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22 / 02 / 2011 | 15 vues
Bruno Lefebvre / Membre
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Comment sortir d'une logique dichotomique pour exercer la prévention des RPS ?

En France, le terme « risques psychosociaux » (stress, harcèlement, violences…) connaît un essor considérable depuis une dizaine d’années.

Il est aujourd’hui un enjeu majeur pour les entreprises : les  entreprises ne peuvent plus se permettre de privilégier la recherche de performance au détriment de la santé psychologique des individus. L’enjeu est aussi juridique, médiatique et enfin de dialogue social.

  • Or, à l’heure actuelle, en France, les discours en présence et les pratiques relèvent d’idéologies partisanes, trop souvent antagonistes et parcellaires.

D’un côté, les tenants de l’adaptation individuelle privilégient la prévention secondaire : il s’agit d’aider les individus à « s’adapter au changement ». Le management, notamment de proximité, doit aider les collaborateurs à cette adaptation.

C'est une approche séduisante pour les dirigeants puisqu’elle vise à rendre les collaborateurs plus efficaces, mais souvent mal accueillie par les partenaires sociaux qui y voient une manière de ne pas questionner l’organisation de travail.

D’un autre côté, les tenants d’une approche centrée sur l’organisation du travail, bien souvent dans des discours incantatoires sur ce que l’entreprise devrait faire pour réduire les sources de stress (prévention primaire).

Ils se font alors les porte-voix des salariés, sans toujours proposer des pistes de solutions perçues comme réalistes par les directions générales (exemple : « il faudrait sortir d’une logique de réduction de coûts »).

Il est donc urgent de sortir d'une logique dichotomique pour exercer la prévention des RPS à trois niveaux [1] :
  • La prévention primaire vise à réduire les facteurs de risque en questionnant notamment l'organisation du travail et le travail lui-même
  • La prévention secondaire vise à donner les moyens aux individus de s’adapter et d'aider les autres à s'adapter aux facteurs de risque, notamment en développant des logiques de protection individuelles et collectives.
  • La prévention tertiaire vise à guérir ou accompagner les individus atteints par les facteurs de risque, fragilisés ou vulnérables.


Face à ces pratiques en présence, l’approche doit se faire à ces trois niveaux : après une définition des facteurs majorant les risques psychosociaux, ainsi qu’une présentation de la nécessité d’une approche globale du sujet, un accent particulier est mis sur la description d’une méthodologie de prévention des risques psychosociaux.

Co-construire un dictionnaire de bonnes pratiques managériales

En partant d’une restauration dans l’entreprise de temps d’échange entre managers sur les problématiques rencontrées au quotidien, le lien est fait entre des problématiques individuelles de management et des problématiques collectives et organisationnelles.

Une telle démarche permet :

d’une part d’établir, voire de rétablir, le lien entre les situations de travail vécues par le management de proximité et la perception qu’en ont les dirigeants : trop souvent, les risques psychosociaux trouvent leur terreau dans les décalages de perception entre les personnes sur la définition du « travail bien fait » [2].

Les dirigeants, comme le management intermédiaire et les collaborateurs, doivent s’engager dans la réduction de ce décalage.

d’autre part, d’aider le management intermédiaire à élaborer des remontées à la direction destinées à faire évoluer le travail et son organisation dans le sens d'une réduction des risques psychosociaux.

Enfin, il s’agit de co-construire avec les managers intermédiaires un dictionnaire de bonnes pratiques managériales.

  • Ce dictionnaire pourra ainsi servir de fondement à l’élaboration d’une charte managériale à laquelle l’entreprise pourra se référer et qui présentera la particularité d'être issue des managers de « terrain » en intégrant autant leur vision du « souhaitable » que du « possible »…


Cette approche multiniveaux doit permettre  le dialogue entre direction, IRP, management intermédiaire et salariés, en partant de formulations du problème enfin compatibles.

Gageons que les enjeux actuels de prévention des RPS pourront ainsi laisser place au développement du bien-être au travail, ce qui permettra de faire face aux enjeux humains de l’entreprise de demain : attractivité des entreprises pour leurs talents, cohabitation intergénérationnelle, préservation de l'équilibre vie personnelle/vie professionnelle, intégration de la nouvelle génération.

[1] Stress et risques psychosociaux au travail. Comprendre-prévenir-intervenir Elsevier Masson. Collection Pratiques en psychothérapie - Santé psy et travail. Bruno Lefebvre, psychologue clinicien et Matthieu Poirot, docteur en gestion. Première édition, à paraître le 23 février 2010.
[2] Le travail à cœur, pour en finir avec les risques psychosociaux, La Découverte 2010, Yves Clot.

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