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26 / 07 / 2017 | 4 vues
Bruno Dupuis / Membre
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Inscrit(e) le 26 / 07 / 2017

Démocratie sociale : la fin du monopole de représentation des syndicats serait contre-productive

Démocratie sociale et monopole de représentation sont deux termes bien dissonants. La suppression de ce monopole et d’une telle aberration semble aller de soi. Ce serait l’un des marqueurs et même des leviers utiles pour la modernisation sociale de notre pays.
 
Il est a priori aisé d’admettre que pour la vitalité de la démocratie sociale, tous les salariés puissent avoir la possibilité de se présenter directement aux élections professionnelles, qu’ils soient syndiqués ou non. Mais n’est-ce pas déjà très largement le cas avec les listes sans étiquettes syndicales élues au second tour qui, de facto, concernent une majorité d’entreprises en particulier dans les PME ?

Légitimité des corps intermédiaires

A priori, supprimer une situation improprement qualifiée de « monopolistique » peut sembler une idée saine. En effet, qui peut s'opposer au principe général que, pour moderniser notre pays, il soit nécessaire de s'attaquer à des rentes de situation arborant un petit air désuet d'après-guerre et/ou de survivance d’économie administrée ?

Pour en juger sérieusement, il faut anticiper les étapes suivantes et aller plus loin que cette perception première simpliste.

En effet, dans la volonté de transformation des relations sociales il faut mesurer le chemin parcouru certes trop lentement pour les impatients et au regard des mouvements de transformation rapides auxquels sont confrontées beaucoup d’entreprises. Il faut aussi intégrer la nécessité pour moderniser notre pays de disposer de corps intermédiaires solides parmi lesquels les syndicats, qui sont des acteurs essentiels de la démocratie sociale.

Il faut aussi admettre que la transformation des relations sociales nécessite du temps pour qu’émergent et se renouvellent des acteurs responsables, constructifs dans l’exercice de négociation. Prendre du recul semble sage afin d’éviter des choix de gribouille où l’on défait ce que l’on a construit la veille.

C'est une référence notamment à la construction constante des dix dernières années, ayant cherché à renforcer la légitimité et la représentativité des acteurs syndicaux alors qu’on leur confie un rôle de plus en plus important en ouvrant largement les champs ouverts à la négociation d’entreprise.

Pour que ce choix porte ses fruits, il faut aussi que les gens investis de mandats de représentation soient formés, aient des parcours professionnels fluides et les organisations syndicales ont un rôle essentiel à jouer à ce titre.

Quelle nouvelle représentativité ?

Vouloir revenir sur ce choix et brûler les étapes ou passer par-dessus bord ce qui peut paraître comme une rente de situation pourrait s'avérer très rapidement contre-productif.

Le risque est de voir apparaître des groupes de gens peu formés, des coordinations ou d’autres formes d’agrégations plus ou moins erratiques posant d’autres problèmes, notamment de représentativité et de capacité à négocier.

N’est pas ce que l’on a pu percevoir il y a quelques mois avec les premiers mouvements sociaux touchant des entreprises de la nouvelle économie, avec celui des chauffeurs de VTC par exemple, où émergent des coordinations qui s’autoproclament, se font ou se défont sans que l’on dispose d’éléments sur leur représentativité et la légitimité des intérêts qu’ils représentent réellement.

Dans une recherche de simplification, de renforcement et d’efficacité du dialogue, certains évoquent une série de réformes : le regroupement d’IRP, une évolution de la mesure d’audience mais le vrai levier du changement n’est pas évoqué… C’est bien notre culture du dialogue social qui est interrogé et la confiance entre acteurs dont nous devons nous emparer pour accompagner les évolutions en profondeur de notre système de relations professionnelles et plus encore de notre pacte social.

Chronique initialement publiée chez les Acteurs de l'économie.

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