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24 / 09 / 2013 | 12 vues
Sylvain Thibon / Membre
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À quand une gouvernance chez Vivendi ?

Ça bouge paraît-il dans les hautes sphères de Vivendi. Bolloré serait sorti du bois pour prendre en main la destinée de la vieille dame en mal de stratégie. Règlements de compte ou véritable volonté, nous devrions vite le savoir. Vite, on peut l’espérer pour les 60 000 salariés du groupe Vivendi dans le monde, une clarification que chacun attend maintenant depuis des mois.

Salariés, managers, actionnaires, voilà bientôt deux ans que le groupe vit dans l’attente d’une vision d’avenir. La dernière annonce du conseil de surveillance confirme la séparation des activités télécoms et médias.

Rien de nouveau puisque cette orientation avait en partie provoqué le départ de Jean-Bernard Levy en juin 2012. « Son départ est expliqué sans ambages par l'existence d'une « divergence sur l'évolution stratégique du groupe », dans un communiqué publié à l'issue d'une réunion du conseil de surveillance. M. Lévy sera alors remplacé par Jean-François Dubos, secrétaire général du groupe », était-il alors écrit dans la presse du moment.

Depuis, c’est la valse-hésitation. Volonté de se séparer d’actifs importants, finalisation de la cession d’Activision Blizzard, vente de Maroc Télécom, des premiers pas qui devraient permettre de désendetter le groupe pour le réorganiser.

Et maintenant ? Une crise de gouvernance en annonçant souvent une autre, c’est toute la stratégie de Jean-René Fourtou qui se trouve bousculée par le nouvel homme fort entré au capital de Vivendi par la revente de ses chaînes D8 et D17 à Canal+. 

  • Tout s’est noué alors que Jean-René Fourtou avait pour ambition de nommer le patron de Bertelsmann à la tête du groupe. Impensable pour Bolloré qui souhaite que le groupe soit dirigé par un Français, plutôt jeune. La jeunesse semble être d’ailleurs un critère déterminant pour Bolloré… Reste à trouver l’oiseau rare !


Plus vite cela ira, mieux ce sera pour Canal+ aussi. Dans ce contexte, à Canal, c’est l’attente, pesante d'une clarification. Il faut espérer que la durée du « dauphinat Canal » n’atteigne pas celle du premier historique du royaume de France, Charles qui dut attendre 11 ans avant de devenir roi… Car c’est toute l’organisation de l’entreprise qui est en train de se gripper.

La seule stratégie de court terme se résume aujourd'hui aux plans d’économies budgétaires qui se succèdent les uns après les autres, année après année… Il faut encore faire des économies ! Ne pourrait-on passer d’autres messages aux 4 000 salariés du groupe pour le proche avenir ? Sans d'autres perspectives que la ligne d’horizon budgétaire, le marasme ambiant continuera de progresser, un attentisme pesant et contre-productif.

Hormis le studio Canal en pleine expansion ou les activités de Canal+ overseas, les autres activités du groupe, le cœur même du réacteur semble être entré comme en hibernation, dans l’attente…  À quand le sursaut, à quand le dynamisme retrouvé, à quand l’innovation éditoriale ou technologique, l’investissement dans l’avenir, à quand un aggiornamento dans le management dont la tendance est plutôt au délitement, à quand une révolution sociale ouverte, courageuse, intelligente ? C’est quand le changement ?

Chacun est prêt aux efforts nécessaires pour participer à cette nouvelle ambition, un Canal+ tourné vers l’avenir et l’international. Des investissements ambitieux quand bien même il faudrait en passer par une baisse du résultat sur deux ou trois ans, mais aussi la nécessité d’une autre politique sociale, d’un nouveau modèle de développement. Plus de 50 ans mis sur la touche, recrutement exclusif de Bac+5 souvent déçus après seulement 12 mois de présence, erreurs de casting…

L'ambition de Bolloré de construire un groupe de médias aux reins solides est encourageante. Mais va-t-on encore perdre une année en tergiversations de toutes natures, en bataille de pouvoirs ?

Des compétences encore présentes. Mais il faut avancer et vite car ces compétences-là sont déstabilisées, en partance parfois volontairement, plus souvent poussées vers la sortie. Trop vieux, pas assez geeks, trop peu adaptables, profitez donc de l’ambiance générale pour faire progresser le « turn-over », véritable marotte de certains de nos dirigeants…

Malheureusement, nous prouvons mois après mois que ces départs de compétences historiques ont plutôt eu pour premier effet d'affaiblir, de fragiliser tout l’édifice sans pour autant renforcer les activités. C’est un mauvais calcul, selon nous. C’est toute la politique de recrutement et de mobilité qu'il faut repenser.

Notre modèle social vieillit à la vitesse de la lumière. Il faut l’adapter, le rajeunir, l’ouvrir et ce n’est absolument pas contradictoire avec la préservation des plus hautes compétences accumulées depuis bientôt 30 ans. Mais pour l’instant, c’est plutôt le blocage et l'inertie.

Il ne saurait y avoir de futurs succès sans une adhésion forte du corps social. Cette adhésion se délite mois après mois et les résultats de l’enquête Canal+ moi devraient bientôt le démontrer.

  • Le peu de précipitation des salariés pour répondre aux questions de Towers Watson en est déjà un premier signe.


Alors si, comme Léo Scheer, créateur de Canal+ dans les années 1980, nous pensons que notre entreprise a pris un sérieux retard sur son marché, il faut se dépêcher d’agir pour que les dix prochaines années soient synonymes d’un nouveau rayonnement, et non de l’attente d’une mort douce annoncée, d’un délitement dans la douleur.

S’il est compréhensible d’éviter toute précipitation, il serait inconcevable que nous restions dans le flou encore plusieurs mois. Stratégie, organisation, développement, management, orientations sociales, partout dans tous les domaines l’urgence d’une clarification est perceptible et souhaitée. Redressée économiquement, Canal et ses 4 000 salariés doivent savoir de quoi sera fait le proche avenir, pas seulement de coupes sombres dans les budgets ou de licenciements abruptes mais d’une véritable stratégie expliquée et partagée.

L'onde de choc des mouvements chez Vivendi devraient rapidement approcher les rives d'Issy-les-Moulineaux et de Boulogne. Selon toute vraisemblance, 2014 devrait être l'année de la clarification tant attendue et le plus tôt sera le mieux.

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