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29 / 03 / 2021 | 276 vues
Bertrand arnould / Membre
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« Il faut s’y mettre » : pour un télétravail total et à jamais

« Il faut s’y mettre », a imploré notre Président évoquant le télétravail, mardi 23 mars ? Oui. C’est vrai, « il faut s’y mettre », de manière totale, une bonne fois pour toutes, crise ou pas crise, en traitant le télétravail pour ce qu'il est. Car il deviendra enfin possible à chacun de manger des chips et passer l’aspirateur sans plus faire semblant d’écouter son manager et ses collègues monologuer, leurs propos ne revêtant pas le moindre intérêt pour faire ce pour quoi l’on est rémunéré.

 

Il faut vraiment s’y mettre mais, cela impliquera d’adhérer à trois présupposés.

  1. Le télétravail n’est en aucune manière un mode d’organisation du travail. Il est d’abord un phénomène de la vie, totalement équivalent au fait de travailler assis à son bureau. En revanche, c’est ce que l’employeur va être dans l’obligation d’apporter aux salariés, en termes d’outils et de management, pour leur permettre le télétravail qui relèvera, lui, de l’organisation du travail.
  2. Le télétravail doit être du choix libre de tout salarié : c’est la conséquence de ce qui précède. Tout salarié doit être libre d’y recourir comme d’être libre de ne pas y recourir, selon ses aspirations et contraintes de vie, et sans jugement de valeur aucun, de ses collègues ou de ses managers.  
  3. Le télétravail n’est évidemment pas possible pour tous les métiers : qui imagine les artisans des cristalleries de Baccarat et de Saint-Louis, les employés de la fromagerie de Roquefort ou des ganteries de Millau travailler à distance de leur site ?

 

Pourquoi ces trois précisions ? Parce que l’époque est à la pensée binaire et que les réflexions sur le sujet n’y échappent pas (« je suis pour », « je suis contre »). Surtout, parce qu’employeurs et syndicats, en ne laissant pas la totalité du choix d’un télétravail total ou partiel au salarié le privent  (volontairement ?) de la possibilité de faire les choix de la vie qui lui incombent pourtant, en tant qu’individu à la fois libre et pluriel : salarié, certes, mais aussi citoyen, parent, ayant des compromis à trouver et des contradictions à surmonter… 

 

Défendre le télétravail total, c’est tutoyer des évidences : permettre à chacun de rester près d’un aïeul en fin de vie, de davantage s’occuper de ses enfants, d’éviter de s'agglutiner deux heures par jour dans des transports en commun nauséabonds, d’accéder à un logement plus grand pour sa petite famille, d’animer l’économie et la vie de sa commune…

 

En un mot : défendre le télétravail total, c’est prendre le salarié pour ce qu’il est, à savoir un être non réductible à sa capacité de production. C’est libérer l’individu de toutes les croyances et les névroses d’une direction et de son management qu’il n’a pas à subir : les vies de chacun sont aujourd’hui suffisamment complexes. C’est faire du syndicalisme un levier d’émancipation des salariés, promus et respectés dans leur être global. Pour mémoire, rappelons que tous les dirigeants syndicaux réunis, quand ils défilent sur le tout petit perron de Matignon, ne parviennent même pas à réunir l’adhésion de 10 % des salariés, au nom de qui ils s’expriment pourtant. Pourraient-ils enfin y voir un levier d’adhésion ?

 

Concrètement : l’époque n’est plus tant, dans le cadre du dialogue social, à réfléchir à deux ou trois jours par semaine de télétravail qu’à penser l’organisation compatible avec le télétravail total que l’employeur aurait alors l’obligation d’apporter au salarié pour garantir sa santé (L.4121-2 du Code du travail). Il est temps de massivement investir dans les tiers-lieux (entre le domicile et le site historique de travail), penser au partage des économies faites sur l’immobilier, s’assurer de la formation et du développement des compétences du management, compenser les surcoûts pour le salarié du télétravail (électricité etc;), entre autres…

 

Alors, l’entreprise se saisira d’un levier fondamental de sa responsabilité sociale, assumée sans coût supplémentaire dans l’intérêt des économies locales et sur la base d’une considération grandie de ses salariés.

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