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12 / 08 / 2015 | 2 vues
Laurent Degousée / Membre
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Loi Macron : ce n'est qu'un début, continuons le combat...

Le Conseil constitutionnel, saisi le 15 juillet dernier par Les Républicains ainsi que par la CGT, le SAF et le SM (pour ces derniers, par le mécanisme dit de la porte étroite) a, entre autres ce 5 août, censuré l’article de la loi sur la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite « loi Macron »), relatif au plafonnement des indemnités prud’homales suite à un licenciement abusif.

Un premier revers qui en appelle d’autres

Contrairement à nombre de commentateurs médiatiques, la loi est loin d'avoir été validée dans son ensemble : seuls 20 articles sur les 308 que compte la loi ont été déférés devant le Conseil constitutionnel qui en a rejeté pas moins de 5 auxquels il faut ajouter 18 cavaliers législatifs : on est donc loin d'une loi dont « 98 % des mesures sont validées », comme l'affirme le ministre.

Comme le Conseil ne s'est pas d'office saisi d'autres questions, la voie reste ouverte pour un certain nombre de QPC. Rien que sur le travail dominical (une disposition qui n'était pas attaquée par la droite et pour cause), nous en avons identifié pas moins de trois :

  • le fait que le maire de Paris soit le seul de France qui ne peut décider de l'attribution du nombre de dimanches dits « du maire » et ce en raison de la compétence préfectorale en la matière (la municipalité parisienne a manifesté son intention bienvenue de déférer cette disposition antérieure à la loi Macron) ;
  • la création, par décision ministérielle, de zones touristiques internationales passant outre l'accord des maires concernés, alors qu'en 2009, ce même conseil avait censuré (ô ironie) une disposition similaire de la loi Maillé, appliquée aux zones touristiques suite à une saisine des parlementaires PS ;
  • une rupture d'égalité entre les salariés des entreprises de moins de onze qui pourront ouvrir suite à un accord unilatéral de l'employeur, qui devra cependant passer par une consultation du personnel concerné, et ceux des plus de onze, pour lequel il y a nécessité d'un accord syndical majoritaire (pouvant être recherché à différents niveaux).

Errare humanum est, perseverare diabolicum.

Il est d'autant plus important de maintenir la pression que le gouvernement est déterminé à de nouveau légiférer sur la question du plafonnement. Cette obstination peut cependant lui revenir comme un boomerang car le Conseil, en écartant toute référence à la taille de l'entreprise en matière d'indemnisation du licenciement, a ouvert la voie à l'unification du régime actuel qui, bien que non plafonné, fixe lui une différence entre les salariés des entreprises de moins et de plus de onze. Cette limite pourrait être exploitée par un avocat travailliste ou un défenseur syndical astucieux dans le cadre d'un contentieux prud'homal concernant un salarié d'une TPE et ce sans attendre une loi Macron 2.

Plus largement, il importe aux syndicalistes combatifs comme aux forces politiques progressistes qui n’ont pas renoncé à résister à l’air du temps de porter un coup d’arrêt au détricotage du droit du travail, à l’œuvre depuis une dizaine d’années sous tous les gouvernements, avec le résultat mirifique en termes d’emplois que la montée inexorable du chômage rappelle cruellement mois après mois.

C’est également en menant des campagnes unitaires sur le long terme, avec des revendications pour des droits nouveaux tels que la réduction du temps de travail à 32 heures, l’instauration d’une sécurité sociale professionnelle, d’un droit de veto pour les comités d’entreprises ou le droit à réintégration du salarié à son poste de travail en cas de licenciement abusif, qu’on battra en brèche l’idée tenace d’absence d’alternative et qu’on parviendra à susciter les mobilisations populaires nécessaires et dignes de ce nom car, comme l’a écrit Pierre Bourdieu, « L’histoire sociale enseigne qu’il n’y a pas de politique sociale sans un mouvement social capable de l’imposer ».

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Bonjour Laurent, Votre article vient en parfait lien avec celui que j'ai déposé. Comme nous en faisons mention, le gouvernement souhaite revenir au plus vite (Macron 2.0 en septembre 2015 ?) pour entériner l'aspect du plafonnement (via des astuces technico juridiques). Au-delà du fait que nous soyons en phase sur une action à enclencher, comment CONCRETEMENT pouvons-nous apporter notre "pierre" à l'édifice et suggérer fortement au gouvernement d'entendre la voix des instances sociales ? Devons-nous passer par nos amis bretons qui ont l'art et la manière de savoir se faire entendre ? Qui peut glisser un "petit mot doux" dans le smartphone de notre Ministre ?