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31 / 10 / 2017 | 3 vues
Antoine Bureau / Membre
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Décryptage des effets des ordonnances sur la représentation salariée

Les ordonnances du gouvernement Macron parues le 23 septembre 2017 bouleversent considérablement le concept de la représentation salariée dans l’entreprise. Dans les entreprises de plus de 50 salariés, les instances CE, CHSCT et DP disparaîtront au profit du comité social et économique (le CSE). De nouvelles élections auront lieu entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019 et les organisations syndicales auront 2 ans au lieu de 4 pour accompagner leurs représentants du personnel dans ce nouveau processus préélectoral et la renégociation d’une grande majorité des accords d’entreprise.

La négociation d’entreprise pâtissait d’un différentiel trop grand dans le rapport de forces entre employeurs et représentants du personnel. Les négociations annuelles obligatoires (NAO) étaient notamment encadrées par des plafonds financiers prédéterminés qui n’étaient que rarement franchis.

Même si les moyens de pression des employeurs existent et sont connus, les accords d’entreprise prioritaires prévus par la loi El Khomri donnent aux délégués syndicaux avertis de nouveaux pouvoirs dans la négociation d’entreprise.

Nous observons une simplification administrative de la gestion de la représentation salariée. Nous comprendrons alors aisément que c’est bien à travers la connaissance du contexte juridique environnant que les représentants du personnel pourront tirer leur épingle du jeu et faire valoir l’accès à la flexibilité voulu par l’employeur au profit de nouveaux acquis sociaux.

Nombre se feront berner, noyés par le rythme effréné des changements dans leur entreprise et négocieront au mieux la conservation des anciens acquis au détriment de la flexibilité de leurs horaires ou la révisions de leur prime.

De même, si nos représentants syndicaux ne négocient pas des accords d’entreprise protecteurs pour leurs mandats, les élus du personnel ne disposeront plus que de 2,5 fois moins d’heures au CSE que dans le cadre du cumul des mandats DP, CE et CHSCT.

Du côté des organisations syndicales, le risque d’échec dans les négociations passées était limité par le garde-fou des conventions de branche. Demain, un délégué syndical mal préparé pourra négocier en-deçà du minimum conventionnel des branches dans de nombreux domaines, comme celui des horaires ou des primes.

Mais quel sera le visage de nos représentants du personnel du futur ? Des bêtes de travail, capables d'organiser voyages et arbres de Noël et de rallier des adhérent à leurs syndicats, d'être à l'écoute des salariés, de gérer les biens du CSE tout en assistant aux réunions de manière active et d'interagir avec leurs conseils d'administration, tout cela en 20 heures de délégation de délégation par mois… L’une des questions primordiales de ces ordonnances réside dans la durée limitée des mandats au CSE car, comme il est inscrit dans les ordonnances, à partir du 1er janvier 2018, la vocation d’élu CSE ne pourra pas durer plus de 12 ans…

La deuxième ordonnance relative à « la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales » prévoit également que dans les entreprises de 11 à 49 salariés soit institué un conseil d’entreprise d’un ou deux représentants non mandatés par une organisation syndicale qui pourront négocier des accords encadrant la vie du salarié et ses conditions d’emploi et de rémunération. Une avancée certaine du dialogue social dans la PME, qui pose la question de la compétence et de l’encadrement des ces salariés choisis. Paradoxalement, le rapport de force est souvent plus déséquilibré dans la TPE, permettant rapidement d’établir des règles favorables à l’activité de cette dernière.

Nous pouvons nous poser la question de l’objectif d’une telle réforme en vue d’envoyer un message positif au volontariat et à la création d’entreprise parallèlement à une volonté de responsabilisation individuelle allant contre le principe du collectif.

La limitation du pouvoir de contestation des organisations syndicales semble être affichée par un gouvernement faisant le pari de l’amélioration du dynamisme économique et par conséquent de l’amélioration du marché de l’emploi sur le territoire domestique. L’une des variables d’ajustement de cette attractivité pour l’investisseur réside notamment dans le bouleversement du dialogue social dans l’entreprise.

On nous avait promis une simplification du code du travail ; nous observons une simplification administrative de la gestion de la représentation salariée pour l’employeur et une adaptation à la carte des paradigmes qui régissent le travail dans l’entreprise.

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