Les urgences hospitalières sans fard
À travers différentes histoires qui jalonnent sa carrière, Caroline Brémaud, médecin urgentiste, raconte l’amour de son métier mais aussi sa détresse face au constat de la dégradation continue du système de santé français et de l’hôpital.
Son éviction avait fait grand bruit.
En décembre 2023, Caroline Brémaud, chef de service des urgences de l’hôpital de Laval, était démise de sa chefferie, au gré d’une réorganisation bien opportune du département de médecine d’urgence de cet établissement mayennais. Elle apprendra plus tard, écrit-elle, qu’on voulait « la faire taire ».
Peine perdue puisqu’un an et demi après, l’urgentiste déballe ce qu’elle connaît de l’hôpital dans un livre : État d’urgences, le quotidien d’une médecin en lutte pour l’hôpital public.(*)
Une pression constante L’ouvrage raconte sa vie de médecin, et même un peu de sa vie de mère, puisque deux de ses enfants ont eu à connaître les urgences. Il décrit les moments forts auprès des patients et avec ses collègues, tout ce qui motive l’amour de son métier.
Elle raconte aussi les moments difficiles. La prise en charge des tentatives de suicide, notamment cet adolescent qui n’avait pu être hospitalisé, faute de place, après son passage aux urgences psychiatriques. Des personnes très âgées qui « dorment » dans le couloir des urgences parce qu’on n’a pas le temps de s’occuper d’elles. La course, tout le temps, et l’augmentation constante du flux de patients. Les longues heures de garde, le temps pris sur les congés pour éviter que le service ferme faute d’effectifs, les choix faits par le SMUR entre deux patients nécessitant des soins urgents…
Caroline Brémaud dénonce aussi la condition faite aux paramédicaux : « Charge de travail, conditions de travail et qualité de travail : tout est difficile. »
L’ouvrage se lit très vite. On a sans cesse envie d’en savoir plus. L’épilogue entend apporter une note d’espoir, soulignant qu’il est encore possible d’améliorer la situation.
Toutefois, depuis dix-huit mois, cela n’a pas été le cas en Mayenne, ni dans de nombreux autres établissements de santé en France. « La situation se détériore de jour en jour dans les trois hôpitaux du département, indique Sébastien Lardeux, secrétaire de l’UD FO de Mayenne. On ferme des lits et le secteur psychiatrique est en plus grande difficulté encore qu’ailleurs. Nous n’aurons bientôt plus que trente à quarante lits pour tout le département.
Personne ne prend de mesure pour stopper cela. »
(*) « État d’urgences, le quotidien d’une médecin en lutte pour l’hôpital public », Caroline Brémaud, éditions Seuil