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28 / 01 / 2016 | 2 vues
Thierry Grenier / Membre
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Référendum pour les accords collectifs : une vision simpliste du dialogue social

La loi en préparation par Myriam El Khomri contiendrait une mesure qui peut soulever quelques questions. Dans les entreprises disposant de syndicats représentatifs, pour qu’un accord soit valide il faudrait un fait majoritaire. Cette mesure existe déjà par ailleurs pour certains accords collectifs (par exemple le regroupement des instances dans les entreprises de plus de 300 salariés qui nécessite un accord majoritaire). La nouveauté est que ce fait majoritaire ne soit pas réservé aux syndicats. Si les syndicats majoritaires n’approuvent pas l’accord, des syndicats minoritaires pourraient s’appuyer sur un référendum majoritaire des salariés.

Majorité « conditionnelle »

Cela reviendrait à créer une majorité « conditionnelle ». Rappelons que la loi de 2008 avait pour objectif de légitimer les acteurs du dialogue social, la représentativité syndicale se mesurant lors de chaque élection. Lors du premier tour, les salariés déterminent, démocratiquement la proportionnalité de chaque syndicat dans le dialogue social.

Cette mesure reviendrait à remettre en cause cette proportionnalité ou à la subordonner à l’accord des salariés pour chaque projet de l’employeur.

Vision simpliste du dialogue social

C’est aussi une vision simpliste du dialogue social. Le dialogue social (d’après l’OIT) regroupe notamment l’information, la consultation et la négociation. Quand le dialogue social se résume à la réponse positive ou négative à une question, où se situe l’information et la consultation , Cela ne va-t-il pas à rebours des dernières avancées dans ce domaine ? L’accès à la base de données unique de l’entreprise par les représentants du personnel, les trois consultations récurrentes de la loi Rebsamen (stratégie, finance et politique sociale) qui pouvaient préparer les trois négociations obligatoires sur le même thème.

Le dialogue social s’inscrit dans une vision systémique de l’entreprise et cette vision ne peut exister qu’en renforçant les informations et les consultations réelles avec les élus du personnel et les syndicats. Il ne faut pas oublier que, dans les accords de compétitivité-emploi issus de la loi de 2013, les organisations syndicales pouvaient se faire assister par un expert mandaté par le comité d’entreprise qui pouvait aider les négociateurs à prendre en compte l’ensemble de la situation économique, sociale et financière et justifier ou non du projet de l’employeur. Quelle place à ces approches systémique dans ce projet ?

Quelle est donc la signification du scrutin qui a donné la majorité à tel ou tel syndicat ?

  • Le cas du blocage à la FNAC est mis en avant pour expliquer ce projet. Mais le choix des salariés de la FNAC se porte-il sur le travail dominical ou sur une demande d’augmentation de salaire qui, pour la direction, ne peut passer que par le travail dominical ? Les élus de la FNAC ne sont-ils plus représentatifs et si c’est le cas, quelle est donc la signification du scrutin qui a donné la majorité à tel ou tel syndicat ?


Bien sûr il ne faut pas oublier que la France détient un record dans le taux de syndicalisation (le plus bas de l’OCDE après la Turquie) mais elle détient aussi un record dans le taux de couverture des salariés par des textes conventionnels (notamment les conventions collectives). Il faut certainement renforcer la syndicalisation en France et les syndicats ne sont pas exempts de reproche mais cette mesure n’aurait-elle pas l’effet inverse ? La loi Rebsamen a déjà fortement ouvert la possibilité de négocier en l’absence de syndicat dans l’entreprise (d’ailleurs en utilisant aussi parfois le référendum), il faut au contraire renforcer la présence syndicale peut-être en donnant du sens à l’adhésion des salariés et en renforçant la négociation en entreprise.

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