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25 / 05 / 2017 | 1 vue
Didier Cozin / Membre
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Peut-on rendre le CPF utile en le "survitaminant"

Les pouvoirs publics nouvellement élus en mai 2017 veulent une nouvelle fois réformer la formation professionnelle, peut-on espérer que celle-ci gagne en efficacité et en utilité est la question qui doit être posée

 La formation professionnelle, tout comme sa grande soeur l'éducation initiale, ne rend pas tous les services attendus par un pays et ses travailleurs au XXIè siècle

- elle est profondément inégalitaire (suivant en cela la pente organisée par l'école)

- elle est impécunieuse : 32 milliards prétendument dépensés chaque année mais en fait moins de 6 milliards pour un secteur privé sur qui repose l'innovation, le développement économique et les multiples défis du siècle (la transformation digitale, les transitions énergétiques et environnementales...)

- elle est bureaucratique, complexe à loisirs et largement inadaptées aux besoins des travailleurs qui ne veulent pas reprendre l'école et des entreprises (qui ne cherchent pas des diplômés mais des compétences)

Les pouvoirs publics proposent pour l'heure actuelle de reprendre le dossier du CPF (Compte Personnel de Formation) en le "survitaminant" (plus d'heures et une cotisation de 1% de la masse salariale, soit 5 fois plus qu'actuellement) et en le simplifiant (plus d'obligation de certification pour les formations courtes)

La formation n'est pas de la consommation

 Le problème du CPF ne tient pas uniquement à son absence de financement généralisé (40 euros par an et par personne en moyenne) ou à son extrême  complexité (un parcours du combattant pour l'intrépide candidat à un stage CPF, même très court) le problème tient bien plus au statut, aux modes de réalisation et à l'image de la formation.

Le Compte Formation réduit la qualification et le développement des compétence à un simple problème de tuyauterie (le système d'organisation des formations) et de robinet (plus ou moins d'argent pour faire son CPF) alors que le problème de la formation en France est bien plus large que celui du dispositif

La formation professionnelle est intimement lié au travail, à ses conditions de réalisation, à ses perspectives d'évolution, à son image et sa valorisation

Le CPF se place dans une optique de capitalisation des connaissances tout comme l'éducation nationale qui se positionne avant tout sur le diplôme et le label garanti par l'Etat

Dans la société de la connaissance l'accumulation de titres ou de diplômes n'est plus synonyme de compétences ou de qualité professionnelle

 La société de la connaissance et de l'information change totalement l'acquisition des savoirs, leur utilisation, leur valorisation.

Le savoir et la connaissance aujourd'hui sont devenus des flux que personne ne peut prétendre encapsuler (dans des référentiels) arrêter (dans des programmes) stocker (dans des labels d'Etat).

Face à de tels flux de bits (la connaissance double désormais tous les 5 ans, la puissance des processeurs tous les 2 ans) les hommes ont trois choix possibles 

 -le retrait : le travail ne serait plus possible, les machines prendraient toute la place et le salut passerait à la fois par la taxation des machines (le méchant robot qui ne paie pas nos retraites) et le revenu universel (l'important n'est pas le travail mais les revenus)

- la résistance : notre modèle social et éducatif est tellement supérieur aux autres que le monde entier finira bien par s'y rendre et il suffit d'attendre que les autres changent et s'adaptent à nous (le phénomème de la Carpe qui attend dans la vase que le temps s'écoule)

- le changement par le bouleversement de nos systèmes éducatifs. Si la formation tout au long de la vie représente bien l'avenir de l'éducation et de la formaiton dans le monde il faut remettre à plat tout l'édifice scolaire,universitaire et formatif en France

Comment remettre l'éducation et la formation au coeur de la société française ?

- en responsabilisant chacun de ses acteurs : les salariés, les apprentis, les élèves, les professeurs, les familles, les entreprises...

- en cessant de faire de l'école de la République une garderie au service du traitement social du chômage (on garde le plus longtemps possible les jeunes dans le système éducatif sous prétexte qu'ils seraient encadrés alors qu'on ne veut pas d'eux au dehors dans la société)

- en faisant payer le vrai prix d'une éducation et d'une formation de qualité aux Français : au delà de 16 ans il ne serait pas choquant de faire payer le prix de l'éducation (avec un vrai système de bourses au mérite); les études à l'Université n'ont aucune raison d'être gratuites et les pays qui ont les meilleurs université (Angleterre et USA notamment) ont tout un système payant d'études

- la formation doit-elle aussi sortir du mythe de la gratuité. Dans tous les pays du monde la formation est à la charge des salariés (et parfois des employeurs) et prétendre qu'aujourd'hui les entreprises devraient payer à la fois tout le social du pays (les retraites, la santé, le chômage) et l'éducation des travailleurs est une vue de l'esprit.

Si la formation marche si mal depuis des lustres en France c'est parce qu'en 1971 on a prétendu que seul les employeurs devaient la payer et la mettre en oeuvre sur le temps de travail

- la mutualisation était un pseudo système assurantiel qui n'a jamais marché (mais qui a permis pendant 45 ans de financer les syndicats en France)

- les entreprises ne peuvent à la fois supporter des coûts sociaux parmi les plus élevés des pays européens (les charges sociales), une complexité galopante, un code du travail empêchant toute innovation sociale, un temps de travail parmi les plus faibles au monde (les 35 heures n'étant qu'une partie du problème) et en plus offrir du temps (si rare) de travail pour former leurs salariés

 Le CPF peut être amélioré mais il ne résoudra pas tous les problèmes de compétences en France

 Si début 2018 les pouvoirs publics libérait le CPF (pour 2019 car la formation ne réagit pas dans la journée ou le mois) en lui octroyant 1 % de la masse salariale de toutes les entreprises (pas seulement celles de plus de 10 salariés)

- on passerait de 800 millions de collecte (environ) à 5 milliards environ

- il serait possible de former 20 % de la population salariée sur des formations de 20 à 30 heures chaque année

Quant aux jeunes en insertion et aux chômeurs de longue durée ils seraient formés sur d'autres budgets (promis par l'Etat soit 15 milliards sur 5 ans)

Les progrès en formation sont donc possibles mais à trois conditions

 1- Que tout le monde paie pour la formation (1 % pour les employeurs) mais aussi une partie sur une cotisation salariale pour la formation (qui non seulement apporterait des fonds supplémentaires mais provoquerait sans nul doute une appétence bien plus importante pour la formation)

 2- Que l'Etat accepte de libérer totalement la formation du cadre règlementé actuel, faisant confiance aux opérateurs (avec un simple pouvoir de sanction en cas de manquement après la commission d'éventuels actes délictueux)

 

 

 

 

 

 

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