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01 / 06 / 2017 | 163 vues
jean-marc bailly / Membre
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Action de groupe : les syndicats porte-parole des salariés victimes de discriminations

Lorsqu’on est salarié et que l’on tient à préserver son emploi, il n’est jamais simple d’engager une action judicaire contre son employeur, surtout lorsqu’il s’agit d’un grand groupe. Le rapport de force et les peurs des retombées découragent rapidement les velléités des salariés même lorsque ceux-ci sont victimes d’inégalités de traitement importantes.

Collective, moins coûteuse et plus simple, l’action de groupe pourrait bien lever le frein financier bloquant les actions individuelles et devenir un facteur déterminant de la réduction des discriminations dans les entreprises.

Instituées par la loi de modernisation de la justice du 18 novembre 2016 (dite « loi J21 »), les actions de groupe visant à lutter contre les discriminations vont désormais pouvoir être mises en œuvre suite à la publication du décret n° 2017-888 entré en vigueur le 11 mai 2017.

Nous suivrons avec intérêt celles qui porteront sur les inégalités de protection sociale complémentaire entre les salariés.

I – Rappel sur l'action de groupe

Depuis ladite loi J21, les salariés placés dans une situation similaire qui subissent une situation discriminatoire causée par une seule et même personne (en l’occurrence leur employeur) et qui a pour cause commune un manquement légal ou contractuel, peuvent rejoindre une action de groupe sur le fondement de la lutte contre la discrimination.

Les salariés victimes doivent alors adhérer (opt-in) à une association agréée ou une association régulièrement déclarée depuis au moins 5 ans, dont l’objet statutaire comporte la défense des intérêts (un syndicat le plus souvent), ayant seuls le pouvoir d’exercer l’action de groupe au nom des salariés adhérents.

L’objectif de cette action de groupe est de :

  • faire cesser le trouble et le manquement légal ou contractuel de l’employeur ;
  • et/ou d’engager la responsabilité de l’employeur afin d’obtenir des dommages et intérêts à titre de réparation.

II – L’apport du décret

La compétence du TGI : une opportunité pour les discriminations en matière de protection sociale

Le TGI du domicile de l’employeur a compétence exclusive en matière d’action de groupe.

Cette compétence des chambres civiles constitue un risque de conflit avec la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation en matière d’inégalité de traitement.

La cessation du manquement mise en œuvre par un tiers

Pour mettre un terme à une situation discriminatoire, le juge peut désigner un tiers qui sera chargé de mettre en œuvre les mesures qu’il aura prescrites.

Le tiers est choisi parmi tous les professionnels justifiant d’une compétence dans le domaine considéré. Ce dernier devra sans délai faire part de son acceptation ou non de la mission qui lui a été confié par le juge (à noter que le choix de ce tiers semble complétement discrétionnaire).

Le juge fixe le délai de la mission du tiers dans lequel il devra lui faire part de toutes les difficultés qu’il rencontre durant sa mission. Il devra aussi remettre un rapport au juge à l’issue du délai imparti ainsi que sa demande de rémunération (dont il adresse un exemplaire aux parties par tout moyen permettant d'en établir la réception).

L’auteur de la situation discriminante, seul débiteur de la rémunération du tiers, dispose d’un délai de 15 jours (à compter de la réception de la demande) pour présenter ses observations, s’il en a, sur cette demande. Passé ce délai, le juge fixe la rémunération du tiers (en fonction des diligences effectuées par le tiers, du respect des délais et de la qualité du travail fourni).

Adhésion du salarié victime de discrimination au groupe initié par le syndicat

L’adhésion au groupe prend la forme d’une demande de réparation, faite par tout moyen permettant d’en accuser la réception, étant précisé que cette demande doit intervenir selon les modalités et le délai déterminés par le juge.

    Elle peut être faite auprès :

  • de l’une des parties à l’instance lorsqu’il est fait application de la procédure individuelle de réparation des préjudices ;
  • du syndicat initiateur de l’action lorsqu’il est fait application de la procédure collective de liquidations des préjudices.

La demande de réparation doit contenir les informations suivantes : noms, prénoms, domicile de l'intéressé ou son adresse électronique à laquelle il accepte de recevoir les informations relatives à la procédure.

Les personnes n’ayant pas adhéré au groupe dans les délais prévus par le juge et selon les modalités légales d’adhésion ne sont plus recevables à demander leur indemnisation dans le cadre de l’action de groupe. Elles peuvent toutefois recourir au juge par le biais d’une requête individuelle.

L’information de la décision du tribunal au salarié victime

Il appartient à l’employeur de mettre en œuvre les mesures de publicité afin d’informer de la décision les salariés susceptibles d’avoir subi un dommage causé par une situation discriminante dans le délai fixé dans le jugement de responsabilité.

Si, à l’expiration de ce délai, aucune publicité n’a été faite, il appartiendra au syndicat d’y procéder.

À noter que, contrairement aux actions de groupe en matière de santé, celles en matière de discrimination ne sont pas rétroactives. Ainsi, seules les actions introduites après le 19 novembre 2016 (date d'entrée en vigueur de la loi J21) sont recevables. Faveur sûrement bien accueillie par les gestionnaires de risques.

 

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