noter que les dossiers du personnel font partie des archives et sont consultés par les capistes. Par conséquent, des mesures de prévention s’imposent.

Élément pour le moins surprenant évoqué à cette occasion : il semblerait que personne ne soit capable de dire où se trouvent les archives du Tripode de Nantes et de Montargis…

Amiante à l’ordre du jour du CTM : l’amiante sera évoquée lors d’un prochain CTM à travers notamment les résultats de l’étude relative aux DTA et à leur mise à jour, à la signalétique ainsi que la note du secrétariat général en la matière du 23 aoùt 2016 afin que l’ensemble des directions de Bercy s’engagent sur le sujet.

Au fil des mois, la problématique de l’amiante s’accroît bien souvent par des travaux dans les bâtiments (encore récemment au Havre).

À l’évidence, ce dossier de santé publique et de santé au travail, devient une priorité à laquelle notre fédération demande aux autorités ministérielles de prendre toute la dimension, y compris budgétaire. La santé n’a pas de prix !

Les fédérations de fonctionnaires ont été reçues le 30 novembre par la directrice adjointe du cabinet de la ministre de la Fonction publique qui semble avoir pris « un engagement ferme » pour qu'une réponse officielle et définitive soit donnée sur le classement en « amiante » du site Tripode. En espérant que dans la période, on ne va pas encore nous jouer la pendule...

Pas encore de commentaires