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24 / 05 / 2019 | 161 vues
Jean Louis Cabrespines / Membre
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L’économie sociale et solidaire (ESS) n’est pas soluble : deux bonnes nouvelles

Quand on voit ce que nous demandons depuis des mois enfin se concrétiser, nous ne pouvons qu’être satisfaits.


En effet, deux informations dans la sphère de l’ESS viennent coup sur coup d'apporter un peu de baume au cœur de ceux qui la défendent et qui rappellent ce qu’elle représente pour l’évolution de l’économie.


Dire et répéter que ses valeurs fondatrices ne doivent pas être déniées, que l’ESS n’est pas soluble dans un entrepreneuriat qui lui prend le meilleur pour le marier avec l’économie capitaliste, que la place des acteurs est essentielle dans le développement économique, que les entreprises sont inscrites dans leur territoire, en lien et en concomitance avec l’économie publique etc. peut parfois donner l’impression de prêcher dans le désert.
 

Dire et répéter que ce n’est que par un regroupement des acteurs (publics, privés et universitaires comme entrepreneurs), des structures, des concepteurs etc. que nous arriverons à faire de l’ESS un modèle nous conduisant parfois à la limite de notre investissement lorsque l’on voit triompher un succédané de l’économie traditionnelle avec quelques bribes de ce qui fait le fondement de l’ESS.
 

Répétons aussi que le fait d’avoir permis l’entrée de l’entrepreneuriat social dans le périmètre de l’ESS sans avoir mis les garde-fous nécessaires en place a mené à ce que nous donnions un blanc-seing à certaines entreprises qui sauront utiliser l’ESS comme outil de communication.
 

Heureusement, il semble que certaines entreprises sociales aient compris ce qu’est l’ESS et qu’elles en respectent, a minima, les règles fondamentales mais pas toutes : tant qu’elles ne seront pas porteuses d’un projet collectif, elles auront l’odeur et l’apparence de l’ESS mais n’en seront pas véritablement.
 

ESS France
 

Alors, les bonnes nouvelles nous rassurent et nous permettent de penser que, comme le dit Jérôme Saddier, président d’ESS France : « Nous sommes l’économie de demain ».
 

Les tentatives de regroupement des acteurs de l’ESS sont restées vaines jusqu’à présent mais voilà que se produit ce que nous espérions tous pour réellement faire valoir le poids de l’ESS dans l’économie, pour lui permettre de se faire reconnaître nationalement et internationalement : la décision a été prise que tous se retrouvent sous la même bannière au sein d’ESS France, chacun gardant son identité et son approche spécifique.
 

Nous appelons de nos vœux que cela perdure et ne soit pas simplement une réponse à une injonction du haut commissaire qui voudrait ainsi avoir une mainmise sur l’ESS. Si tel était le cas, il y a fort à parier qu’il trouverait un nombre important d’acteurs et d’entreprises pour lui rappeler ce qu’est l’ESS née de la volonté de gens engagés dans une démarche économique humaniste et pour lui rappeler également que l’ESS vit et se développe dans les territoires plutôt que par une volonté politique opportuniste.
 

Comme le souligne Dominique Joseph, secrétaire générale de la Mutualité Française, dans son interview au FIL CIDES du 23 avril 2019 : « Pour nous rendre plus visibles et lisibles auprès des pouvoirs publics et du grand public, nous envisageons un regroupement des instances prévues par la loi : le CNCRESS et ESS France. Nous avons des rendez-vous statutaires en juin et en fin d’année pour travailler sur les modalités de ce rapprochement, sachant que, dans l’ESS, la préparation de cette transition nécessite la prise en compte de tous les participants.
 

Et les territoires sont très importants. À Paris, la vision de l’ESS peut sembler éloignée de la réalité. Mais quand on va au plus près des territoires, les mutuelles et les associations sont reconnues et respectées, sollicitées même quand il s’agit de répondre aux besoins de la population. Il faut concilier cette réalité des territoires avec la reconnaissance à Paris. C’est un cercle vertueux à mettre en place avec des échanges qui partent du territoire vers Paris et vice et versa ».
 

Restons vigilants pour que l’ESS dans les territoires garde pleinement son autonomie liée au développement local et ne soit pas simplement la courroie de transmission de politiques nationales plus ou moins indépendantes des familles de l’ESS et (pire encore) des politiques gouvernementales. Nous savons la volonté du nouveau président d’ESS France de maintenir cette cohésion tout en préservant les prérogatives de chacun, nous espérons qu’il n’aura pas à se battre pour les faire valoir et en permettre l’application.
 

Pour parler d’une même voix dans le secteur sanitaire, social et médico-social
 

La deuxième bonne nouvelle est celle d’un autre regroupement : la « naissance de la confédération des employeurs du secteur sanitaire, social et médico-social à but non lucratif ».
 

Dans leur communiqué de presse, la Croix-Rouge française, la FEHAP, Nexem et Unicancer informent de leur rassemblement, le 17 avril 2019, « à l’occasion de l’assemblée générale constitutive de la Confédération des employeurs du secteur sanitaire, social et médico-social à but non lucratif. Cette confédération est née de la volonté de travailler ensemble à l’organisation du secteur et de le doter d’une représentation patronale unique ».
 

À combien de discussions avons-nous assisté avant de voir se constituer cette confédération, y compris au moment du départ de certains grands acteurs de la FEHAP vers un syndicat multi professionnel ? Même si le regroupement au sein de l’UDES est souhaitable, le respect de ce que sont, spécifiquement, les associations du secteur sanitaire, social et médicosocial mérite qu’il puisse y avoir regroupement pour faire entendre leur voix.
 

Le communiqué se termine en indiquant que « la naissance de cette confédération va permettre aux employeurs du secteur de porter une ambition commune pour le sanitaire, social et médico-social et de promouvoir la pertinence du modèle non lucratif. De même, elle ouvre la voie aux négociations à venir, tant pour la construction d’un socle juridique commun sur des thématiques données (formation professionnelle, qualité de vie au travail, nouveaux métiers etc.) que pour les sujets propres à certaines composantes de la confédération et de leurs adhérents ».
 

C’est une bonne nouvelle et cela doit aussi permettre, au sein de l’ESS, que le secteur sanitaire, social et médico-social ait une véritable représentation employeurs porteuse de leurs particularismes.
 

Alors, tout semblerait s’améliorer dans le paysage des acteurs de l’ESS. Peut-être mais si « une hirondelle ne fait pas le printemps », une bonne nouvelle ne fait pas l’émergence et la reconnaissance de l’ESS par les pouvoirs publics.
 

Ce que souligne d’ailleurs Dominique Joseph dans son interview : « L’ESS est une réalité : environ 10 % du PIB et de l’emploi en France. Malheureusement, les entreprises de ce secteur ne sont pas suffisamment prises en compte à Bercy. Il n’y a pas de ministère de l’ESS mais un Haut-Commissaire auprès du Ministère de la Transition écologique. C’est une négation de la part des pouvoirs publics d’une vraie place pour l’ESS, dès lors que c’est à Bercy que se décident les grandes orientations économiques ».
 

Moins de clivages et plus de nouvelles idées
 

Car nous en sommes là : quand les acteurs arrivent à dépasser leurs clivages, le pouvoir en place ne tient pas compte de ce qu’ils sont et de ce qu’ils font, il avance seul et les acteurs sont obligés de se plier aux détenteurs de ce pouvoir s’ils veulent obtenir l’aide nécessaire : la fragilité du secteur laisse libre champ à ceux qui le financent ; les regroupements pourront peut-être donner plus de force et de vigueur à ceux qui œuvrent quotidiennement à la défense et au développement de l’ESS.


Ne désespérons pas car la relance de nouvelles idées pour le développement économique et social, porteur de nouveaux champs d’investigation pour la société et pour l’ESS, incitateur de rencontres et d’échanges, se concrétise et est en train de gagner du terrain.
 

Sans doute cela est-il représentatif d’une volonté de gens qui, après un temps d’étouffement et de sidération face à une situation de plus en plus insupportable du fait des inégalités, des révoltes avortées car insuffisamment organisées, cherchent à partager des espoirs et des actions.
 

Ainsi, pendant trois jours, La Charité-sur-Loire sera le berceau de ce foisonnement de réflexions et de propositions, lors du festival des idées : « C'est un festival ouvert, politique, culturel, convivial et festif. Il propose des formats de débats innovants pour que chacun puisse s’exprimer. Trois jours de tables rondes, débats inversés pour que la parole soit partagée, expériences vécues, ateliers de concertations, forums, world cafés, dialogues à domicile avec les Charitois, balades commentées, speed-dating de la pensée, concerts… Tout sera affaire d’échanges et de rencontres dans une belle ambiance. Le festival se déroule dans un site exceptionnel, la Cité du Mot, un ancien prieuré, mais aussi dans l'ensemble de la ville, au Bazar Café, café littéraire et artistique, sur les places, dans les rues et chez les habitants qui le souhaitent. Pendant ces trois jours, des citoyens, de tous les horizons, de toutes les générations, de toute la France et même de l’Europe vont débattre. Le festival invitera bien entendu des écrivains, des danseurs, des peintres, des chercheurs, des représentants d'associations ou de syndicats, pour différents formats » (https://www.helloasso.com/associations/festival-des-idees/collectes/participez-au-festival-des-idees-5-6-7-juillet-2019-a-la-charite-sur-loire).
 

Alors, oui, il y a lieu d’être un petit peu plus optimistes, sous réserve de savoir nous organiser, ce que les initiatives présentées ici semblent montrer.
 

Faisons en sorte que cela perdure pour que notre conception d’une ESS plus présente et davantage prise en compte gagne et que les pouvoirs publics n’aient pas la possibilité de nous imposer leur vision mais bien de travailler en partenariat avec nos représentants.

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