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01 / 06 / 2016 | 574 vues
Jacky Lesueur / Abonné
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Delphi : chronique d’une fermeture d’usine qui scandalise les salariés

Delphi-diesel, l'une des trois plus importantes entreprises du bassin d’emploi de la Rochelle (Charente-Maritime), fermera ses portes en décembre prochain. Valérie Forgeront, journaliste à FO-Hebdo s'en est entretenue avec le responsable du syndicat, à l'occasion du congrès de la fédération des métaux FO, qui se tenait la semaine dernière à La Rochelle.

L’entreprise américaine qui fabrique des injecteurs pour l’automobile et était à l’origine l’équipementier de la firme General Motors est basé à Périgny, en banlieue de la Rochelle.

Anciennement Roto diesel puis racheté par Lucas-diesel, cela avant une fusion avec Vareti à la veille de son rachat en 2001 par le groupe Delphi, le site a été construit en 1978 à Périgny.

Delphi-diesel compte actuellement 350 salariés. « En 2001, l’entreprise a connu un effectif de plus de 1 000 salariés dont 378 intérimaires », indique Jean-Louis Dupain, 55 ans, secrétaire du syndicat FO chez Delphi et par ailleurs secrétaire de l’Union des syndicats de la métallurgie de Charente-Maritime, l’USM-17.

Quelle est la raison de la fermeture prochaine de Delphi ? La direction invoque des coûts de production trop élevés à La Rochelle. Après avoir lutté pendant plus d’un an pour améliorer les modalités du plan de sauvegarde des emplois (PSE), les salariés, eux, fulminent.

Vers la Chine…

« L’entreprise dégage encore 38 % de marge brute », indique Jean-Louis Dupain précisant que le savoir-faire des salariés rochelais est reconnu.

« Delphi bénéficie de l’indicateur 3PPM ». Derrière ce jargon professionnel se cache la qualité du travail. Le 3PPM signifie qu’il y a seulement 3 % de défauts sur les premières pièces montées.

Peu importe cependant au groupe Delphi qui, dans sa course à la réduction des coûts, délocalise à tour de bras, bien sûr dans des pays à faible coût de main d’œuvre. Ainsi, dès 2004, Delphi-diesel qui trois ans auparavant seulement rachetait le site rochelais a commencé son mouvement de délocalisation.

Le groupe a ouvert des usines en Roumanie (2004) puis en Turquie et en 2015 en Chine.

« C’est cette usine qui va reprendre la production faite ici à Périgny », s’indigne Jean-Louis Dupain.

Le site de Charente-Maritime n’est pas le seul à faire les frais de la politique de délocalisation du groupe. « Après sa fermeture, il ne restera en France que trois des seize sites Delphi : Villepinte, Saint-Aubin-du-Corbier et Blois, la maison mère de Delphi-diesel elle-même menacée ».

« C’est difficile pour les jeunes salariés »

La situation de délocalisation est d’autant plus choquante pour les salariés du site rochelais que Delphi a bénéficié d’aides substantielles de l’État.

« C’est la cerise sur le gâteau ! Delphi bénéficiait du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE). L’entreprise a aussi bénéficié de 21 millions d’euros de crédit d’impôt au titre de la recherche et développement. Le PSE a coûté 23 millions… ».

Ce plan que l’action de négociation de FO (deuxième syndicat de l’entreprise avec environ 30 % des suffrages) a largement contribué à améliorer laisse les salariés amers.

Ce plan prévoit certes de nombreux mois de portabilité pour les préretraités, deux ans pour les congés de reclassement, une prime de licenciement etc. « Il n’en reste pas moins que la situation est difficile pour les plus jeunes salariés », insiste Jean-Louis Dupain.

« Des formations ont été prévues, suivies de CDD chez Alstom ou encore chez Stelia Aerospace. Mais il n’y a rien de sûr et pérenne pour l’instant ». Face à cette situation douloureuse, les salariés de Delphi sont d’autant plus « remontés » contre le projet de loi sur le travail.

« C’est un projet, libéral, scandaleux. Faciliter les licenciements ? À croire que les politiques sont dans un autre monde ! Nous,nous combattrons ce projet jusqu’au bout. Nous n’avons rien à perdre », fulmine Jean-Louis Dupain.

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