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16 / 06 / 2014 | 3 vues
Louis De Fouchier / Membre
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L’accord sur la qualité de vie au travail, un an après : où l'on voit que la qualité du dialogue en entreprise ne se décrète pas

Un an tout juste après la signature de l’accord national interprofessionnel sur la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle, il serait tentant d’en dresser un premier bilan. 

Nous préférerons souligner combien la position de ses signataires sur la portée de cet accord, et telle qu’exprimée dans le cours-même de sa négociation, pouvait apparaître unie et consensuelle. 

Replongeons nous, en effet, dans le numéro de janvier/février 2013 de Travail et Changement que l’ANACT avait tout entier consacré à la qualité de vie au travail : les parties prenantes à cet accord étaient pour la plupart invitées à s’exprimer sur celui-ci. Toutes faisaient le lien entre « QVT et performances », « QVT et sortie de crise », « QVT et emploi »…

À l’époque, pour la CGT (Jean-François Naton), l’ANI doit marquer l’entrée dans « un éventuel processus de transformation qui sera l'un des chemins de sortie de crise ». Pour la CFE-CGC (Bernard Salengro), « la QVT est (…) un sujet économique lié à la performance ». Pour la CFDT (Henri Forest), « faire le lien entre qualité de vie au travail, qualité des produits et services, emploi durable et performances est une réponse de sortie de crise ». Quant à la position du MEDEF (Benoît-Roger Vasselin), « L’objectif (…) est d’améliorer les conditions dans lesquelles les salariés exercent leur travail et donc les performances économiques de l’entreprise ».

Vision partagée

Au vu du résultat de ces négociations, Cosmose veut croire que le consensus a pu réellement aller au-delà, c’est-à-dire jusqu’à l’idée qu’en matière de travail, « il n’y a pas de bien-être sans bien-faire » (Y. Clot) ni, en conséquence, de bien-faire sans un dialogue vrai, ancré dans le concret et le réel du travail, et impliquant toutes les parties prenantes au destin de l’entreprise : dirigeants, représentants du personnel, salariés et managers. 

Aussi, aujourd’hui, c’est à l’ensemble de ces acteurs, du terrain, qu’il revient de donner vie à cet accord. L’enjeu, pour eux, c’est de recréer une vision partagée de la manière de bien faire son travail, à l’aune des moyens et ressources en présence et des contraintes qui s’imposent à l’entreprise. Ce qui est en jeu, au fond, c’est la possibilité pour l’entreprise de faire des ressorts de sa compétitivité l’affaire de tous, 

Pour y parvenir, ces acteurs doivent souscrire à quatre conditions. Elles peuvent apparaître à rebours de tentations naturelles qui détournent de l’esprit de dialogue pour tendre, trop souvent, vers une logique d’affrontement. En fait, elles traduisent une posture d'ouverture dans le rapport à l’autre et peuvent se résumer comme suit :  

  • La première condition est un parti pris : l’expression sur le travail ne doit pas être considérée comme le symptôme de sa contestation mais, au contraire, celui d’une recherche de son amélioration. En clair, le dialogue se fonde sur la volonté reconnue à tous d’œuvrer dans l’intérêt commun de l’entreprise et des salariés. Ce qui suppose de reconnaître que tous, du dirigeant à l’ouvrier, sont et se sentent personnellement impliqués dans les résultats de l’entreprise, son histoire et son devenir. 
  • La deuxième condition et un état d’esprit : il faut une volonté, sincère, d’écoute et de concertation. Celle-ci constitue l’une des clefs d’un dialogue social et d’un dialogue professionnel opérants. C’est d’elle que l’entreprise puise sa capacité à voir ses contraintes et problèmes (économiques, humains, relationnels…) circuler, appropriés et pris en charge de la base au sommet et du sommet vers la base. Par conséquent, c'est d'elle que l’entreprise puise sa capacité à regarder ses problèmes en face et construire des réponses assises sur la mobilisation et l’implication de l’ensemble de ses ressources. 
  • La troisième condition repose sur la reconnaissance de la vertu du tiers, situé à équidistance des acteurs de l’entreprise : sa fonction est de favoriser le dialogue entre les acteurs, la mise en partage et la compréhension mutuelle de leurs contraintes, de leurs logiques et aspirations respectives et ce, dans une visée bien précise et à la portée opérationnelle : leur permettre d’élaborer ensemble et de façon concertée les réponses aux enjeux, complexes et aux dimensions multiples, qui traversent l’entreprise. Telle est la vision portée par Cosmose.
  • La quatrième condition est un accord, sur le lien entre compétitivité et engagement des salariés mais plus encore entre engagement des salariés et possibilité pour eux de s’accomplir dans le travail : ce qui implique que les ressources collectives et organisationnelles nécessaires à l’accomplissement du travail soient mises à leur disposition. Ces ressources, au nombre de 6, sont interdépendantes : une vraie vision portée par la direction ; des relations fondées sur la confiance ; une autonomie ; la reconnaissance d’une responsabilité personnelle ; l’inscription dans un collectif ; enfin, un management doté de réels leviers, pour expliquer et décider.


Que les acteurs de l’entreprise structurent leur dialogue social et professionnel autour de ces 4 conditions et c’est les performances de leur entreprise qui s’en trouveront gagnantes. Mais, l’adhésion des acteurs, sur le terrain, à ces conditions ne se décrète pas. Elle suppose des convictions, personnelles, profondes et partagées. Par essence, elles ne peuvent être imposées mais bien plutôt suscitées. C'est bien ce à quoi contribue l’ANI. Peut-être est-ce là, d’ailleurs, l’une de ses vertus principales ?

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