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14 / 03 / 2011 | 8 vues
Jean-Pierre Yonnet / Abonné
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Accord et plans d'action a minima : après les seniors, la pénibilité ?

Les projets de décrets d’application du volet pénibilité de la loi portant réforme des retraites viennent d’être transmis aux partenaires sociaux pour une consultation « informelle ». Il est peu probable qu’ils sortent profondément modifiés de cette consultation.

On peut d’abord s’interroger sur le principe même d’une telle consultation. Soit il s’agit d’une vraie consultation, avec une procédure et des délais, comme par exemple en droit européen, soit le législateur assume ses responsabilités. Quel est le sens d’une consultation informelle de quelques semaines ?

Sur le fond, ces décrets confirment sans surprise que la pénibilité est d’abord mesurée à l’aune du taux d’invalidité permanente à l’heure du départ en retraite. Il faut donc « bénéficier » d’un taux de 20 % minimum pour pouvoir partir à 60 ans. Il sera aussi possible de bénéficier de la retraite à 60 ans si l'on cumule un taux d’au moins 10 % et une exposition d’au moins 17 ans à des risques professionnels tels que le travail de nuit, le travail en équipes alternantes, l’exposition à des agents chimiques dangereux etc. (liste limitative de 10 facteurs de risques).

  • Cette conception très restrictive va bien entendu à l’encontre de tous les travaux ergonomiques et épidémiologiques qui montrent que les troubles liés à la pénibilité apparaissent souvent tardivement et réduisent l’espérance de vie sans qu’une incapacité permanente n’ait jamais été constatée.

Vers des accords et des plans d’action aussi peu contraignants que ceux élaborés pour l’emploi des seniors

Le volet négociation d’un accord pénibilité n’a encore fait l’objet d’aucun projet de décret. Seul un projet de décret sur le fonds national de soutien a été soumis à consultation informelle. Or, la loi prévoit bien que les entreprises de plus de 50 salariés des secteurs exposés à la pénibilité devront avoir négocié avant le 31 décembre 2011, sous peine d’une pénalité de 1 % de la masse salariale. Ceci nous rappelle étrangement l’emploi des seniors en 2009. Les entreprises devaient négocier un accord avant le 31 décembre 2009, sous peine, là aussi, d’une amende de 1 % de la masse salariale.

En pratique, les entreprises ont eu le choix entre un accord et un plan d’action. Elles ont dû choisir 3 mesures dans un catalogue de 6, dont beaucoup étaient fort peu contraignantes. Une étude de l’ORSEU avait alors montré le très faible contenu de la quasi-totalité de ces accords et plans d’action.

  • Nous voyons se profiler le même scenario : les entreprises vont avoir quelques mois pour négocier un accord sur un sujet très complexe dans lequel les négociations ont maintes fois échoué. Le dernier échec en date remonte à juillet 2008, lorsque patronat et syndicats n’avaient pu s’entendre sur ce sujet, pourtant déjà prévu par la réforme Fillon de 2003.


Qu’en sera-t-il aujourd’hui ? Une négociation rendue exigeante par un décret soucieux d’améliorer les conditions de travail va-t-elle permettre de conclure entreprise par entreprise (ou branche par branche) des accords qui avaient été impossibles à trouver au niveau interprofessionnel ? Ou bien le dossier va-t-il se clore avec des plans d’action aussi peu contraignants que ceux élaborés pour l’emploi des seniors ? Inutile de dire où va notre préférence, mais aussi notre inquiétude.

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