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29 / 09 / 2011 | 3 vues
Didier Porte / Membre
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L’entretien préalable à la rupture conventionnelle : vers un contrôle approfondi ?

Il ne fait nul doute que depuis son entrée en vigueur le 25 juin 2008 (loi n° 2008-596), la rupture conventionnelle fait partie intégrante des dispositifs de rupture du contrat de travail. Même s’il faut rester vigilant sur les dérives possibles, la mise en œuvre de ce mode de rupture, fondé sur la liberté contractuelle, nécessite le respect par les parties d’une procédure impérative ayant pour but de garantir l’existence d’un consentement libre et éclairé des parties.

Ainsi, pour répondre à cet objectif, le Code du Travail (L. 1237-11 et suivants) exige que soient cumulativement remplies les conditions suivantes : la tenue d’au moins un entretien préalable, la faculté d’être assisté, le délai de rétractation de quinze jours, l’homologation par l’autorité administrative (à condition que les inspections du travail bénéficient de moyens suffisants !).

De telles précautions procédurales avaient également pour objectif de limiter les risques de recours. Pour l’heure, nous avons pu constater que les recours en justice se faisaient rares et ne mettaient en exergue que quelques litiges (refus d’homologation, contournement de la procédure de licenciement pour motif économique, existence d’un litige).

  • Néanmoins, un jugement récent du conseil de prud’hommes de Toulouse (24-5-11, RG n° 09/03585) semble, à notre plus grande satisfaction, orienter le contrôle des juges du fond sur un nouveau point : la forme et la teneur de l’entretien préalable à la rupture conventionnelle !

Une telle initiative est d’autant plus appréciable qu’il est vrai que ni l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, ni la loi du 25 juin 2008 n’avaient évoqué la question.

Les faits


Pour résumer les faits de l’espèce, d’une part, la rupture conventionnelle du salarié intervenait dans un contexte social et économique difficile, d’autre part, les circonstances dans lesquelles le salarié avait exprimé son consentement étaient douteuses. Les juges du fond ne se sont attachés qu’aux conditions de l’entretien.

Ils relèvent que la date d’entretien mentionnée dans le formulaire CERFA est fausse puisqu’à cette date le salarié se trouvait en congés à l’étranger. Toutefois, pour attester de l’existence du consentement du salarié à la rupture conventionnelle, l’employeur produit un courriel du salarié, bel et bien daté antérieurement à la signature de la convention de rupture.

Pourtant, cet élément n’est pas suffisant car « pour que la procédure puisse être considérée comme respectée, encore faut-il qu’il s’agisse de véritables entretiens permettant au salarié de donner un consentement éclairé. En l’espèce, le document produit par l’employeur ne permet aucunement de se convaincre de l’existence d’entretiens remplissant cette condition. Il est au contraire fait état non d’un véritable entretien mais d’une alternative qui aurait été posée à M. X entre un licenciement et une rupture conventionnelle. Aucun élément de ce courriel ne permet de considérer que les modalités de la rupture auraient fait l’objet d’une discussion. Il s’en déduit qu’on voit mal comment il pourrait être considéré que le consentement du salarié était bien éclairé. Ceci est de nature à vicier l’ensemble de la procédure ».

  • Ainsi, nous pouvons nous réjouir de constater que le conseil de prud’hommes va au-delà du simple contrôle de la tenue d’au moins un entretien puisqu’il vérifie si les discussions entres les parties ont bel et bien eu lieu, de manière à ce qu’en temps utile, le salarié ait pu bénéficier d’informations nécessaires à l’expression de son consentement.

En l’espèce, le fait que le salarié n’ait pas pu participer à de véritables échanges avec son employeur ne fait nul doute puisque la rupture conventionnelle lui a été présentée comme étant la seule alternative possible à son licenciement.

La discussion ne doit pas être fictive ! Il convient alors, pour s’assurer qu’elle ne le soit pas et, de la même manière, afin de mettre le doigt sur les conventions de rupture conventionnelle signées sans réelle intention des salariés, d’espérer que ce jugement ait véritablement ouvert la voie à un contrôle systématiquement plus approfondi de l’entretien préalable.
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