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06 / 02 / 2020 | 204 vues
Jean Meyronneinc / Abonné
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Le potentiel de leadership, critère central de recrutement des futurs hauts fonctionnaires

Synthèse des enseignements tirés par Isabel Marey Semper (présidente des jurys des concours d'entrée à l'ENA) dans son rapport à un moment où les réflexions vont bon train sur le sujet et à l'avant-veille des conclusions toujours attendues de la mission confiée à Frédéric Thiriez sur la réforme de la haute fonction publique.

Principaux éléments à retenir

  • Des concours qui restent très attrayants : un sentiment exprimé lors des échanges de l’épreuve d’entretien par les 190 candidats admissibles.
  • Un franc succès remporté par l’ouverture du concours aux docteurs ès-sciences, créé en 2019, à titre expérimental pour une durée de cinq ans.
  • Le potentiel de leadership : critère central de recrutement des futurs hauts fonctionnaires.

 

La présidente souligne qu'au-delà de tester les connaissances académiques et techniques, prérequis indispensable, la logique de l’ensemble des épreuves écrites et orales a consisté à sélectionner des candidats au profil présentant les caractéristiques suivantes :
 

  • sachant élaborer une vision stratégique à partir de la compréhension fine des enjeux sur le terrain, et en mesure de formuler le sens des actions de transformation ;
  • détenant du sens politique et une compréhension de la complexité, c’est-à-dire capables d’une juste anticipation des appuis et des résistances ;
  • capables de mener une équipe en créant les conditions de la coopération entre collaborateurs et avec d’autres services ;
  • sachant trancher et prendre des décisions, les mettre en œuvre et soucieux de leurs effets sur les usagers ;
  • capables de douter et de remettre leurs idées en cause ;
  • innovants en étant force de propositions nouvelles, meilleures et différentes ;
  • dotés d’un rapport sain à l’autorité ;
  • disposant d’un sens éthique et d’une confiance en soi mesurée (ni trop humbles, ni trop arrogants) ;
  • et enfin faisant preuve de courage et d’intelligence des situations, en particulier en matière de relations humaines y compris dans un contexte d’adversité.

 

Une promotion 2020-2021 très diversifiée, bien éloignée des clichés sur la reproduction des élites dirigeantes

Sur  les 82 admis :

  • 45 sont nés en province, 35 en Île-de-France et 2 à l’étranger ;
  • 11 ont réalisé une partie de leur scolarité en zone ou réseau d’éducation prioritaire ;
  • 30 ont été boursiers de l’enseignement supérieur sur critères sociaux, dont 10 ont reçu une aide au mérite pour boursier sur critères sociaux.
     

Concernant la catégorie socio-professionnelle du père :

  • 47,5 % enseignants (primaire, secondaire ou universitaire) et cadres du privé/public,
  • 15 % professions libérales et intellectuelles,
  • 8,8 % professions intermédiaires,
  • 8,8 % artisans ou commerçants ;
  • 6,3 % employés,
  • 6,3 % inactifs,
  • 5 % ouvriers,
  • 1,3 % dirigeants d’entreprise,
  • 1,3 % agriculteur exploitant.
     

Concernant la catégorie socio-professionnelle de la mère :

  • 38,3 % enseignants (primaire, secondaire ou universitaire) et cadres du privé/public,
  • 17,3 % professions libérales et intellectuelles,
  • 16 % professions intermédiaires,
  • 12,3 % employés,
  • 8,6 % inactifs,
  • 7,4 % artisans ou commerçants.

46 ont effectué leurs études à l’université et n’ont pas suivi de classes préparatoires aux grandes écoles.


En revanche, les admis ont tous un niveau d‘études élevé puisque 71 élèves sont titulaires d’un diplôme équivalent à bac+5, 9 ont un doctorat ou un doctorat en cours, les 2 restants une maîtrise et une licence.
 

29 femmes et 53 hommes composent la promotion 2020-2021.
 

La recherche de la parité reste un enjeu majeur du concours de l’ENA.
 

La difficulté se situe en amont des concours puisque les femmes n'ont représenté en 2019 que 36,6 % des présents au concours externe, 35,1 % des présents au concours interne, 43,4 % des présents au 3e concours, 22,9 % des présents au concours externe spécial réservé aux docteurs.
 

Principales recommandations formulées
 

La présidente souligne que :

  • les  concours d’entrée à l’ENA pourraient être effectivement simplifiés et préconise deux voies d'accès  uniquement au lieu de quatre : la voie étudiante et la voie professionnelle ;
  • le nombre de places pourrait être augmenté afin d’obtenir une diversité encore plus forte ;
  • les écrits devraient être dédiés à l’évaluation des matières académiques et techniques, en privilégiant les raisonnements et les propositions innovantes, les oraux seraient alors centrés sur l’évaluation des compétences de leadership.
     

Cependant, le véritable enjeu pour elle se trouve à sa sortie et tout au long de la vie professionnelle des énarques. Ainsi, avant même toute modification du recrutement, il lui semble que trois évolutions sont nécessaires pour une plus grande efficacité de l’action de la haute fonction publique :

  • l’attribution du poste devrait s’effectuer systématiquement selon la motivation, l’adéquation des compétences et du potentiel des candidats hauts fonctionnaires aux missions et enjeux de ce poste ;
  • une véritable gestion des ressources humaines des 20 000 hauts fonctionnaires devrait être mise en place pour assurer leur développement professionnel, avec des règles d’évaluation des performances partagées ;
  • et enfin les conditions devraient être créées autour des hauts fonctionnaires pour les inciter à coopérer dans l’intérêt du développement de la France et au service des usagers ; cela consisterait, par exemple, à donner du cadrage stratégique sur certains sujets, à davantage déléguer la manière d’atteindre un objectif et à fixer des objectifs communs.
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