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05 / 01 / 2012 | 1 vue
Richard Rigano / Membre
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Social et TVA ne font pas bon ménage

Considéré comme l'impôt le plus injuste, il est paradoxal de vouloir faire de la TVA le nouvel outil du financement de la protection sociale.

Rarement un projet de taxe aura aussi peu mérité son nom : social et TVA ne font pas bon ménage.

Le Président de la République en ayant réaffirmé sa volonté, ses ministres montent au créneau pour défendre un projet de TVA sociale, censé faire payer aux importations le prix de notre protection sociale. Comme à l'accoutumée, le Président appelle une réunion, en l'occurrence un sommet social, écoute ce que les invités ont à dire et décide ce qu'il avait de toute façon prévu...

Sur une remise en cause aussi profonde du financement de la protection sociale, bâtie en 1945, et dans le cadre d'une fiscalité aussi complexe et opaque que celle que nous connaissons, peut-on se permettre de traiter la chose à la hussarde ? La destruction d'un système reposant sur les cotisations sociales est un enjeu de société qui mérite un vrai débat, d'autant que les conséquences n'en sont pas évidentes.

La cotisation sociale est en fait un salaire indirect des travailleurs, dont la contrepartie est perçue sous forme de prestations sociales versées par des assurances sociales obligatoires et collectives. C'est le système le plus solide et le plus fiable qui n'ait jamais été mis en place. Il s'oppose par définition à un système d'assurance privée, dans lequel chaque individu essaie, selon ses moyens, de faire face aux aléas de la vie.

L'affaiblissement de notre système actuel vient en partie de la crise de l'emploi et du ralentissement (voire du blocage) des rémunérations mais aussi de l'assèchement des recettes par une multitude d'allègements et d'exonérations qui se sont faits sans aucune conséquence positive pour l'emploi, comme le rappellent les rapports de la Cour des Comptes.

En fait, transféré sur la TVA, le financement de la protection sociale revient à exempter les entreprises des charges sociales au détriment des ménages. La présidente du Medef voit là l'une de ses principales revendications aboutir et elle a déjà fait savoir que les éventuelles baisses de cotisations seraient consacrées uniquement à l'amélioration de la compétitivité des entreprises. Une belle tarte à la crème puisque de nombreuses entreprises (et pas des moindres) ont délocalisé leur production, non parce qu'elles souffraient d'un déficit de compétitivité mais pour accroître encore un peu plus leurs profits. L'industrie du luxe en est un lumineux exemple.

L'autre contradiction du projet présidentiel réside dans le fait qu'en ces temps de crise du pouvoir d'achat et de récession, l'augmentation de la TVA risque de pénaliser encore un peu plus une économie déjà moribonde. Selon certains économistes, il faudrait augmenter le taux actuel de 5 points, soit de 19,6 à 24,6 % pour compenser la baisse des charges des entreprises. Il en résulterait une augmentation du prix des produits et services qui pénaliserait surtout les ménages les plus modestes, puisque l'achat de n'importe quel produit ne tient évidemment pas compte des revenus de l'acquéreur. Tout le contraire d'une protection sociale basée sur la cotisation.

Autre danger, celui de voir la protection sociale reposer essentiellement sur la consommation, ce qui en temps de crise durable fragilise, voire menace, tout le système.

C'est peu dire que l'utilisation des recettes de la TVA, les plus importantes pour l'État, pour financer la protection sociale, n'inspire aucune confiance, d'autant qu'elle n'entre dans aucun objectif de transparence et de justice fiscale. Un système où la TVA constitue 45 % des recettes de l'État, alors que l'impôt sur le revenu ne rapporte plus que 20 % et l'impôt sur les sociétés 15 %, est un système devenu absurde. Or, le projet de Nicolas Sarkozy va aggraver cette situation d'une façon spectaculaire.

On pourrait penser que l'on reste, en matière de fiscalité, dans du « bricolage » et ce serait déjà consternant. Mais il ne faut pas s'y tromper, du bouclier fiscal et de la réduction de l'ISF à la TVA dite sociale, tout va dans le même sens idéologique. À l'issue de l'actuel quinquennat, le bilan est lourd pour le président des riches...

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