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25 / 06 / 2010 | 1 vue
Rodolphe Helderlé / Journaliste
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Des délégués syndicaux et des élus vraiment pros : à quel prix ?

Professionnalisation, voilà un terme fort peu apprécié au sein des centres de formation de la plupart des confédérations syndicales. Comme une crainte que la technique l’emporterait sur la politique revendicative ou que les délégués syndicaux percevraient leur rôle comme un métier en oubliant le volet militant. Le tout sans compter  le risque  inverse de voir des militants devenir plus enclins à la mobilité.

VAE

Il suffit de voir à quel point les syndicats peinent à se saisir de la VAE pour des militants qui n’ont pas forcément conscience d’avoir acquis des connaissances et des savoir-faire particuliers pour mesurer les enjeux de la professionnalisation.

Des employeurs sont d'ores et déjà à l'initiative de VAE pour les délégués syndicaux et élus.

Cumul des mandats

Pas forcément besoin d’être un permanent syndical dans une grande entreprise pour acquérir des compétences et devenir un pro. La tendance est d’ailleurs à la réduction de la part des salariés qui font du syndicalisme à 100 %.

 L’occasion pour les directions de faciliter les retours à l’emploi pour les permanents susceptibles de perdre leur représentativité.

L’occasion aussi pour les syndicats de déléguer davantage les responsabilités entre les militants.

Management par objectif

Voilà qui soulève alors la question de la capacité des syndicats à diriger leurs troupes au sein des entreprises. Une forme de management par objectif voit le jour dans les sections et entre celles-ci et leurs fédérations.

Si les résultats ne sont pas au rendez-vous, on fait le ménage.

Les permanents restent indispensables dans les grandes entreprises. C'est juste l'équilibre dans la répartition des mandats qui est parfois à corriger.

Priorité à la formation syndicale terrain : des besoins énormes

Les besoins de formation des délégués syndicaux sont énormes. Les sujets de négociation sont de plus en plus techniques, de plus en plus nombreux dans un contexte de plus en plus procédurier. Enfin, avec la loi sur la représentativité, il ne s’agit plus simplement de former les cadres syndicaux au niveau des fédérations et des confédérations, mais surtout de répondre aux besoins de celles et ceux qui négocient dans les entreprises.

 Les syndicats ont-ils seulement les moyens de répondre à la demande ? On peut en douter, du moins à court terme, car cela sous entend une révolution dans les modes d'organisation d'une formation dont la pertinence et l'adéquation aux besoins n'a pas toujours été jugée prioritaire. Le tout alors que les subventions accordées par la DGT (Direction Générale du Travail) aux syndicats au titre de la formation des militants sont annoncées à la baisse.

Le gros marché de la formation des élus CE et des CHSCT

Des syndicats qui cherchent aussi à former leurs militants élus dans les CE et les CHSCT.  Mais les centres de formation des syndicats sont loin de percer sur  ce marché archi concurrentiel où des centaines de prestataires, "neutres" ou plus ou proches des élus, profitent à plein du faible taux de syndicalisation des élus du personnel (notamment dans les CE).

Tendance au décloisonnement

 La tendance serait plutôt au décloisonnement dans les organismes de formation indépendants des syndicats. Les stages regroupent de plus en plus souvent des militants étiquetés dans des syndicats différents et des non militants déclarés.

Les instituts des sciences sociales du travail se prennent aussi à rêver à des formations intersyndicales pour se redonner un élan. En attendant, à travers le réseau des 10 instituts des sciences sociales du travail, la CFDT, la CGT et FO, chacune de son côté, demandent à des universitaires de leur concocter des programmes de formation spécifiques pour leurs cadres.

Des universités proposent déjà des cursus de formation continue qui s'affranchissent des étiquettes des stagiaires. Certaines formation mixent même cadres RH et délégués syndicaux.

Marge de développement

Il reste encore une bonne marge de développement sur ce marché de la formation des élus. Beaucoup de CE se montrent d'ailleurs très économes sur leur budget de fonctionnement, 0,2 % de la masse salariale, qui doit notamment servir à former les élus et à missionner des cabinets d’expertise. Résultat : les réserves s’accumulent d’année en année.

Face à ce constat, le Député Patrice Debray a fait une proposition de loi en novembre 2009 visant à permettre le transfert de 50 % du reliquat du budget de fonctionnement des CE au bénéfice des actions sociales et culturelles.

 Un très mauvais signal envers les élus que de leur donner la possibilité d’effectuer ces transferts de fonds estiment les prestataires. Les formations CE et CHSCT restent souvent sur les basiques avec des organismes qui éprouvent de grandes difficultés face à l'hétérégéoité des niveaux des stagiaires. Pour les élus, la priorité reste leur métier. Il est de moins en moins question de passer trop de temps en formation quitte à compenser sur le budget dédié aux interventions externes de consultants et autres experts. S'absenter  de son poste de travail pour suivre une formation d'élu n'est pas forcément vu comme un gage de professionnalisme par la hiérarchie.

Réforme des IRP

La question de la reconnaissance de l'importance du rôle de l'élu et de sa formation se pose alors. La négociation interprofessionnelle sur la réforme des IRP (Institutions représentatives du personnel ) qui ne fait que commencer, après 8 mois d’une série de rencontres délibérative, devrait prendre le sujet à bras le corps.

Notamment au niveau des moyens. Les cinq jours d’autorisation d’absence pour la formation des élus du CE sont devenus largement insuffisants. Idem pour les élus des CHSCT. Finalement, quoi de pire que le professionnalisme pour un élu ou un délégué syndical si ce n'est l'amateurisme.

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