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24 / 09 / 2020 | 188 vues
Didier Cozin / Membre
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La crise économique et sociale à venir met nos manques de formation et d'éducation à nu - Ière partie

La crise du covid-19 fait apparaître la faiblesse de notre éducation et de notre formation.
 

Depuis le début des années 2000, institutions, entreprises et familles se repassent inlassablement les patates chaudes que sont l'éducation et la formation tout au long de la vie. Leur manque de moyens financiers n'est pas nouveau (depuis la première loi de 1971, la formation n'a jamais eu les moyens de ses ambitions) mais la faible appétence de nombreux travailleurs et organisations pour changer, apprendre, former et s'adapter pèse surtout sur nos compétences et sur la compétitivité des entreprises.
 

Cinquante ans après mai 1968, les trois piliers éducatifs de notre société se dérobent.
 

  • Les familles s'investissent peu ou sont accaparées par d'autres sujets loin de la question de l'éducation des enfants. Occupées à gagner leur vie ou à acquérir un confort matériel, elles se reposent (ou se déchargent) trop sur l'école et les professionnels de l'éducation.
  • Les enseignants et le système scolaire sont désorientés par la société de la connaissance, souvent à bout de forces (on l'a constaté durant la pandémie). Les écoles en restent à l'obligation scolaire de Jules Ferry au sein d'une société où le savoir et l'informations sont désormais partout.
  • Le troisième pilier éducatif du pays (les entreprises) se dérobe aussi : déstabilisées par la succession de crises sociales, monétaires, économique et assaillies d'obligations et d'injonctions, elles considèrent la formation de loin (hormis l'adaptation au poste de travail), ne la prenant guère en compte.
     

Les réformes de la formation de 2014 et 2018 ont fortement contribué au désengagement éducatif des entreprises.
 

En prétendant organiser, financer et comptabiliser la formation de 30 millions d'actifs via le compte personnel de formation, l'État a largement contribué au désengagement des entreprises.
 

Depuis 2014, pour le développement des compétences, l'immense majorité des entreprises, en très grande majorité, renvoient leurs salariés vers un compte personnel de formation pourtant incapable, chaque année, d'assumer la formation de 30 millions d'actifs (une mission d'inspection de l'IGAS/IGS a récemment estimé qu'au-delà de 3 % de personnes formées, le système imploserait ou accroîtrait notre endettement public).
 

L'obligation de formation sur six ans (2014-2020) n'a guère de chance d'être respectée désormais.
 

En 2014, face aux échecs répétés de la formation, l'État a prétendu imposer une obligation de gestion des parcours professionnels aux entreprises. Las, cette obligation ne pourra pas être respectée ni même sans doute mise en œuvre cette année.
 

L'obligation de formation est dans une impasse en 2020.
 

  • Cette année, elle coïncide avec une crise économique et sociale à nulle autre pareille.
  • Elle ne concerne qu'une minorité d'actifs (salariés des entreprises de plus de 50 personnes), soit environ un quart des actifs, 8 millions de personnes sur un total de 30 millions.
  • Cette obligation n'est assortie d'aucune sanction financière pour les TPME alors que c'était justement dans les TPME que l'on formait le moins.
  • Cette obligation indifférenciée selon le niveau de qualification des gens est inadaptée pour un ingénieur (qui passe souvent 10 % de son temps travaillé à se former) ou un ouvrier non qualifié (qui passe en moyenne 6 petites heures par an en formation).
  • Les employeurs des salariés précaires (ou des travailleurs non-salariés) ne sont pas soumis à cette obligation, les sous-traitants, ceux salariant à temps partiel ou reprenant des contrats de travail sont dans le flou complet pour le contrôle de leurs obligations de formation.
  • Les trois versants de la fonction publique employant 6 millions de fonctionnaires ne sont pas touchés par l'obligation de formation alors qu'ils sont très loin de régulièrement former tout leur personnel (au sein de l'Éducation nationale, plus grand employeur de France, les formations sont rares, souvent inadaptées et faiblement professionnalisantes).
  • Les textes de loi de 2014 et 2018 sont hésitants, mal rédigés et ont été réécris à deux reprises ; ils sanctionnent les employeurs en laissant la place à toutes les interprétations ou dérives. Entre les employeurs qui sont incapables de produire le moindre bilan, ceux qui maquillent la réalité et ceux qui déclarent n'avoir aucun moyen pour payer leur amende (par exemple 3 millions d'euros  pour 1 000 salariés non formés), la confusion est hautement probable pour la fin d'année 2020 (à moins d'un report salutaire d'au moins un an),

 

Fin de la première partie.

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