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30 / 11 / 2015 | 11 vues
Didier Cozin / Membre
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Le DIF dans la fonction publique, une bulle de formation à 20 milliards d'euros (2ème partie)

Le DIF est à l'arrêt dans la fonction publique car, à l'instar des entreprises privées,  les administrations n'ont pas été capables de remettre en question un système de formation qui tourne à vide.

L'explication d'un manque d'intérêt des fonctionnaires pour le DIF ne tient pas la route car elle n'a jamais été vérifiée.

L'explication commode, la réponse simpliste (usée jusqu'à la corde en 2013 pour faire disparaître le DIF des salariés du privé) et cette fausse évidence d'un DIF inadapté ne tiennent pas la route face à la mise en œuvre lamentable du CPF le remplaçant.

  • Les diplômes ou titres indiffèrent la plupart des salariés et leurs employeurs. Ces derniers recherchent des travailleurs compétents et motivés, pas des travailleurs exposant des parchemins éloignés des besoins du travail.
  • La complexité n'est pas plus recevable car le dispositif censé remplacer le DIF est 10 fois plus complexe, difficile et aléatoire que ne l'était le DIF (qui nécessitait en revanche un dialogue social de qualité dans l'entreprise).
  • La durée du DIF était parfaitement adaptée aux besoins et aux demandes des entreprises et des travailleurs qui n'ont pas 500 ou 2 000 heures pour se former, que ce soit pendant ou en dehors de leur temps de travail.
  • La transférabilité des heures de DIF d'un employeur à l'autre ou chez Pôle Emploi était encore un faux problème aussi bien pour les salariés que  pour les chômeurs (qui comprendrait que l'on « mégote » quelques centaines d'heures de formation à un chômeur s'il a un vrai projet de reconversion ?).
  • Le DIF était de la responsabilité de l'employeur (et de son OPCA) et si le Code du travail avait été respecté (mais on préfère l'inflation de lois à leur mise en application) aucun salarié n'aurait dû voir sa demande de DIF non financée ou refusée (ce que la loi ne permettait pas).
  • Le dernier argument était son manque de financements. Le CPF accroît le problème en prétendant faire reposer la réforme sur une cotisation de 0,2 % de la masse salariale (et pour les seules entreprises de plus de 10 salariés).

Du fait de l'échec avéré, instantané et définitif du compte personnel de formation, les millions de travailleurs de l'État qui « bénéficient » du DIF ne sont pas près de le voir disparaître.

Ce dispositif virtuel de formation qu'est le DIF (il est virtuel tant que l'employeur ne le met pas en œuvre loyalement) remet en cause la formation continue des fonctionnaires (comme il remettait en cause la formation des salariés du privé).

Le DIF ne fonctionne pas dans la fonction publique parce qu'il se heurte aux conformismes des administrations (les préparations aux concours et les coûteuses et peu efficientes écoles d'application) et qu'il nécessite une confiance réciproque (l'immense majorité des travailleurs en 2015 n'a pas besoin que l'employeur réfléchisse à son avenir à sa place).

Les administrations n'ont pas confiance en leurs propres troupes et veulent tout contrôler :

  • ce qu'apprennent leurs salariés,
  • avec qui ils apprennent (le mythe de l'organisation capable de se former elle-même sans apport de sang ou d'idées neuves),
  • comment ils apprennent (les préparations aux concours, le bachotage tenant lieu de développement des compétences restent une spécialité hexagonale).

Tester loyalement le DIF pendant 3 ou 4 ans dans la fonction publique est possible.

Pour savoir si le DIF intéresse et concerne (ou pas) les fonctionnaires, l'administration doit pouvoir (8 années après sa naissance !) communiquer des catalogues DIF, des prises en charges et des budgets pour former et se former.

La meilleure façon de connaître l'utilité du DIF des fonctionnaires est de le proposer loyalement à tous les fonctionnaires (avec les budgets et les moyens organisationnels ad hoc).

Si après 3 ou 4 années de promotion et d'ouverture sincère et loyale du DIF aux agents du public on constatait qu'il ne fonctionne toujours pas, on pourrait alors dans ce cas reconsidérer son existence (mais dès lors qu'une organisation le prend à cœur et se donne les moyens de le développer, on découvre son potentiel).

Aujourd'hui, les pouvoirs publics sont dans une voie de garage avec le DIF.

  • Il serait très périlleux de verser les centaines de millions d'heures de DIF sur des comptes personnels de formation, sauf à inventer de nouvelles modalités de formation des fonctionnaires (et des OPCA pour la fonction publique).
  • Mettre tout dans un pot commun signifierait aussi que les fonds de formation des administrations serviront à former les chômeurs (et pourquoi pas les anciens fonctionnaires souhaitant travailler dans le privé ?).
  • Le CPF et la réforme étant un total (et bientôt retentissant) échec, il sera impossible à l'État de trouver des arguments pour ajouter du chaos au marasme actuel de la formation.
  • Les 20 milliards d'euros de droit à la formation dus aux fonctionnaires devraient être réglées par l'État, la facture de l'immobilisme et de l'attentisme qui règne dans ce domaine depuis huit années.

Des issues de secours existent, elles ne vont pas de soi mais restent possibles.

1- Une solution courageuse : lancer réellement et sincèrement le DIF des fonctionnaires en dégageant de nouveaux moyens financiers (4 milliards par an) tout en remettant à plat les formations actuelles des trois fonctions publiques (entre autres, l'existence du CNFPT ou des concours et de leurs préparations).

2- Une solution révolutionnaire : restaurer le DIF des salariés du privé après avoir constaté que le CPF était une erreur et un contre-sens total (erreur conceptuelle organisationnelle, éducative, sociale et financière).

Mais cette seconde solution est une autre histoire, plus politique que sociale.

 

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